�par Annie Besant �
INDEX
����������� En suivant jusqu�au bout les spires de la route, nous voyons comment elle s��l�ve au sommet de la montagne. Nous voyons qu�elle aboutit � un Temple imposant, un Temple comme de marbre blanc, qui se d�tache rayonnant et lumineux sur l�azur de l�espace. Ce Temple est le but du p�lerinage ; ceux qui y sont entr�s ont achev� leur course, du moins en ce qui concerne cette montagne-l�, et s�ils y demeurent encore, c�est uniquement dans le but de venir en aide � ceux qui montent. Si nous consid�rons de plus pr�s le Temple, si nous cherchons � voir comment il est construit, nous trouverons au centre un Saint des Saints, entour� de quatre enceintes circulaires et concentriques. Ces quatre enceintes sont � l�int�rieur du Temple, s�par�es entre elles par des murailles, et pour passer de l�une � l�autre le voyageur doit franchir un portail,, un portail unique dans chaque mur d�enceinte [ Ces quatre � portails � sont les quatre grandes Initiations ]. En dehors du Temple se trouve encore une cinqui�me enceinte, l�Enceinte Ext�rieure, o� les voyageurs sont beaucoup plus nombreux que dans le Temple m�me.
����������� Nous avons donc sous les yeux un tableau de l��volution humaine, du chemin que suit la race et du Temple qui en est le terme. Sur la route, une vaste multitude d��tres humains qui montent, lentement, si lentement qu�ils semblent parfois, pour chaque pas en avant, faire un pas en arri�re. La tendance g�n�rale de l�ensemble est ascensionnelle, mais si lente est leur marche, qu�� peine peut-on la percevoir. Cette �volution continue de la race � travers les �ges semble tellement longue et tellement p�nible qu�on se demande comment les p�lerins ont le courage de monter si longtemps. � suivre la race autour du mont, des millions d�ann�es s��coulent ; des millions d�ann�es encore se passent � suivre un seul p�lerin dans sa marche. Et nous voyons alors que ce p�lerin semble traverser une interminable succession de vies employ�es, toutes, � monter. Une lassitude nous gagne rien qu�� suivre du regard ces multitudes immenses qui s��l�vent si lentement, �tage par �tage, sur le chemin tournant. En les observant nous nous demandons : � Pourquoi donc montent-ils si lentement ? Comment se fait-il que ces millions d�hommes accomplissent un si long voyage ? Pourquoi leur effort est-il sans cesse tendu vers ce Temple dress� sur la cime ? �
� les observer, il semble que la lenteur de leur marche provienne de ce qu�ils ne voient pas le but, de ce qu�ils ne comprennent pas la direction que suit leur race dans son voyage. Si nous consid�rons s�par�ment quelques-uns d�entre eux, nous les voyons se d�tourner � chaque instant de la route, attir�s de-ci de-l�, sans d�termination dans leur allure. Au lieu d�aller droit devant eux comme des gens affair�s, ils errent � l�aventure semblables � des enfants qui s��cartent du chemin pour cueillir une fleur ou poursuivre un papillon. Toute leur vie semble perdue, et lorsque, surpris par la nuit, ils suspendent pour un temps leur marche, bien faible est le progr�s accompli. Il ne semble pas que le d�veloppement intellectuel, quelque lent qu�il soit, lui aussi, acc�l�re de beaucoup leur mouvement. Ceux dont l�intellect est � peine form� paraissent s�endormir apr�s chaque jour de vie, ayant � peine d�pass� l��tape du jour pr�c�dent, et ceux qui sont intellectuellement plus �volu�s ne marche gu�re plus vite, et semble gagner peu de terrain dans chaque existence. � les regarder monter ainsi le coeur se lasse, et l�on se demande pourquoi ils ne l�vent pas les yeux pour voir o� leur chemin les m�ne.
Or il semble que l�Enceinte Ext�rieur du Temple, cette premi�re enceinte o� p�n�trent quelques-uns de ceux qui sont en t�te de l��volution, n�ait� pas comme seule voie d�acc�s le chemin qui tourne si longtemps autour de la montagne. Car en regardant bien nous voyons de nombreux points, sur la route en spirale, d�o� l�Enceinte Ext�rieure peut �tre atteinte, atteinte par des sentiers plus courts qui ne tournent pas autour du mont, mais en gravissent directement la pente. Le p�lerin au coeur intr�pide, aux membres vigoureux, peut choisir ces sentiers. Et si nous cherchons � voir comment certains parviennent � l�Enceinte Ext�rieure plus rapidement que leurs semblables, nous verrons qu�ils ont quitt� la longue route pour faire un premier pas sur le sentier direct, du jour o�, pour la premi�re fois, un rayon �man� du Temple a frapp� leurs yeux. Car ce temple blanc qui couronne la cime projette des rayons de lumi�res sur la pente du mont. De temps � autre un voyageur d�tourne son regard des papillons et des cailloux du chemin, et le rayon de lumi�re semble frapper ses yeux. Il l�ve la t�te vers le Temple, il le voit un instant, et apr�s cette premi�re vision, jamais plus cet homme n�est enti�rement semblable � ce qu�il �tait auparavant. Ne f�t-ce qu�un instant, il a reconnu un but et une fin, et il a entrevu le sommet vers lequel il monte, et le sentier abrupt, mais tellement plus court, qui escalade directement la pente au sommet de laquelle le Temple rayonne.
Et dans cet instant o� l��me reconna�t le but � atteindre, dans cet instant o� elle comprend, en un �clair d�intuition, qu�au lieu de la longue route qui non seulement contourne la montagne mais s�enroule encore sur elle-m�me, il est un sentier direct conduisant au terme, - dans ce fugitif instant d�illumination, l��me comprend en outre que le sentier a un nom qui est Service, et que tous ceux qui abordent� cette voie directe doivent y entrer par une porte o� brille en lettres d�or l�inscription : Service de l�homme. L��me que nous observons a d�s lors compris qu�avant de pouvoir atteindre m�me l�Enceinte Ext�rieure du Temple, il lui faut franchir cette porte, et se rendre compte de ceci : Que la vie est destin�e au service, et non � la satisfaction des d�sirs �go�stes, et que le seul moyen de monter plus vite consiste � monter dans l�int�r�t de ceux-l� qui s�attardent, afin que du Temple, puisse �tre donn�e aux p�lerins de la longue route une aide plus efficace qu�ils n�en pourraient recevoir autrement.
Ainsi que je l�ai dit, ce n�est l� qu�un �clair, une vision fugitive qui s��vanouit aussit�t, car l�oeil n�a fait qu��tre frapp� par un des rayons de lumi�re qui descendent du mont. Et tout au long de la route en lacets gisent �pars, tant d�objets attrayants, que le regard de l��me en est facilement captiv� � nouveau. Mais la lumi�re une fois aper�ue, il est toujours plus facile de la revoir. Le but � atteindre une fois entrevu, et le devoir et le pouvoir du service une fois compris, ne f�t-ce qu�en une intuition passag�re, il reste au fond de l��me un d�sir de gravir ce sentier plus court, et de trouver la voie qui monte tout droit vers l�Enceinte Ext�rieure du Temple.
Apr�s cette premi�re vision, la lueur se renouvelle de temps en temps. Elle se renouvelle d�un jour � l�autre de la longue ascension, plus brillante peut-�tre � chaque renouvellement. Et nous voyons ces �mes commencer � monter avec plus de constance que leurs semblables. Bien qu�elles tournent encore autour de la montagne, elles s�adonnent d�une mani�re plus suivie � la pratique des vertus, et se consacrent avec plus de persistance � la Religion,, � la Religion qui s�efforce de leur montrer comment elles peuvent atteindre enfin le Temple.
Les �mes qui ont entrevu cette fin possible et se sentent plus ou� moins attir�es vers le sentier qui y conduit, se distinguent donc de leurs semblables par leur diligence et leur attention, et passent bient�t en t�te de l�immense multitude �parpill�e sur la route. Elles voyagent plus vite parce qu�il y a plus de r�solution dans leur marche, parce qu�elles commencent � comprendre la direction qu�elles suivent ; d�o� leurs efforts, d�abord bien imparfaits, pour marcher, c�est-�-dire vivre, dans un but d�termin�. Et bien que comprenant encore � peine ce que sera en fin de compte ce but ( car elles en ont une vague intuition plut�t qu�une compr�hension nette ), elles cessent n�anmoins d�errer � l�aventure, reperdant le lendemain ce qu�elles ont gagn� la veille. Elles montent d�sormais d�une mani�re continue sur la route tournante, et chaque jour de vie les voit monter un peu plus vite, jusqu�� ce qu�elles aient pris sur les multitudes une avance d�cisive par la� spiritualit� de leur vie, la pratique des vertus et le d�sir croissant de venir en aide � leurs semblables. Ces �mes, bien qu�encore sur la route tournante, acc�l�rent donc leur marche vers le sommet et commencent plus nettement � s��vertuer. Elles s�efforcent d�aider leurs semblables, et tendent une main secourable aux �tres qui les entourent afin de les entra�ner plus rapidement sur la voie.
Bient�t, tandis qu�elles s�avancent escort�es par les �mes qu�elles aiment et qu�elles aident, voici venir � leur rencontre une forme admirablement belle, bien que d�aspect s�v�re au premier abord. Elle commence � leur parler tout bas d�un chemin plus court, et � leur indiquer les conditions d�un progr�s rapide. Nous savons que cette forme se nomme Connaissance. Elle est en quelque sorte la soeur des deux autres influences secourables dont nous avons d�j� parl�, et qui sont le Service de l�homme, et la Religion auxiliaire des �mes dans la pratique de la vertu. Toutes trois ensemble guident les pas de l��me jusqu�� ce qu�enfin se l�ve une aube plus lumineuse avec une plus enti�re compr�hension. Et vous voyez alors que cette �me commence � se faire une id�e nette du but de son ascension. Elle ne se contente plus de r�ver d�avenir, mais elle cherche � faire de ce r�ve le but d�fini de ses efforts, elle reconna�t le Service comme loi de la vie.
Voici maintenant qu�ob�issant� � un mouvement spontan�, l��me prof�re � mi-voix une promesse sinc�re d�aider au progr�s de la race. C�est l� son premier voeu, le vu de se consacrer un jour au service de l�humanit�. Sans �tre encore un vu de plein propos, il implique cependant la promesse d�un tel voeu� pour un temps � venir. Il est �crit dans un Saint Livre qu�un des Grands �tres, qui suivit la voie plus br�ve et gravit le sentier ardu, et qui la gravit m�me si rapidement� qu�il laissa derri�re lui toute sa race et se trouva seul en avant, gage de l�humanit� future, semblable aux pr�mices de la r�colte ; - il est �crit de Celui qui, dans un �ge plus r�cent, fut connu sous le nom de Bouddha � qu�il parfit Son voeu de Kalpa en Kalpa . Car l�accomplissement qui allait couronner Sa vie devait commencer par la promesse du service.� Ce premier voeu de l��me la rattache aux Grands �tres qui l�ont pr�c�d�s, et forge en quelque sorte le lien qui l�attire au sentier de l��preuve, au sentier qui la conduira jusqu�� l�Enceinte Ext�rieure, et � travers cette Enceinte jusqu�au seuil du Temple m�me.
Apr�s mainte et mainte vie de travail et d�effort, devenue plus pure, plus noble, plus sage de vie en vie, l��me prof�re enfin clairement et distinctement sa volont� maintenant puissante. Et lorsque cette volont� s�annonce comme une d�cision nette et pr�cise, non plus comme un murmure qui aspire mais comme un verbe qui ordonne, cette volont� r�solue frappe au� portail de l�Enceinte Ext�rieure, et le coup qu�elle frappe, nul ne peut le m�conna�tre, car il exprime la force d�une �me d�cid�e � vaincre, d�une �me assez instruite en outre pour comprendre l�immensit� de la t�che qu�elle entreprend.� Car, parvenue maintenant au seuil de cette premi�re enceinte, l��me sait ce qu�elle s�efforce d�accomplir ; elle con�oit combien formidable est la difficult� qui l�attend. Sortir de sa race, voil� ce qu�elle propose, sortir de cette race qui va continuer � monter en tournant sans cesse autour du mont pendant des �ges sans nombre,� passant d�un monde � l�autre, autour de ce que nous appelons la cha�ne plan�taire, passant et repassant autour de cette cha�ne jusqu�� sati�t�. L��me intr�pide qui frappe maintenant au portail ext�rieur veut escalader cette m�me montagne en quelques br�ves vies humaines; elle veut gravir pas � pas, affrontant les pentes les plus ardues, le sentier qui la conduira droit au Saint des Saints. En un espace de temps qui sera mesur� par un petit nombre de vies : elle a l�intention d�accomplir ce qui exigera pour la race des myriades d�existences � t�che si formidable qu�� la consid�rer, un vertige s�empare du cerveau, t�che si puissante, que de l��me qui l�entreprend on peut presque dire qu�elle a commenc� � se rendre compte de sa propre divinit�, de la Toute-puissance qui g�t latente en elle. Car c�est assur�ment une t�che digne d�un Dieu, que d�achever en quelques vies, � partir du point o� la race en est actuellement de son �volution, ce que l�ensemble de cette race accomplira non seulement pendant le restant de son s�jour sur ce globe, mais dans les � rondes [ une �ronde ] d�signe un tour entier de la cha�ne plan�taire. Une explication d�taill�e du processus �volutif est donn�e dans l�ouvrage d�Annie Besant� � La Sagesse Antique � et dans l�oeuvre de Jinarajadasa � L��volution Occulte de l�Humanit� � (Adyar). (Note de l��diteur )].� � encore � venir. L�accomplissement d�une telle t�che indique clairement que la Puissance Divine est en voie de se parfaire au sein de la forme humaine.
Ainsi l��me frappe � la porte, la porte s�ouvre pour la laisser passer, et elle p�n�tre dans l�Enceinte Ext�rieure. Il lui faut maintenant cheminer � travers cette Enceinte, et la traverser pas � pas jusqu�au seuil du premier portail conduisant au Sanctuaire m�me, du premier de ces quatre portails qui repr�sentent, chacun, une des grandes Initiations. Ce seuil, nulle �me ne peut le franchir si elle ne s�est � tout jamais vou�e � l��ternel, et si elle n�a cess� de s�int�resser aux choses �ph�m�res qui l�entourent ici-bas. Car une fois franchi le seuil du Temple, jamais l��me n�en sortira. � travers ce premier portail des Enceintes Int�rieures qui conduisent au Saint des Saints, l��me passe pour n�en plus revenir. Elle a choisi sa part pour tous les si�cles futurs, elle a p�n�tr� au lieu d�o� nul ne sort quand une fois il y est entr�. C�est donc au sein du Temple m�me que se trouve la premi�re grande Initiation.. Mais l��me dont nous suivons la marche commence seulement � s�y pr�parer. Dans l�Enceinte Ext�rieure elle s�appr�te � gravir, pendant les vies qui vont suivre, les sept marches aboutissant au premier portail. Arriv�e l�, elle attendra qu�il lui soit permis de franchir le seuil du Temple m�me.
Quelle sera donc sa t�che dans l�Enceinte Ext�rieure ? Quel genre de vie faudra-t-il qu�elle m�ne pendant les existences qu�elle y passera, afin de se rendre digne de frapper � la porte du Temple ? Tel est le sujet qui nous attend ; pour vous l�exposez je ne m�nagerai pas mes efforts, duss�-je n�en trouver qu�un ou deux, parmi vous, capables d�en profiter r�ellement. Car je ne le sais que trop, � mes fr�res et mes soeurs, dans ma description de l�Enceinte Ext�rieure il se trouvera mainte chose dure et peu attrayante � votre go�t. Grande est d�j� la difficult� pour qui veut seulement trouver le chemin de cette enceinte, p�nible est l�effort qu�exige la pratique de la religion et des vertus qui permettent � l��me de frapper simplement � la porte de ce degr� ext�rieur, de cette Enceinte Ext�rieure entourant le temple; aussi ceux qui y p�n�trent ont-ils d�j� dans leur pass� accompli de grands progr�s. Il y en aura donc probablement, certainement m�me, parmi vous, pour qui le genre de vie qu�il me faudra d�crire n�aura gu�re d�attrait, car peu d�hommes ont reconnu le but et la raison d��tre de leur existence. Ceux-l� seuls, retenez-le bien, se trouvent dans l�Enceinte Ext�rieure, qui se sont consacr�s d�finitivement au service.� Ils ont tout donn�, sans demander en retour d�autre privil�ge que celui de servir, Ils ont reconnu nettement le caract�re transitoire des choses terrestres, et ont hardiment embrass� la t�che qu�ils veulent accomplir.� Ils ont tourn� le dos aux sentiers fleuris qui s�enlacent aux flancs de la montagne, et sont fermement d�cid�s � monter tout droit, quoi qu�il puisse leur en co�ter, quelque p�nible que puisse �tre la tension � subir dans les rapides existences qui vont se succ�der pour eux. Il y aura de l�effort, beaucoup d �effort dans l�Enceinte Ext�rieure, car c�est un lieu o� bien des choses seront � faire en peu de temps.
Les subdivisions �tablies dans mon sujet sont arbitraires, et ne forment pas des degr�s successifs dans la travers�e de l�Enceinte Ext�rieure. Toutes ces subdivisions doivent �tre envisag�es simultan�ment, et le travail dans chacune doit �tre continuel. C�est un entra�nement simultan�, et je ne l�ai subdivis� que pour la clart� de l�expos�. J�ai donn� � ces subdivisons les noms suivants : Purification, Entra�nement mental, Construction du caract�re, Alchimie Spirituelle �et Sur le seuil. Encore une fois, ces subdivisions du travail ne doivent pas �tre consid�r�es s�par�ment. Toutes ces choses doivent �tre entreprises en m�me temps, d�un effort longuement soutenu; et l��me parvenue dans l�Enceinte Ext�rieure s�attelle � la t�che pendant toute la dur�e de chacune des vies qu�elle y passe. Ce sont l� les devoirs qu�elle doit achever, du moins en partie, avant d�oser se pr�senter � la porte m�me du Temple. Si je prends ces devoirs un � un, c�est afin de les faire mieux comprendre. Je veux que vous compreniez en outre que l��me, pour atteindre le seuil de la Premi�re Initiation, n�a pas besoin d�avoir accompli totalement chacune de ces t�ches. Mais elle doit les avoir accomplies partiellement, elle doit �tre occup�e � y travailler avec succ�s, elle doit avoir compris l�l'oeuvre à r�aliser et s�y �tre consacr�e avec z�le. Lorsque l�oeuvre sera parfaite, l��me aura p�n�tr� dans le Saint des Saints.
������������La t�che qui s�impose � l ��me dans l�Enceinte Ext�rieure comprend donc avant tout la Purification, la purification de la nature inf�rieure jusqu�� la faire vibrer, dans toutes ses parties, en harmonie parfaite avec la nature sup�rieure. Il faut amener � l��tat de puret� tout ce qui appartient � la partie temporaire de l�homme, � ce que nous appelons la personnalit�, et � cet assemblage de qualit�s et de caract�ristiques d�pourvues d�individualit� permanente, et rassembl�es autour de lui par l�Individu v�ritable au cours de chacune de ses innombrables existences. (J�entends parler ici des qualit�s et attributs ext�rieurs qui entourent l��me, de tous ces v�tements dont elle se recouvre, et qu�elle conserve souvent avec elle d�une vie � l�autre; de tout ce qu�elle retrouve lorsqu�elle descend en incarnation, de tout ce que l�individualit� permanente rassemble autour d�elle pendant sa vie terrestre afin d�en extraire l�essence et de l�assimiler � son Identit� �ternellement progressive ).
����������� M. Sinnett se sert d�une phrase qui d�peint tr�s exactement la situation de l��me au moment o� nous l�envisageons ici, de l��me qui vient d�entrer d�lib�r�ment dans l�Enceinte Ext�rieure, et se rend compte du travail � accomplir. L��me, dit-il, � devient vassale du Soi Sup�rieur �, -- expression fort utile si on la comprend bien. Elle implique la d�cision nette du renoncement � tout ce qui est temporaire, � tout ce qui appartient au � moi � inf�rieur. Toutes les vies qui seront v�cues d�sormais en ce bas monde seront consacr�es exclusivement � rassembler les mat�riaux utiles, pour les transmettre � l�Ego Sup�rieur qui cro�t et se d�veloppe � l�aide de ce que l�inf�rieur rassemble. Le �moi� inf�rieur, comprenant son unit� essentielle avec cette Identit� plus haute qui domine, comprenant que sa seule raison d��tre, en ce monde, consiste � y venir comme l�instrument temporaire d�activit� destin� � rassembler ce dont le �Soi� permanent a besoin, - le � moi � inf�rieur, dis-je, d�cide que toute sa vie ici-bas sera consacr�e � ce service. Il con�oit que le but de sa vie est exclusivement de r�colter des mat�riaux qui seront rapport�s ensuite� au � Soi �, essence r�elle de son �tre, et qui contribueront � la croissance de l�Individualit� permanente, plus haute que la personnalit� d�une seule vie.
����������� � Devenir vassale du Soi Sup�rieur� signifie donc, pour le � moi � inf�rieur, reconna�tre l�obligation de servir son Ma�tre, vivre d�sormais non plus pour soi-m�me, mais pour le service de ce qui est �ternel. On voit par l� que la vie de l�homme dans l�Enceinte Ext�rieure, sera toute de loyal service, et que tout son travail sera consacr� � cette Identit� plus haute, reconnue comme �tant le � Soi � v�ritable qui persiste � travers les �ges, et dois s��panouir en une vie de plus en plus radieuse, gr�ce au d�vouement sinc�re et spontan� du messager qu�il envoie dans le monde ext�rieur.
����������� Dans cet ouvrage, je suppose d�j� accompli tout le travail que les grandes �critures su monde consid�rent comme pr�paratoire � la recherche effective de l��me. Vous vous souviendrez peut-�tre d�avoir lu, dans un des Upanishads, que l�homme d�sireux de trouver son �me doit avant toute chose � quitter les chemins de la perversit� �. Ceci, l��me que nous consid�rons l�a d�j� fait avant d�entrer dans l�Enceinte Ext�rieure. Car ceux qui y p�n�trent ont cess� d��tre expos�s aux tentations les plus communes de la vie terrestre; ils les ont d�pass�es. Aussi, lorsque arrive pour eux l�incarnation qui les verra entrer dans cette Enceinte,� ils se sont tout au moins d�tourn�s des � chemins de la perversit� �, et ont cess� d�y marcher avec plaisir. Si par hasard nous les trouvons sur de tels chemins, c�est par suite d�une chute impr�vue, imm�diatement r�par�e. Ils sont venus au monde� avec une conscience qui se refuse au mal lorsque l�occasion du bien se pr�sente d�abord.. Et bien que cette conscience, dont l�exp�rience n�est pas encore parfaite, puisse s��tre tromp�e parfois dans son choix avant de p�n�trer dans l�Enceinte Ext�rieure et m�me apr�s y �tre entr�e, elle est n�anmoins ardemment d�sireuse de choisir le bien en toute occasion. Le � moi � inf�rieur n�est plus capable d�enfreindre d�lib�r�ment ses ordres, car quiconque agit ainsi n�est jamais entr� dans cette Enceinte et est encore bien loin d�y parvenir. Les �mes qui y sont admises ont tout au moins choisi de s�efforcer vers le bien, elles sont d�sireuses d�ob�ir � cette voix qui leur en dicte l�accomplissement, et ne lui d�sob�iront pas consciemment. Elle viendront donc au monde ayant d�j� franchi toute cette partie de la longue c�te, et anim�es d�une volont� sinc�re de r�aliser le bien le plus �lev� qu�elles pourront concevoir.
����������� L��me aura d�sormais � lutter contre des tentations plus subtiles, les tentations qui l�attendent dans l�Enceinte Ext�rieure. Ce ne sont pas les tentations grossi�res du monde, mais les tentations plus profondes, plus p�n�trantes, qui viennent assaillir l��me alors qu�elle doit passer si rapidement� � travers une succession de vies, alors qu�elle doit escalader si pr�cipitamment le flanc de la grande montagne.� Elle n�a plus le temps de louvoyer devant la tentation, de se b�tir lentement des vertus. D�s l�instant o� elle entre,� ne f�t-ce que dans cette simple Enceinte Ext�rieure du Temple, elle se voit forc�e d�avancer sans tr�ve ni repos, de gravir la c�te sans interruption.� Et l�,� elle est assaillie de tous c�t�s par des difficult�s intellectuelles et des tentations intellectuelles,� par l�ambition, par l�orgueil intellectuel, par la tentation d��tre fi�re de ce qu�elle� a pu rassembler et de tenir pour son propre compte toute les r�alisations accomplies.� Outre cet assaut redoutable de l�ambition, outre cet accaparement de l�orgueilleuse nature humaine qui voudrait tout� garder, qui voudrait b�tir un mur entre elle-m�me et ses inf�rieurs, l��me �prouvera le d�sir de savoir, de savoir pour son propre compte, de savoir, afin de poss�der et de tenir sa science plut�t contre le monde que pour lui. Cette sensation se dissimule sous le masque de l�amour de la science pour elle-m�me, de l�amour de la v�rit� pour elle-m�me; et souvent l��me d�couvre, � mesure que sa vue s��claircit et devient plus p�n�trante, que ce pr�tendu amour d�sint�ress� n�est au fond que le d�sir d��tre s�par�e de ses semblables, de poss�der ce qu�ils n�ont pas, et de jouir de biens qui ne leur sont pas donn�s en partage. La s�parativit� , l�orgueil de la s�parativit�, le d�sir d��tre � part, de cro�tre, d�apprendre et d�accomplir afin de poss�der, - voil� un des plus terribles dangers qui menacent l��me en sa croissance. C�est l� une des tentations qui l�attendent alors qu�elle a franchi la porte de l�Enceinte Ext�rieure. Car elle verra le savoir � sa port�e et sera d�sireuse de l�acqu�rir, elle verra le pouvoir � sa port�e et sera d�sireuse de le poss�der, et cela, non pas exclusivement pour l�amour du service, mais aussi en partie parce que ces attributs la rendront elle-m�me plus grande. L��me se sent donc pouss�e � b�tir un mur autour d�elle afin de conserver le b�n�fice des r�alisations accomplies.
����������� Mais bient�t l��me commence � comprendre que si elle veut achever un jour la travers�e de cette Enceinte Ext�rieure et atteindre le portail qui brille au-del�, elle doit de d�faire de toute cette ambition intellectuelle, de tout cet orgueil intellectuel, de tout ce d�sir d�acqu�rir la connaissance pour son propre compte, de toutes les choses, en un mot, qui la s�parent des autres �mes, ses soeurs. Elle commence d�s lors � purifier sa nature intellectuelle, � scruter les motifs qui la poussent � l�effort, les motifs qui la poussent � l�action. Elle commence � s�examiner scrupuleusement � la Lumi�re de la Vie Spirituelle qui brille au sein du Temple et illumine de ses rayons l�Enceinte Ext�rieure. Sous l�action de cette Lumi�re toutes les ombres paraissent s�obscurcir, et l��me s�aper�oit que les choses qui dans le monde inf�rieur semblent briller ne sont en r�alit� que des ombres et n�ont point en elles de vraie Lumi�re. Alors l��me comprend que la �nature du d�sir� qu�elle apporte avec elle, m�lang�e � sa nature intellectuelle, doit �tre purifi�e de toute souillure du � moi � personnel.. Elle commence r�solument cette oeuvre de purification, elle se met au travail d�lib�r�ment, consciencieusement, d�un effort soutenu, pour se purifier de tout ce qui cherche � prendre au profit du centre personnel, de tout ce qui la s�pare, en quelque mani�re que ce soit, de ceux d�en bas qui la suivent� comme de Ceux d�en Haut qui l�ont pr�c�d�e. Voici en effet ce que l��me apprend et c�est l� une des grandes le�ons de l�Enceinte� Ext�rieure : Si elle veut voir s�ouvrir un jour pour elle les portes qui la s�parent du Temple, il faut qu�elle renverse les murailles qui la s�parent de ses fr�res d�en bas. Alors seulement se dissiperont, comme spontan�ment absorb�s, les murs qui la s�parent de Ceux d�en Haut. Car ce portail qu�il faut franchir ne s�ouvrira, devant l�homme qui demande l�entr�e, que s�il brise les murailles de sa propre nature, et consent � partager avec tous le fruit de ses efforts.
����������� Il commence donc l�oeuvre de la purification des d�sirs, et prend en main son � moi � inf�rieur afin d�en effacer toute souillure de personnalit�. Comment se purifiera-t-il ? Il ne doit rien d�truire, car ce qu�il a rassembl� au cours de son p�lerinage, c�est de l�exp�rience, et l�exp�rience a �t� assimil�e en facult�s et transmu�e en puissance; et maintenant qu�il a besoin de toute sa puissance, il serait maladroit de la d�truire. Il doit donc se pr�senter avec toutes ses �nergies, et avec ses �nergies purifi�es, non impures. Mais pour les purifier, comment s�y prendre ? D�truire serait tellement plus facile. Supprimer quelques-unes de ces qualit�s qu�il poss�de serait pour sa patience une �preuve moins dure. Il lui semble qu�il aurait plaisir � les frapper, � les annihiler afin d�en �tre quitte une fois pour toutes.
����������� Mais ce n�est pas ainsi qu�on peut entrer au Temple. Il faut y apporter comme offrande initiale tout ce qui a �t� rassembl� dans le pass�, tout ce qui a �t� transform� en puissance et en facult�; c�est l� le sacrifice qui doit �tre offert au seuil m�me de l�Initiation. Impossible d�y entrer les mains vides. L�aspirant doit apporter, intacte, toute la moisson r�colt�e dans sa vie inf�rieure. La destruction n��tant pas permise, reste � entreprendre la t�che plus ardue de la purification, conserver l�essence de toutes les qualit�s, et en m�me temps �liminer tout ce qu�elles ont de personnel.� Toutes les le�ons qu�ont enseign�es� � l�homme la vertu et le vice constituent la somme d�exp�rience cueillie dans le pass� de son p�lerinage. Il conservera l�essence de chaque qualit�, car c�est l� le fruit de toute son ascension, mais il la pr�sentera � l�autel semblable � un or pur� o� nulle gangue ne se m�le.
����������� Consid�rons s�par�ment une ou deux de ces qualit�s afin de voir clairement ce qu�il faut entendre par la purification. La m�thode une fois comprise dans son application � une ou deux qualit�s distinctes, vous pourrez � loisir, en y r�fl�chissant, d�terminer son application aux autres cas. Et c�est une le�on importante entre toutes, que d�apprendre cette m�thode de la purification.
����������� Laissez-moi vous parler d�abord d�une force puissante qui existe en tout �tre humain. Elle s�est manifest�e dans les stades primitifs de notre croissance, elle nous a suivis dans notre �volution, et voici que le moment arrive o� elle doit subir la purification finale.� Cette force est, � son plus bas degr�, ce que nous appelons la col�re, l�indignation,� puissance �norme qui se d�veloppe chez l�homme, gr�ce � laquelle il fait sa trou�e dans le monde et surmonte parfois toutes les difficult�s, �nergie terrible de l��me, qui fait irruption � travers la nature inf�rieure et se fraye un chemin en brisant tous les obstacles. La col�re est une �nergie indisciplin�e et par suite destructive, dans les premiers stades de la croissance de l�homme, alors qu�il n�a pas encore appris � la ma�triser et � la guider.� Elle est une force terrible, mais par le fait m�me qu�elle est une force il faut reconna�tre sa valeur, quelque destructive que son op�ration puisse �tre dans le monde inf�rieur.
����������� Avant de p�n�trer dans l�Enceinte Ext�rieure, l�homme a grandement modifi� cette �nergie de son �me. Il l�a transform�e en vertu, en une vertu tr�s r�elle, qu�il a d�j� longtemps cultiv�e dans le monde ext�rieur. Depuis sa transformation en vertu, elle se nomme noble indignation, r�volte contre l�injustice, haine de tout ce qui est mal, de tout ce qui est bas, vil, cruel. Et sous ces multiples formes d��nergie destructive elle a noblement servi son ma�tre dans le monde. Car, avant d�entrer encore dans l�Enceinte Ext�rieure, cet homme a travaill� pour le monde, il a pratiqu� cette vertu. En ce temps-l�, la cruaut� envers les faibles faisait �clater la col�re, l�injustice d�un tyran soulevait son indignation.. En pratiquant cette vertu, il a purifi� la force d�une grande partie de sa gangue; car, dans ses exp�riences toutes primitives, sa col�re �tait de la col�re pour lui-m�me. Il s'irritait lorsqu'on lui faisait du tort à lui-même, il ripostait lorsqu�on le frappait lui-m�me. Mais voici d�j� longtemps qu�il a vaincu cette simple col�re brutale de la nature inf�rieure qui se d�fend par sa force destructive, qui rend le mal pour le mal et la haine pour la haine. Bien avant d�entrer dans l�Enceinte Ext�rieure il a d�pass� ce stade primitif, et a appris � transformer jusqu�� un certain point cette force de col�re. Il l�a purifi�e dans une large mesure de l��l�ment personnel,� il a pris l�habitude de s�irriter plut�t pour des torts inflig�s aux autres que pour les torts subis par lui-m�me, de s�indigner bien moins de ses propres malheurs que de ceux d�autrui. Lorsqu�il voyait un �tre cruel fouler aux pieds� une cr�ature impuissante, il s��lan�ait au secours du faible, il frappait l�oppresseur et l��cartait violemment. C�est ainsi qu�il s�est servi de la col�re plus �lev�e pour vaincre la col�re plus basse, c�est ainsi qu�il s�est servi d�une passion plus noble pour tuer la passion plus brutale de sa vie inf�rieure. Dans ces existences d�un pass� d�j� lointain, l�homme a donc appris � �liminer de sa col�re les �l�ments grossiers, au point de ne plus s�irriter pour lui-m�me,� mais seulement pour ceux qu�ils d�sirait aider. Car l��me que nous consid�rons, souvenez-vous en, a d�j� longtemps reconnu le service comme un devoir, et l�une des formes de son service a �t� d�abattre les oppresseurs, de chasser ceux qui infligeaient la souffrance. Sa col�re ardente s�est �lev�e contre toutes les formes du mal, il a travaill� pour les faibles, et a peut-�tre fait oeuvre de h�ros dans le monde.
����������� Mais dans l�atmosph�re plus calme de l�Enceinte du Temple, illumin�e par la Lumi�re d�absolue compassion qui rayonne du Saint des Saints, la col�re, m�me purifi�e de toute antagonisme personnel, ne peut trouver de place. Car l�aspirant doit maintenant apprendre que ceux qui font le mal sont, eux aussi, ses fr�res, et qu�ils souffrent plus profond�ment en cons�quence de leurs propres m�faits que ceux-l� m�me � qui les souffrances sont inflig�es. Il doit apprendre que cette noble indignation, cette passion contre le mal, cette ardeur destructive contre une tyrannie n�atteignant que les autres, ne sont plus les caract�ristiques de l��me qui s�efforce vers l��tre divin.� Car la Vie Divine aime tous les enfants qu�Elle envoie dans le monde, quelque position qu�ils occupent, quelque inf�rieur que puisse �tre leur degr� d��volution. Nulle chose ne peut �tre en dehors de l�Amour Divin qui a engendr� toutes choses. La Vie Divine est le centre m�me de tout ce qui existe, et Dieu est �galement pr�sent dans le coeur du malfaiteur et dans le coeur du saint. Dans l�Enceinte Ext�rieure le Divin doit �tre reconnu, quelque �pais que soient les nuages qui le couvrent encore, car il faut que les yeux de l�Esprit soient ouverts, et qu�aucun voile ne les s�pare plus du � Soi � des autres.� Voil� pourquoi cette noble indignation doit �tre purifi�e jusqu�� ne plus contenir rien qui soit col�re, transform�e en une force auxiliatrice secourable envers toute chose et n�excluant rien. Cette grande �nergie de l��me doit devenir absolument pure, elle doit travailler pour le bien du tyran comme de l�esclave, elle doit embrasser dans les limite de sa compassion l�oppresseur en m�me temps que l�opprim�. Les Sauveurs de l�Humanit� ne choisissent pas ceux qui Leur pla�t de servir. Leur service n�admet aucune distinction. Ceux qui sont les serviteurs de tous n�ont de haine pour aucun �tre dans l�univers entier. Ce qui �tait autrefois col�re, devient, par la purification, protection pour le faible, opposition impersonnelle envers la perversit� profonde, justice parfaite envers tous.
����������� Ce que l�homme fait pour la col�re, il doit l�accomplir aussi pour l�amour. L�amour s�est manifest� pour la premi�re fois, au d�but de la croissance humaine, sous son aspect le plus bas et le plus mesquin. Il a pu rev�tir des formes impures et viles, telle le d�sir qui se porte aveugl�ment vers un autre �tre, et qui, dans sa soif d�assouvissement, ne s�inqui�te m�me pas de ce qui peut advenir de l��tre ainsi � aim� �. Avec la croissance de l��me, l�amour a chang� de caract�re, il est devenu plus noble, moins �go�ste, moins personnel, jusqu�� s�attacher, chez l��tre aim�, aux �l�ments sup�rieurs de la nature humaine et non � l�enveloppe ext�rieure. L�amour primitivement sensuel s�est donc moralis� et purifi�. Mais dans l�Enceinte Ext�rieure du Temple, il doit devenir plus pur encore. Il faut que le candidat apporte avec lui l�amour d�barrass� de son caract�re exclusif, l�amour dont la flamme br�le sans cesse plus ardente, et qui r�pand en m�me temps sa chaleur de plus en plus loin, l�amour, en un mot, purifi� de tout ce qui a rapport � la nature inf�rieure. Un tel amour, en se portant vers les autres, cherchera toujours � les servir, et non � se servir soi-m�me; il se demandera combien il peut donner, et ne s�inqui�tera pas de ce qu�il peut recevoir. Cet amour-l� sera en voie de devenir divin en son essence, car il se prodiguera selon la mesure du besoin et non selon la richesse du retour.
����������� Pendant que l��me s�efforce ainsi vers la purification, en travaillant de toute son �nergie au service de l�humanit�, elle devra se soumettre elle-m�me � un contr�le de tous les instants. L�impersonnalit� sera � l��p�e Ithuriel� [ �p�e magique dont le contact dissipait l�illusion, et obligeait toute chose � se montrer sous sa forme v�ritable ] � la pierre de touche qu�elle appliquera � tous ses actes; et elle observera impartialement ce qui surgit au contact de l�Ép�e magique. Lorsqu�elle rend un service, lorsqu�elle accomplit une action qu�elle juge bonne pour l�humanit�, elle doit scruter attentivement l�acte et le motif, afin de savoir si le poison subtil du � moi � ne se m�lange pas � la force d�pens�e. Si l��me d�couvre alors qu�elle cherche moins le succ�s de l�oeuvre que le succ�s de l�ouvrier; si, voyant r�ussir aux mains d�un autre une entreprise qu�elle-m�me n�a pu mener � bien, une certaine amertume se m�le � sa joie de voir l�oeuvre accomplie; - alors elle sait que sa personnalit� subsiste encore, car si elle �tait ce qu�elle devrait �tre, elle ne s�inqui�terait que du triomphe du service, et n�aurait cure d�y avoir elle-m�me contribu�. Et si elle d�couvre qu�un �chec personnel fait na�tre en elle une pointe de d�ception, si du manque de succ�s de son �nergie �mise il lui revient une certaine d�pression, un certain d�couragement, un � je ne sais quoi � qui trouble un instant sa paix et sa s�r�nit�, alors elle se rend compte que cette amertume et ce trouble� r�v�lent un �l�ment de sa personnalit� qui demande � �tre d�truit, et elle se met r�solument � l�oeuvre pour �liminer cette faiblesse, pour dissiper ce nuage qui obscurcit encore sa vue. Si d�autre part, analysant et mettant � l��preuve son amour, l��me trouve qu�il y a l� aussi un sentiment de froid, une pointe de d�ception lorsque l��tre aim� reste indiff�rent � ce qu�il re�oit, bien qu�il est �t� noblement servi et profond�ment aim�; si le rayonnement d�amour tend � se replier sur lui-m�me, � arr�ter son cours parce que les �tres aim�s n�aiment pas en retour, alors encore cette �me � aussi dure envers elle-m�me qu�elle est compatissante envers toutes les autres � comprend qu�en cela aussi l�ar�me subtil de la personnalit� subsiste, qu�elle travaille encore en partie pour elle-m�me au lieu de trouver sa plus haute joie dans la simple gloire de l�effusion. Cette �me qui traverse l�Enceinte Ext�rieure du Temple se remet alors � l�oeuvre pour se purifier de ce restant de personnalit� jusqu�au jour o� son amour rayonne sans jamais se demander s�il recevra en retour, sans jamais attendre pour voir si une r�ponse lui sera donn�e. Car elle sait qu�en v�rit� le plus grand besoin d�amour existe l� o� il n�y a point d�amour � rendre, et que les �mes qui ont le plus de droit � la charit� sont celles qui ne peuvent rien donner encore � l�amour qui les aide.
����������� Ainsi l��me travaille r�solument � sa croissance, elle s��labore elle-m�me avec fermet�, purifiant sans cesse sa nature inf�rieure par un effort continuel et une exigence insatiable. Car toujours elle se compare, non pas aux petits qui sont au-dessous d�elle, mais aux Grands �tres qui sont au-dessus; toujours elle l�ve les yeux vers Ceux-l� qui ont achev� la t�che, au lieu de les baisser sur la foule qui monte encore vers l�Enceinte Ext�rieure. Elle ne s�accorde pas un instant de repos, elle ne peut trouver le moindre contentement, jusqu�au jour o� elle voit le but approcher � grands pas, jusqu�au jour o� elle sent en elle-m�me un moins grand obstacle au passage de la Lumi�re des Saints �tres qui sont devenus divins.
����������� Dans cette Enceinte Ext�rieure, l�homme est tent� par ses vertus, non par ses vices. Des tentations subtiles viennent assaillir sa nature et lui apparaissent comme des anges de lumi�re. Constamment elles sont tent�es, ces �mes qui montent, par ce qu�il y a en elles de plus grand, de plus noble. L�ennemi s�empare de leurs vertus, et profite de leur ignorance pour les transformer en tentations. Car ces �mes l� ont d�pass� le point o� le vice peut les atteindre ou les tenter, et ce n�est qu�en s�affublant du masque de la vertu que l�illusion peut esp�rer les d�tourner encore du chemin. Voil� pourquoi elles apprennent � �tre si dures envers elles-m�mes, voil� pourquoi elles se harc�lent d�incessantes exigences. Elles ne savent que trop bien, par leurs propres chutes et celles de leurs compagnes, que les vertus les plus difficiles � atteindre dans le monde deviennent d�une pratique ais�e dans l�Enceinte Ext�rieure, et que ces vertus sont alors, en quelque sorte, d�rob�es par l�ennemi, et transform�es� en tentations pour faire tr�bucher le n�ophyte sur le sentier ardu. Voil� comment ces �mes apprennent que l�unique moyen de salut pour elles consiste � vivre toujours � la Lumi�re du Soi Sup�rieur; voil� comment se forme en elles la conviction que jamais elles n�oseront se pr�senter� � la Porte du Temple, tant que cette Lumi�re de brillera pas , radieuse,� dans leur coeur C�est pourquoi, jour et nuit, elles travaillent � se rendre absolument diaphanes. Comment oseront-elles, en effet, p�n�trer dans une Lumi�re aux rayons de laquelle tout ce qui para�t lumineux ici-bas n�est qu�ombre; comment oseront-elles p�n�trer dans une lumi�re si �blouissante que nul oeil impur ne peut� la contempler, dans une lumi�re qui r�v�le l�imperfection de tout ce que nous appelons vertu, la laideur et la platitude de tout ce que nous nommons beaut�; comment oseront-elles, en un mot, p�n�trer dans le Temple o� le regard du Ma�tre se posera sur elles, et o� elles se tiendront l��me nue en Sa pr�sence; comment oseront-elles rester en un tel lieu s�il subsiste en leur coeur une seule tache d�imperfection, si le Ma�tre, en sondant leur coeur, y doit trouver une seule souillure qui puisse offenser la puret� de son regard ?
����������� C�est pourquoi dans cette Enceinte Ext�rieure les �preuves que le monde juge p�nibles se transforment en joies, et la souffrance qui purifie est accueillie � bras ouverts comme une amie. C�est pourquoi le mod�le de tous les Yogis, Celui qu�on nomme le Grand Yogi, le Ma�tre et la Patron de tous, se tient toujours debout au milieu du b�cher fun�raire, envelopp� de flammes ardentes qui consument tout ce qui s�expose � leur contact. Car dans les coeurs de ceux qui traversent l�Enceinte Ext�rieure, il reste encore des replis cach�s o� la Lumi�re n�a point p�n�tr�, et leur purification finale, avant l�entr�e au Temple, vient de ces flammes vivantes du Seigneur Lui-m�me. Ces flammes consument tout le mal qui se cache , invisible, dans les chambres secr�tes du coeur de celui qui va devenir un disciple, de celui qui s�est donn� � son Seigneur et ne retient rien pour lui-m�me. De ce b�cher imposant, dress�e � l�entr�e du Temple, sortent les flammes ardentes que doit traverser tout homme avant que la Porte ne s�ouvre pour lui. C�est au travers des flammes et en elles, qu�appara�t la figure du Grand Yogi de qui ces flammes proc�dent, empruntant � Sa glorieuse Pr�sence leur vertu purificatrice. C�est de Lui, le Supr�me Gourou, que vient pour le disciple la purification finale. Puis l��me franchit la Porte qui la s�pare � jamais de tous les int�r�ts du monde inf�rieur, sauf celui du service, qui la s�pare � jamais de tout d�sir humain, sauf en tant qu�elle travaille � la R�demption de l�Humanit�. Il ne reste plus rien sur terre qui puisse l�attirer, car elle a vu la Face de son Dieu, et devant une telle Splendeur tout autre lumi�re s�efface.
����������� Dans cette deuxi�me partie de mon sujet, vous constaterez peut-�tre une diff�rence plus marqu�e que partout ailleurs, entre la mani�re de voir d�un homme du monde r�fl�chi, bien �quilibr�, vertueux, et celle que l�occultiste adopte. Il faudra que je vous conduise pas � pas depuis le commencement, afin de vous montrer comment se produit ce changement� de point de vue. Car c�est surtout � l��gard de l�intelligence, de la place qu�elle occupe dans l��tre humain, du r�le qu�elle joue dans le d�veloppement de la nature humaine, des fonctions qu�elle remplit et de la mani�re dont elle les remplit; - c�est, dis-je, � l��gard de ces questions-l� surtout que les plus grandes divergences de vues surgissent selon la position que le penseur occupe, selon l�id�e qu�il se fait du� monde en g�n�ral et du r�le qu�il est appel� � jouer. Afin de mettre les choses au point, cherchons un moment � voir comment un homme bon, juste et intelligent, un homme qui n�est, certes, ni insouciant, ni frivole, ni mondain au sens ordinaire du mot � cherchons � voir comment un tel homme, au jugement sain, � l�intelligence �quilibr�e, envisagera cette question de l�empire sur son �tre mental.
����������� Un homme bon, r�solument attach� � un id�al de vertu qu�il s�efforce de r�aliser, � un id�al de devoir qu�il s�efforce d�accomplir, un tel homme, en formulant son id�al, en m�ditant sur sa conception du devoir, reconna�tra que� � la nature inf�rieure � doit �tre ma�tris�e; et il cherchera � lui imposer l�ob�issance � la � nature sup�rieure �. Pas le moindre doute � cet �gard. Les passions et les app�tits du corps, les �motions qui vous entra�nent pr�cipitamment sans r�flexion ni pens�e, tout ce c�t� de la nature humaine qui subit les influences ext�rieures et se manifeste par des actes inconscients et irr�fl�chis, sera certainement consid�r� par notre homme vertueux comme devant �tre domin� et dirig�. En langage ordinaire, le terme � ma�tre de soi � d�signe donc un homme qui exerce sur sa nature inf�rieure le contr�le mental dont il vient d��tre question, en sorte que, chez lui, les d�sirs sont domin�s par l�intelligence.
����������� Observons une personne dou�e de ce qu�on est convenu d�appeler une volont� forte, un caract�re bien form�; caract�re qui agit suivant une ligne de conduite bien d�termin�e, volont� qui, dans des circonstances tr�s difficiles, parvient n�anmoins � guider la nature dont elle fait partie suivant une route nettement trac�e. Nous trouverons invariablement chez une telle personne un d�veloppement mental consid�rable, en sorte que son action n�est d�termin�e ni par les circonstances ext�rieures, ni par les attractions diverses qui peuvent l�entourer, ou par la r�ponse de sa nature animale � ces attractions, mais par tout un fonds� d�exp�riences accumul�es dans ce que nous appelons sa m�moire, et comprenant le souvenir d��v�nements pass�s et la comparaison des cons�quences dont ces �v�nements ont �t� suivis. L�intelligence a �labor� toute ces exp�riences, elle les a en quelque sorte class�es et compar�es, puis elle en a tir� une conclusion d�termin�e, par un effort intellectuel et logique. Ce r�sultat est conserv� par l�intelligence comme r�gle de conduite, et lorsque l�homme se trouve ensuite dans des circonstances troublantes, qui triompheraient d�une volont� faible et feraient d�vier de la voie une personne ordinaire, son intelligence plus forte et mieux d�velopp�e se guide sur cette r�gle de conduite formul�e dans un moment de calme, � l�abri de la tentation, et ne se laisse pas d�tourner par l�attrait ou l�impulsion du moment. Dans vos rapports avec une telle personne, vous pouvez souvent pr�voir d�avance ce qu�elle fera. Vous connaissez l�orientation dominante de sa pens�e; et vous �tes � peu pr�s certains que ce caract�re bien form�, puissant et r�solu, r�alisera au moment de la lutte, malgr� toutes les tentations ext�rieures, l�id�al qu�il a con�u au temps du calme et de la r�flexion.
����������� Voil� ce que nous entendons, en g�n�ral, par l�homme � ma�tre de soi �. C�est un homme parvenu dans son d�veloppement au point d�j� �lev� que nous venons de d�crire, un homme qui s�est d�lib�r�ment mis � l�oeuvre pour conqu�rir, r�fr�ner et diriger sa nature inf�rieure en sorte que, l�excitation ext�rieure �tant� � son comble, l��me puisse rester ferme sous l�assaut de la tentation. Cet homme-l� agira noblement, quelles que soient les s�ductions qui l�incitent � agir bassement ou � c�der aux impulsions de sa nature inf�rieure.
����������� Le type d�homme que nous avons consid�r� jusqu�� pr�sent peut, � bon droit, �tre appel� vertueux. C�est un homme au caract�re �lev�, � la pens�e nette, au jugement sain, qui n�est pas pouss� de c�t� et d�autre � la merci des circonstances comme le sont les natures d�r�gl�es ou mal r�gl�es. Mais il existe un stade plus �lev� auquel cet homme peut parvenir. Il peut subir l�influence d�une vaste philosophie de l�existence, qui lui explique d�une mani�re plus compl�te le fonctionnement de l�intelligence humaine. Il peut entrer en rapport, par exemple, avec les enseignements sublimes de la Th�osophie, qu�il les trouve expos�s dans des livres anciens ou r�cents, qu�il les obtienne de l�Inde, de l��gypte, de la Gr�ce ou de l�Europe moderne. Une telle philosophie pourra lui fournir une conception nouvelle de l�univers et modifier profond�ment sa mani�re de voir.
����������� Supposez qu�un tel homme entre dans la Soci�t� Th�osophique et qu�il en accepte les enseignements principaux. Il commencera d�s lors � se rendre compte de l�influence �norme de ses pens�es bien plus nettement qu�avant d��tre entr� dans ce courant d��tudes. Il commencera � comprendre que son intelligence, lorsqu�elle est active, exerce cette puissance cr�atrice que la plupart d�entre vous connaissent d�j�. Il saura que sa pens�e cr�e des existences, des entit�s d�termin�es, et que ce pouvoir cr�ateur peuple � tout instant l�espace ambiant d��tres actifs qui travaillent pour le bien ou pour le mal, et agissent fr�quemment sur la pens�e et sur la vie des gens avec qui leur cr�ateur n�a jamais eu de rapports personnels. Il commencera � comprendre que, pour affecter l�esprit de ses semblables, sa pens�e n�a nul besoin d��tre exprim�e en paroles prof�r�es ou �crites. Elle n�a m�me pas besoin de s�exprimer par l�action, par exemple, pour exercer une influence puissance, en bien ou en mal. Il peut n��tre qu�un homme extr�mement obscur au sens o� le monde entend l�obscurit�, il peut �tre enti�rement cach� aux yeux de ses semblables, il peut n�influencer directement qu�un� cercle excessivement restreint de parents et d�amis qui sont en rapport direct avec lui� Et cependant il se sent possesseur d�une puissance qui surpasse en m�me temps celle de la parole; il sait qu�il peut, lui, inconnu, isol� en tout ce qui concerne le monde physique, exercer une action puissante pour le bien ou pour le mal, qu�il peut �tre occup� � purifier les �mes de sa g�n�ration ou � les souiller, qu�il peut contribuer au progr�s du monde ou lui faire obstacle, qu�il peut �tre employ� � �lever sa race ou � l�abaisser, qu�il peut, en un mot, ind�pendamment de la force de l�exemple et de la force du pr�cepte, seuls moyens connus des hommes ordinaires, influencer l�esprit de son �poque par ces �nergies subtiles de la pens�e, par ces formes agissantes qui se r�pandent � travers le monde des hommes, produisant des effets d�autant plus certains qu�elles travaillent sans �tre vues, exer�ant une influence d�autant plus �tendue, que leur subtilit� les rend imperceptibles aux foules qu�elles affectent.
����������� Ainsi donc, � mesure que l�homme acquiert des connaissances plus �tendues, sa pens�e rev�t pour lui un aspect nouveau. Il commence � comprendre la responsabilit� immense que le simple exercice de ses facult�s mentales fait peser sur ses �paules. Il comprend que cette responsabilit� s��tend bien au-del� de son horizon visuel, et qu�il participe souvent d�une mani�re tr�s r�elle aux crimes qui d�shonorent la soci�t� dans laquelle il vit, comme aux actes d�h�ro�sme qui l�exaltent. Il saisit enfin ce grand principe que la responsabilit� pleine et enti�re d�un acte n�incombe pas toujours � celui qui en est l�auteur, mais qu�au contraire tout acte est la manifestation d�une id�e, son incarnation v�ritable, et que quiconque prend part � la g�n�ration des id�es participe � la responsabilit� des actes qui en d�coulent.
����������� Muni de cette compr�hension nouvelle et de ce sens plus large de la vie, l�homme commence � surveiller attentivement son activit� mentale. Il commence � concevoir qu�il doit gouverner sa pens�e; et en ceci il se d�gage nettement de la mani�re de voir qu�adoptait tout � l�heure notre homme du monde. Mais ce n�est pas tout. Poussant plus loin son �tude, l�homme que nous observons s�aper�oit bient�t que la nature des pens�es qu�il attire � lui du monde ext�rieur est d�termin�e dans une large mesure par la nature des pens�es qu�il engendre lui-m�me. En sorte qu�il joue le r�le d�un aimant, non seulement parce qu�il rayonne des lignes de force-pens�e sur toute l�aire de son champ magn�tique, mais encore parce qu�il attire � lui les substances qui r�pondent � la force magn�tique �mise. Les pens�es bonnes ou viles qui afflueront en son intelligence d�pendront en grande partie de l�orientation imprim�e � sa propre force mentale. Il commence dont � comprendre qu�en engendrant une bonne pens�e, non seulement il s�acquitte d�un devoir supr�me envers ses semblables, mais qu�il profite lui-m�me de ce qu�il donne.
����������� C�est l� ce qui arrive toujours lorsque l�homme travaille en harmonie avec la Loi Divine. Chaque fois qu�il donne au monde une noble pens�e, il d�termine en lui-m�me un centre d�attraction vers lequel d�autres pens�es nobles convergent spontan�ment attir�es en quelque sorte par une affinit� magn�tique. Sa propre intelligence est aid�e et fortifi�e par ces pens�es venues du dehors. Mais � mesure qu�il r�fl�chit, l�homme doit reconna�tre aussi, avec honte et douleur, qu�en �mettant dans le monde une pens�e impure il cr�e en sa conscience un centre analogue, qui attire de l�ambiance les pens�es viles et accentue en lui la tendance au mal, comme l�exp�rience contraire accentuait la tendance au bien.
����������� � mesure qu�il apprend � comprendre cette fraternit� mentale qui relie tous les hommes entre eux, notre penseur modifie profond�ment son attitude mentale. Il sent de plus en plus vivement sa responsabilit�, il reconna�t des liens de r�action mutuelle qui rayonnent en tous sens de lui-m�me vers les autres �tres et convergent d�eux vers lui. Et, dans sa vie de chaque jour, il commence� � se pr�occuper de la pens�e plut�t que de l�action; il comprend que c�est dans cette r�gion mentale du monde invisible que sont d�abord g�n�r�es toutes les forces, qui se manifestent ensuite dans la vie psychique et physique
Parvenu dans l�Enceinte Ext�rieure, cet homme fera un pas de plus. Ainsi que nous l�avons vu, il gravit maintenant le sentier plus court et plus ardu qui conduit � la cime du mont, il est entr� dans la p�riode d��preuves pr�paratoires � l�Initiation. Il ne lui suffit plus, comme tout � l�heure, de comprendre sa responsabilit� vis-�-vis ses semblables. Le seuil de l�Enceinte Ext�rieure une fois franchi, l�homme reconna�t qu�il y a derri�re sa mentalit� un principe plus �lev�, jouant vis-�-vis d�elle le r�le qu�elle-m�me jouait vis-�-vis de la nature inf�rieure. Apr�s avoir, au cours de sa croissance, reconnu la mentalit� comme sup�rieure aux d�sirs, l�homme, en franchissant le seuil de l�Enceinte Ext�rieure, et m�me avant de l�avoir franchi (car c�est l� en partie ce qui le conduit � l�entr�e de l�enceinte), reconna�t qu�il s�est tromp� en croyant � la supr�matie d�finitive de l�intellect. Hier encore il se ralliait � l�opinion de ce penseur qui proclame � qu�il n�y a de grand dans le monde que l�homme et qu�il n�y a de grand dans l�homme que l�intellect �. Mais aujourd�hui il reconna�t que c�est l� une illusion, qu�il voyait les choses d�en bas et que sa vision �tait obscurcie. Ses yeux se dessillent, et il voit qu�il y a dans l�univers quelque chose de plus grand que cette mentalit� qu�il prenait pour le sommet de l��chelle humaine, quelque chose de plus vaste, de plus sublime, qui brille un instant en lui, puis se voile et semble dispara�tre. L�homme reconna�t, d�une mani�re bien imparfaite, encore non par constatation directe, mais gr�ce � ce qu�il a pu apprendre du dehors, qu�il a eu une vision fugitive de l��me, qu�en son intellect a p�n�tr� un rayon de Lumi�re issue d�une r�gion plus haute, Lumi�re qui lui donne en m�me temps une impression �trange d�identit�, comme si elle �tait en quelque sorte l�essence m�me de son intelligence. En sorte qu�il y aura d�abord de la confusion, il y aura comme un t�tonnement dans les t�n�bres entre l�intellect d�une part, et de l�autre ce � je ne sais quoi � dont l�homme pressent la myst�rieuse identit� avec lui-m�me, bien qu�il ait cru jusqu�ici que lui-m�me, c��tait l�intellect. Ce facteur nouveau lui semble donc �tre en m�me temps lui-m�me et plus grand que lui-m�me; et l�homme ignore tout d�abord d�o� lui vient cette lueur, il ne sait si l�espoir qu�elle a fait na�tre en lui est un r�ve ou une r�alit�.
����������� Avant de pouvoir �lucider clairement la question, il faudra pr�ciser ce que nous entendons par les termes � intellect � et � �me �. Ces mots ne doivent pas �tre pour nous de simples fiches, des jetons sans valeur r�elle. Ils doivent �tre comme des pi�ces de monnaie v�ritable repr�sentant une certaine richesse mentale, un certain stock d�id�e que nous poss�dons. Consid�rons donc un instant ces termes et voyons ce qu�ils signifient, ou plut�t dans quel sans je les emploierai ici. Ainsi mes explications seront claires, que vous soyez, ou non, d�accord avec ma d�finition des termes.
����������� Je d�finis l��me comme le principe qui individualise l�Esprit Universel, qui concentre en un foyer unique la Lumi�re Universelle. L��me peut �tre compar�e, si l�on veut, � un r�ceptacle o� l�Esprit, se d�verse, apparaissant d�s lors comme s�par� en manifestation, bien qu�il reste toujours universel et identique en Son essence.
����������� Cette s�paration est produite afin qu�une individualit� puisse na�tre et se d�velopper, et que cette vie individualis�e puisse acqu�rir le pouvoir et le savoir� sur tous les plans de l�Univers dans le monde physique et psychique comme dans le monde spirituel, sans aucune solution de continuit� dans son �tat conscient; afin qu�elle puisse se fabriquer les v�hicules dont elle a besoin pour acqu�rir la conscience sur les plans autres que le sien, et qu�elle puisse purifier graduellement ces v�hicules l�un apr�s l�autre jusqu�� ce qu�ils n�agissent plus comme des voiles opaques ou des entraves, mais comme des milieux de transmission purs et transparents, � travers lesquels toute connaissance sur chaque plan puisse �tre obtenue.
Mais en employant le terme � r�ceptacle � et l�image que ce terme sugg�re, je cours le risque de vous induire en erreur. La m�me difficult� se pr�sente avec toutes les expressions adapt�es au m�canisme mental, l�image vraie en un certain sens est toujours fausse en un autre sens. Car ce processus d�individualisation de l�Esprit ne ressemble en rien � la construction d�un vase dont la forme d�termine imm�diatement celle de la substance qu�on y verse. Le ph�nom�ne qui se passe r�ellement est plut�t analogue � la formation de quelque grand organisme cosmique, d�un syst�me solaire, par exemple. Remontant en imagination � travers la nuit des temps, vous pouvez vous figurer l�espace o� nulle chose n�est visible. Cet espace qui semble vide contient en r�alit� toute pl�nitude, mais une pl�nitude invisible � l�oeil. Supposez que dans ce vide apparent se forme un brouillard l�ger, presque trop subtil pour m�riter ce nom, commencement d�agr�gation qu�il n�est cependant gu�re possible de repr�senter par un terme plus exact. Puis, � mesure que vous observez, le brouillard s��paissit, sa densit� s�accro�t sans cesse, et il se s�pare de plus en plus nettement de l�espace ambiant. Finalement, ce qui n��tait d�abord qu�une ombre imperceptible prend une forme de plus en plus nette; la n�buleuse se condense, et ses contours s�accentuent graduellement jusqu�� former un syst�me comprenant un soleil central, entour� de plan�tes.
����������� Quelque inad�quate que soit cette description, il semble que l�individualisation de l�Esprit se produise d�une mani�re analogue. C�est comme l�apparition d�une ombre l�g�re dans ce vide universel qui est en r�alit� la pl�nitude des pl�nitudes. Puis l�ombre devient brouillard, elle prend une forme de plus en plus perceptible, elle s�affirme de plus en plus nette, jusqu�� ce que nous trouvions une individualit�, une �me, l� o� n�existait au d�but qu�une ombre � peine visible. C�est ainsi qu�on peut repr�senter la formation d�une conscience individuelle. Si vous pouvez vous p�n�trer de cette id�e, vous comprendrez que l��me n�est pas compl�te d�s l�abord, qu�elle ne descend pas comme un plongeur dans l�oc�an de la mati�re, mais qu�elle se construit lentement, tr�s lentement, qu�elle se condense petit � petit, pour employer l�image de tout � l�heure, jusqu�� ce que, de l�Universel, elle soit devenue l�individuel. Et cette individualit� cro�t sans cesse � mesure que son �volution s�accomplit. Elle est l��me v�ritable qui persiste, comme nous le savons, de vie en vie � travers des �ges sans fin, � travers des si�cles sans nombre. Elle est l�Individualit� progressive, et sa conscience est la conscience accumul�e de tout ce qu�elle a laiss� derri�re elle au cours de sa croissance.
����������� Telle est donc l��me humaine, cette entit� qui devient aujourd�hui puissante chez plusieurs des fils de l�Homme. Elle a derri�re elle une longue histoire toujours pr�sente � cette conscience devenue si vaste au cours de la route des �ges, � cette conscience immense qui englobe en une seule vie la s�rie de ses existences et conna�t son pass� tout entier. Chaque fois que survient une naissance nouvelle, chaque fois qu�il faut se mettre en qu�te� d�un surcro�t d�exp�rience, cette �me qui n�a cess� de grandir depuis des �ges, immerge en des v�tements nouveaux une portion d�elle-m�me. Et cette portion de l��me qui se d�verse sur les plans inf�rieurs, instrument gr�ce auquel l��me pourra s�accro�tre encore par des connaissances nouvelles, cette portion ext�rioris�e de l��me est ce que nous appelons la mentalit� ou l�intellect humain. C�est la partie de l��me qui op�re dans le cerveau, limit�e, entrav�e par le cerveau, litt�ralement accabl�e sous le fardeau de la chair, ensevelie sous un voile d��paisse mati�re, � travers laquelle sa conscience peut � peine se faire jour. Cette grande chose, que nous appelons l�Intellect humain, n�est qu�un portion d��me qui s�efforce, qui peine dans le cerveau, afin d�aider � la croissance de l�Individualit� r�elle. � mesure qu�elle s�efforce, elle manifeste les puissances de l��me, car elle est l��me elle-m�me sous l��paisseur de la mati�re. Tout ce qu�elle peut manifester � travers le cerveau constitue l�intelligence de la personne telle que nous la connaissons ici-bas; parfois elle manifestera beaucoup, parfois peu, selon le degr� d��volution atteint.
����������� Bref, ce que l�homme con�oit une fois qu�il a p�n�tr� dans l�Enceinte Ext�rieure, c�est que son �tre v�ritable est cette �me dont nous venons de parler, et que son intelligence n�en est qu�une manifestation passag�re. Il commence d�s lors � comprendre que, si le corps et la nature du d�sir doivent �tre soumis � l�intelligence, fragment emprisonn� de l��me r�elle, l�intelligence, � son tour, doit �tre soumise � la grande �me dont elle n�est que la repr�sentation temporaire. L�intelligence est un instrument, un organe de l��me, sans autre raison d��tre que les services qu�il rend, un organe destin� � recueillir des exp�riences dans le monde ext�rieur, pour les rapporter ensuite � l��me, son essence v�ritable.
����������� Ces choses une fois comprises, quelle sera l�attitude de notre candidat ? � L�intelligence s�instruit. Entrant en contact avec le monde ext�rieur, elle rassemble des faits, elle les classes,� elle les compare, elle forme des jugements � leur sujet; en un mot, elle s�acquitte des fonctions qui lui sont propres. Le r�sultat de toute cette activit� est transmise � l�int�rieur, il remonte le long de cette expansion de l�Âme� jusqu�� l�Âme elle-m�me, il constitue la r�colte que l��me emporte avec elle en D�vakhan [D�vakhan d�signe l�existence c�leste qui succ�de � la phase purgatorielle (K�molaka) de la vie posthume. Nous renvoyons le lecteur � la Sagesse Antique, par Annie Besant, chapitre V , � Le D�vakhan � (N.D.T.)], afin de l��laborer� et de la transformer en sagesse. Car sagesse et savoir sont choses bien diff�rentes. Le savoir, c�est toute la masse des faits, avec les jugements form�s � leur sujet, les conclusions tir�es de ces jugements. La sagesse, c�est l�essence extraite du tout, le b�n�fice net que l�me a recueilli de toutes ces exp�riences; et, comme on le sait, c�est en D�vakhan que s�op�re cette transmutation de l�exp�rience en sagesse.
����������� Notre candidat, qui sait tout cela, comprendra que son � moi � r�el, c�est l�Âme, l�Âme qui achemin� � travers toutes ces vies pass�es et s�est construite elle-m�me au cours de son p�lerinage. Elle appara�t maintenant � l�homme comme �tant son id�al v�ritable, en attendant que sa vision gagne des profondeurs encore plus grande. Il comprend d�s lors pourquoi il est dit qu�au d�but m�me de la voie il faut que le candidat sache faire la distinction entre le �Soi� qui persiste et l�intelligence qui n�en est qu�une manifestation passag�re dans le monde de la mati�re, manifestation destin�e � servir les seuls int�r�ts de l��me.
����������� Le candidat peut maintenant comprendre l��trange r�ponse du Ma�tre� � qui le disciple demande l�instruction pour la premi�re fois.� Le disciple avide s��crie : � O Ma�tre, que dois-je faire pour acqu�rir la sagesse ? Que dois-je faire, � Sage, pour atteindre la perfection ? � - cherche les Sentiers, r�pond le Ma�tre. Mais, � disciple, aie le coeur pur avant de te mettre en route. Avant de faire ton premier pas, apprends � discerner le vrai du faux, le toujours changeant de l��ternellement durable [La Voix du Silence] . � Puis le Ma�tre poursuit. Il montre en quoi diff�rent la connaissance et la sagesse; il montre au disciple ce qu�est l�ignorance, ce qu�est la connaissance et ce qu�est la sagesse qui succ�de � toutes les deux. La distinction est ensuite �tablie entre l�intelligence� � semblable � un miroir, qui ramasse la poussi�re tout en refl�tant �, et le � Souffle de la Sagesse d��me �, qui doit purifier notre miroir � en chassant la poussi�re des illusions �.
����������� � ces paroles, s�il est sage, le candidat r�fl�chit. Qu�est-ce donc que cette diff�rence entre le r�el et l�illusoire, et pourquoi cette distinction est-elle li�e � la manifestation de l�intelligence ? Qu�est-ce donc que cette diff�rence entre le miroir qui refl�te, et l�Âme qui doit en chasser la poussi�re afin que cessent nos illusions ? Quel r�le nouveau fait-on jouer � cette intelligence qui nous semblait nagu�re un facteur si essentiel, que nous la tenions pour la personnification de l�homme lui-m�me ? Quelle est, en somme, sa fonction v�ritable, si le premier pas sur le Sentier consiste � discerner l�illusoire du r�el, et si l�intelligence se trouve li�e, par quelque rapport subtil, � la gen�se m�me de l�illusion ?
����������� D�autres paroles encore reviennent � l�esprit du disciple, paroles qu�il a entendues des m�mes Ma�tres de la Sagesse. Il se souvient d�un pr�cepte �trange qui parle du � Rajah des sens �, gouverneur et roi de la nature inf�rieure, mais point ami du disciple. Le m�me enseignement prescrit de chercher ce Rajah des sens afin de le bien comprendre, car c�est lui � le producteur des pens�es, qui �veille l�illusion �; et plus loin : � l�intellect est le grand meurtrier du R�el. Que le disciple tue le meurtrier [ Voix du Silence ]. �
����������� Il semble que nous soyons ici sur la piste de quelque pens�e capable d��clairer le disciple dans sa recherche du Rajah des sens. Ce Rajah, ou roi des sens, est le g�n�rateur de la pens�e; d�autre part, celui qui engendre la pens�e �veille en m�me temps l�Illusion et tue le R�el. Or, nous savons que, dans le monde spirituel, la R�alit� existe. A mesure que la diff�rentiation se poursuit, l�illusion prend naissance; et c�est l�intelligence, l�intelligence croissante, qui enfante continuellement des images, qui poss�de la facult� imaginative que nous appelons l�imagination, et la facult� du raisonnement qui construit en prenant pour base l�image a�rienne enfant�e par l�imagination. Voil� le vrai cr�ateur de l�illusion, l�intellect reconnu comme meurtrier du R�el d�s l�instant que l�homme devient disciple. Aussi sa premi�re t�che en tant que disciple, sera-t-elle de tuer ce meurtrier. Car, s�il ne peut s�affranchir du pouvoir d�illusion de son intelligence, jamais il ne d�passera l�Enceinte Ext�rieure.
����������� Puis, s�il �coute encore la parole du Ma�tre, le disciple entend une voix qui lui dit de chercher � unir son intelligence et son Âme[Voix du Silence ] . Sa t�che consistera donc � effectuer, dans sa nature mentale inf�rieure, une transformation qui la rende capable de fusionner avec l�Individualit� r�elle., une destruction de sa puissance d�illusion, en sorte qu�elle puisse conna�tre enfin l�Âme Immortelle qui l�a engendr�e, en sorte que le P�re et le Fils puissent redevenir un.
����������� Le disciple apprend encore qu�il doit d�truire son corps lunaire et purifier son corps mental [Voix du Silence ]. Lorsqu�il �tudie ce pr�cepte et qu�il cherche � en approfondir le langage mystique il est amen� � comprendre,� par mainte all�gorie et maint symbole d�sormais familier, que le corps appel� � lunaire � n�est autre que celui qui manifeste K�ma, ou le principe du D�sir. On le nomme parfois encore � l�homme astral �. La destruction de ce corps lunaire et la purification du corps mental s�imposent au disciple. � Purifie ton corps mental �, lui dit le Ma�tre, car s�il n�est pas nettoy� de la poussi�re des illusions, il ne pourra r�int�grer sa propre nature, il ne pourra s�unir � l�Âme
����������� Le n�ophyte commence maintenant � comprendre quel sera, dans l�Enceinte Ext�rieure, le travail � effectuer sur sa nature mentale. Il commence � concevoir que lui-m�me, Âme vivante �volu�e � travers les si�cles, a �man� cette force hors de lui-m�me afin de s�en faire un instrument pour son propre usage. Au lieu d��tre ma�tresse, l�intelligence devrait �tre une esclave ob�issante, un instrument aux mains qui la tiennent, un serviteur docile de l�Âme qui l�a envoy�e dans le monde. Et � mesure que la t�che � accomplir se dessine plus nette aux yeux du disciple, il commence � entra�ner sa nature mentale.
����������� Cet entra�nement d�butera par des choses tr�s simples. Le n�ophyte s�apercevra que sa pens�e saute constamment d�un objet � un autre, qu�elle est r�tive et point facile � dompter. Comme l�observait Ardjouna il y a cinq mille ans, l�intelligence est remuante et inqui�te, turbulente et difficile � tenir en main [ Bhagavad Git� . Il s�agit de vous mettre � l�oeuvre, afin de l�entra�ner comme vous entra�neriez un cheval pour en faire une bonne b�te de selle. Il s�agit de la dompter et de lui apprendre � ne plus battre la campagne en sautant foss�s et haies, mais � suivre sans regimber la route que votre volont� lui trace.
����������� Voil� pourquoi notre candidat, dans la vie de chaque jour � car sa vie ordinaire du monde est le cadre o� doit s�accomplir tout ce travail pr�paratoire � habituera graduellement son esprit � penser avec suite et nettet�, et ne se laissera plus entra�ner, par les multiples tentations qui l�environnent, � diss�miner son �nergie mentale dans toutes les directions. Il �vitera de disperser sa pens�e; il tiendra � ce qu�elle suive un sentier bien d�termin�; il refusera d�acqu�rir des connaissances par bribes et morceaux comme s�il �tait incapable de suivre un argument soutenu. Il mettra de c�t� les tentations sans nombre qui l�entourent � notre �poque superficielle. Ses lectures seront motiv�es par un choix judicieux , car c�est ici surtout que s�entra�ne la pens�e du candidat. Il lira donc, de propos d�lib�r�, des arguments soutenus, de longues lignes d�argumentation qui obligeront son esprit � suivre pendant un temps consid�rable une voie unique, nettement d�termin�e. Et il ne permettra plus � sa pens�e de sauter brusquement d�un sujet � un autre, car cela ne ferait qu�accro�tre l�instabilit� mentale qui est, sur la voie du disciple, un obstacle, sans l��limination duquel nul progr�s ult�rieur n�est possible.
�����������
Ainsi donc � travers les jours, les mois, les ann�es, le candidat �laborera
sa nature mentale. Il l�entra�nera � penser cons�cutivement. Il apprendra en
outre � choisir ses pens�es, il ne leur permettra plus d�aller et de venir �
leur guise. Il ne se laissera plus obs�der par ces id�es qui entrent et se fixent
dans l�esprit de l�homme ordinaire, incapable de les chasser. Le disciple sera
seul ma�tre chez lui. Si des �preuves viennent l�assaillir dans sa vie quotidienne,
peu importe; elles contribueront � son entra�nement mental. Au sein des �preuves
les plus cruelles, des inqui�tudes les plus p�nibles, s�il est tent� de penser
� l�avenir, de se laisser envahir par la pens�e des chagrins qui l�attendent
dans quelques jours, ou quelques semaines, ou quelques mois, qu�il se dise r�solument :
� Non, je ne veux pas nourrir cette inqui�tude ; je ne veux pas h�berger en
mon esprit une id�e pareille. Dans cette intelligence qui est mienne, il ne
doit rien demeurer qui n�y ait �t� admis d�lib�r�ment, sur mon invitation. Tout
ce qui cherche � entrer malgr� moi doit �tre exclu du champ de ma pens�e. �
- Que de gens restent �veill�s, la nuit, assaillis de pens�es inqui�tes, toute
leur vie empoissonn�e,� leur sant� min�e, non par les �preuves, mais par les
soucis que ces �preuves engendre dans leur esprit. Le candidat doit mettre fin
� cet �tat de choses. Il s�interdira toute activit� mentale non consentie et
fermera impitoyablement la porte � toutes ces pens�es qui le harc�lent.
����������� Ce sera l� un entra�nement m�thodique, un entra�nement long et ardu, car les pens�es font irruption malgr� la volont�, et il faut les expulser de force. A mainte et mainte reprise, il faut recommencer, avec une patience inlassable. La seule m�thode possible consiste � saisir la pens�e nuisible chaque fois qu�elle se pr�sente et � refuser d�lib�r�ment de lui donner asile. � Comment cela ? � me direz-vous. � Au d�but, le plus facile sera de d�tourner l�attention sur un autre objet; plus tard, on refusera tout simplement d�admettre l�intruse. Mais en attendant que le candidat ait acquis la force n�cessaire pour fermer ainsi les portes de son intelligence et y demeurer calme, � l�abri de toute influence externe, il fera bien de substituer une id�e � l�autre, en substituant toujours quelque pens�e �lev�e d�essence durable � la pens�e �ph�m�re dont il cherche � se d�barrasser. Ce proc�d� pr�sente un double avantage : d�une part, il chasse la pens�e transitoire; de l�autre, il habitue l�esprit � demeurer dans l��ternel et lui inculque le sentiment de la fuite continuelle du pr�sent, qui ne vaut vraiment qu�on s�en soucie. Cet entra�nement fortifie l��me dans les choses permanentes, il lui permet de s�absorber avec plus de constance dans l��ternel. Et c�est l� le secret de toute paix v�ritable en ce monde et dans les autres.
����������� Le candidat entra�ne donc sa nature mentale; il parvient graduellement � la dominer, il devient capable de choisir librement l�objet de sa pens�e et d�exclure les id�es qu�il juge mauvaises. Il va pouvoir tenter un pas de plus, mais ici la difficult� augmente. Le candidat cherchera � se retirer totalement de sa nature mentale, � penser sans elle, - non parce qu�il veut devenir inconscient, mais parce qu�il cherche, au contraire, � atteindre une conscience plus profonde; non parce que la vie en lui s��mousse et devient l�thargique, mais parce qu�elle est devenue si intense que son cerveau ne suffit plus � la contenir. � mesure que s��panouit en lui la vie int�rieure, � mesure que s�enfle le flot d��nergie vitale qui monte du fond de l�Âme, peu � peu le candidat s�aper�oit qu�il est possible� d�atteindre un �tat o� la � pens�e � n�est plus la pens�e de l�intellect, mais la conscience dans l�Âme elle-m�me.
����������� Mais bien longtemps avant d�avoir trouver cette conscience et de s��tre en quelque sorte assimil� � elle d�une mani�re continue, il lui faudra traverser une phase d�obscurit�, de vide int�rieur. C�est l� peut-�tre une des �preuves les plus p�nibles de la vie du candidat dans l�Enceinte Ext�rieure. Il commence alors � comprendre vaguement le sens que renferment ces paroles du Ma�tre :
�� R�prime par ton Soi divin ton � moi � inf�rieur.� R�prime par l��ternel, le Divin [ Voix du Silence ]. � Le Soi divin, c�est cette Âme qui doit r�primer le mental inf�rieur. Puis, au-del� de l�Âme elle-m�me, demeure l��ternel; et dans un temps � venir, au sein du Temple, cet �ternel doit ma�triser en l�homme le Divin, comme le Divin ma�trise d�j� le � moi � inf�rieur.
����������� Le candidat apprend ensuite, lentement et par degr�s, qu�il doit �tre ma�tre de toutes les choses qui l�entourent dans le domaine de la pens�e purement mentale. Des tentations subtiles vont l�assaillir, qui ne toucheront plus sa nature inf�rieure, mais s��l�veront hardiment contre sa nature sup�rieure. N�ayant pu r�ussir avec les d�sirs et les s�ductions plus grossi�res du corps, elles chercheront � d�truire le disciple � l,aide de son intelligence m�me�Et voici qu�elles accourent en foule, ces tentations subtiles du monde mental. Elles tendent des pi�ges � l�homme int�rieur. De toutes parts elles se pressent autour de lui pendant qu�il gravit le sentier ardu. Il faudra que le disciple obtienne une domination compl�te sur les images mentales de sa propre cr�ation, avant de pouvoir continuer sa route, , impassible, serein, in�branlable, au milieu de cet essaim rapide de pens�es vivifi�es et fortifi�es, non plus par l�intelligence d�bile des hommes du monde inf�rieur, mais par une �nergie terrible qui participe � la nature des forces du plan spirituel � du c�t� sombre, bien entendu, et non du c�t� lumineux; car ces forces destructives proviennent de ceux qui voudraient tuer l��me, non de ceux qui sont pr�ts � la secourir.
����������� Dans l�Enceinte Ext�rieure, le candidat se trouve face � face avec des pens�es de cette nature-l�, et elles se jettent sur lui avec toute la puissance des forces terribles du mal. S�il n�a point appris � rester ma�tre dans l�enceinte de sa propre intelligence, s�il ne s�est pas entra�n� � r�sister aux attaques mesquines qu�il subit dans le monde ext�rieur, comment pourra-t-il tenir t�te � l�assaut des l�gions de M�ra, le Mauvais ? Comment traversera-t-il le dernier stade de l�Enceinte Ext�rieure, autour duquel s�assemble en foule ces ennemis mortels de l�Âme, qui refusent de laisser passer quiconque n�est pas absolument en paix ?� C�est alors que l�homme sent grandir en lui la force qui proc�de de la fixit� de l�esprit. Il est maintenant assez puissant pour fixer sa pens�e o� il veut et rester in�branlable, quelque soit la tourmente d�cha�n� alentour. Cette fixit� est tellement grande. Tellement immuable, que nulle force ext�rieure n�est capable de la troubler. Il n�est m�me pas n�cessaire de tuer les pens�es mauvaises, car l�homme s�est affranchi du besoin d�un pareil effort. Plus l�Âme est puissante, moins il y a d�effort dans son travail; � mesure que son pouvoir s��panouit, elle cesse de sentir les assauts de l�ext�rieur.
����������� Alors est atteinte, dans le d�veloppement mental, cette phase glorieuse o� les pens�es mauvaises ne sont m�me plus tu�es par la volont�, mais tombent mortes d�elles-m�mes en touchant le sanctuaire de l�Âme L�intelligence n�a plus besoin de d�truire, ni d��tre elle-m�me refr�n�e; elle est devenue diaphane, pure et ob�issante. C�est ici que l�intelligence et l�Âme commencent � s�unifier; et le r�sultat de ce commencement d�unification, c�est que toute pens�e discordante tombe morte d�elle-m�me au premier contact. La conscience n,a plus besoin de frapper, car toutes les influences qu�il lui faudrait frapper s�annihilent spontan�ment par le choc en retour de leur propre impulsion. C�est l� la fixit� de l�esprit que symbolise la lampe plac�e en un lieu s�r o� nul vent ne peut faire vaciller sa flamme. C�est dans ce lieu de repos que l�homme commence � comprendre ce que c�est que la volont�; c�est l� qu�il trouve la paix parfaite. C�est un s�jour abrit�, � l�ombre des murs du Temple, et l��criture Ancienne en parle lorsqu�elle dit que : � Lib�r� du d�sir, lib�r� de la souffrance, l�homme, dans le calme des sens, contemple la majest� de son Âme[ Kathopanishad, 11, 20 ] . �
����������� C�est alors que pour la premi�re fois la vision lui est acquise, non plus en des lueurs fugaces, en des rayons qui brillent pour s��teindre aussit�t; mais dans cette paix et cette s�r�nit� absolue que ne troublent plus ni d�sir ni tristesse. C�est alors que la majest� de l�Âme rayonne sans nuages, et que l�intelligence, miroir d�sormais immacul�, la refl�te telle qu�elle est r�ellement. Car cette intelligence, nagu�re semblable � un miroir souill� de poussi�re, � un lac boulevers� par les vents tumultueux, est devenue semblable � un miroir poli qui refl�te parfaitement; elle est devenue semblable au lac paisible o� se mirent la montagne et le ciel, au lac qui rend l�arbre � l�arbre et l��toile � l��toile, au lac qui se rev�t de tous les tons changeants du ciel d�o� ils proc�dent.
����������� Mais avant d�atteindre ce calme parfait, il est un moment de p�ril dont a parl� la voix pr�monitrice. Il est un moment o�, tout pr�s d�atteindre le point o� la lampe ne vacillera plus, l�intelligence et l�Âme en viennent aux mains pour une lutte finale. L�intelligence, alors, se d�bat comme un �l�phant furieux dans la jungle. Comment pourra-t-elle �tre dompt� ? C�est la derni�re lutte du mental, c�est le dernier effort de l�inf�rieur pour s�affirmer� contre le sup�rieur, pour rejeter le joug qu�il sent tomber sur ses �paules. C�est le soul�vement de la nature inf�rieure dont parlent tous les livres d�Initiation. Car il a �t� �crit, dans tous les livres qui parlent de la Sagesse Occulte, qu�au moment o� le candidat s�approche de l�entr�e, avant qu�il ne p�n�tre dans le Temple, toutes les puissances de la nature s��l�vent contre lui afin de l�entra�ner en arri�re, toutes les puissances du monde s�unissent afin de lui barrer le passage. C�est le dernier combat � livrer avant la victoire compl�te. Il y a, sur des plans plus �lev�s encore, une autre lutte dont celle-ci n�est que le reflet, sur des plans tellement plus sublimes que nous ne pouvons les concevoir, des plans o�, seuls, les plus grands d�entre les Grands se sont fray� un chemin. Cette lutte-l� est symbolis�e par le dernier combat que livra Bouddha, sous l�Arbre Sacr�. En ce lieu o� il re�ut la derni�re illumination qui Le fit Bouddha, toutes les l�gions s�assembl�rent pour tenter de Lui barrer le passage par un supr�me effort. Bien qu�� une hauteur infiniment moindre, cette m�me lutte cruciale se pr�sente, � l�approche des portes du Temple, dans la vie de l�aspirant, qui sera bient�t disciple.
����������� Comment triomphera-t-il ? Comment suivra-t-il, sur le sentier d��preuve, les pas de ceux qui l�ont pr�c�d� ? C�est encore une fois des paroles du Ma�tre que vient le secours; c�est de Ses l�vres encore que proc�de le conseil qui doit nous guider : � il faut � l��me �, nous dit la Voix dans le Silence, � Il faut � l��me des points pour l�attirer vers l�Ame-Diamant [ Voix du Silence ]� �. Et qu�est-ce que l�Ame-Diamant� ? � C�est l�Âme qui a achev� son union avec le Soi Supr�me, c�est l�Âme sans d�faut et sans tache, transparente comme un pure diamant � la Lumi�re du Logos qu�Elle concentre en un foyer unique pour notre humanit�. Le nom puissant que j�ai nomm� plus haut, et j�en eusse pu nommer d�autres, qui r�v�lent en d�autres langues� la m�me signification � ce Nom est celui d�une Âme�lev�e entre toutes les Âmes , � laquelle appartient ce titre d�Ame-Diamant . Et � travers Elle, la lumi�re du Logos lui-m�me �tincelle sans en �tre obscurcie, tellement pur est le Diamant, tellement immacul�e cette Âme incomparable. C�est l�Âme vers laquelle nous �levons nos coeurs en nos moments d�aspiration supr�me, et ce qu�il faut pour nous attirer vers elle, ce n�est qu�une lueur de Sa beaut�, ce n�est qu�une caresse de Sa flamme. Car l�Âme cro�t vers l�essence m�me de son �tre comme cro�t la fleur vers le soleil; et les pointes qui l�attirent, ce sont les rayons de splendeur que l�Ame-Diamant r�pand en elle. Car l�Âme du disciple, malgr� sa faiblesse et ses h�sitations, n�en est pas moins d�essence une avec l�Âme Supr�me. C�est pourquoi l�Âme Supr�me l�attire avec une force toute Divine � l�union avec Elle-m�me. Et � mesure que son entendement s��claire, le disciple con�oit ce que signifie l�Ame-Diamant. Il comprend qu�en lui-m�me aussi cette Ame-Diamant doit s�incarner un jour. - � Regarde en toi-m�me : Tu es Bouddha ! � Il comprend que son intelligence, comme son corps, n�est qu�un instrument au service de l�Ame-Diamant, un instrument qui n�est utile et pr�cieux que s�il rend des sons dignes d�atteindre les r�gions plus hautes. C�est alors que, par la d�votion parfaite, les cordes de l�Âme sont harmonis�es; c�est alors qu�elle devient un instrument digne de la main du Ma�tre, un instrument d�o� peuvent r�sonner toutes les m�lodies de la terre et du ciel.
����������� Le disciple se trouve enfin � la porte du Temple, et il se rend compte de ce qui est arriv�. Et ce qui est arriv�, c�est que lui-m�me s�est trouv� Lui-M�me, et que l�Âme, qui est d�sormais Lui-M�me, �l�ve maintenant son regard vers une Identit� plus haute encore avec laquelle elle doit s�unir un jour. Cette union plus haute n�a lieu qu�au sein du Temple. Le disciple, parvenu sur le seuil, n�a encore fait qu�unir son � Moi � p�rissable � son � Soi � �ternel, sa Personnalit� intellectuelle � son Individualit� r�elle.
����������� Alors commence pour lui cette adoration qui signifie l�identification graduelle � sa conscience avec l�Etre Supr�me. Alors il apprend que, dans sa vie quotidienne, l�Âme peut-�tre sans cesse en adoration, quelle que soit l�occupation de l�intelligence, quelque soit l�activit� du corps. Il comprend enfin que la vie du disciple est une adoration absolument ininterrompue de l�Identit� Supr�me, une contemplation incessante de l�Ame-Diamant, une contemplation du Tr�s-Haut qui n�aura pas de fin. Il sait que l�Âme�tant ainsi occup�e � tout jamais au sein du Temple, le corps et l�intelligence travailleront dans l�Enceinte Ext�rieure, et , plus loin encore, dans le monde, pour l�humanit� qui r�clame leurs services. Il sait que son corps peut �tre sans cesse actif, travaillant pour les hommes; que son intelligence peut �tre sans cesse occup�e, travaillant pour les hommes. Tant que le disciple vivra sur terre ce sont l� ses instruments, ses messagers dans le monde des hommes, pendant que dans le Temple, lui-m�me est en adoration. Il comprend enfin le sens de ce verset : � Dans le ciel, les Anges contemplent �ternellement la Face du P�re. � Car la vision de l�Ame-P�re est une vision ininterrompue. Aucun nuage terrestre ne peut l�obscurcir, aucune oeuvre terrestre ne peut la troubler. Sans cesse l�Âme contemple, pendant que travaillent l�intelligence et le corps.
����������� Parvenue � ce point, l�Âme franchit librement le seuil; et, de l�Enceinte Ext�rieure, elle p�n�tre dans le Temple de son Dieu.
����������� Au d�but de cette troisi�me conf�rence, je tiens � r�p�ter l�avertissement que je vous ai donn� lors de notre premi�re r�union. Cet avertissement avait trait aux qualit�s qui sont l�objet de notre �tude actuelle et � l�organisation que doivent adopter dans leurs pens�es comme dans leurs actes, les hommes dont j�ai d�fini la situation en disant qu�ils se trouvent dans � l�Enceinte Ext�rieure �. Souvenez-vous que j�ai d�crit la situation de l�aspirant parvenu � ce degr�, et que je vous ai montr� combien elle diff�re de celle d�un homme bon, vertueux, religieux, mais qui n�a pas encore nettement reconnu le but de l��volution humaine, et ne s�est pas rendu compte de l�immensit� de sa t�che. Je tiens donc � vous rappeler ici que dans toute cette esquisse des qualit�s requises� chez ceux qui p�n�trent dans l�Enceinte, je me place� constamment au point de vue d�un entra�nement d�lib�r� vers un but nettement reconnu.
����������� De plus, en parlant de cet qualit�s requises, je ne dis pas qu�elles doivent �tre amen�es � l��tat de perfection finale pendant que l�aspirant se trouve encore dans l�Enceinte Ext�rieure du Temple. Je dis simplement qu�il doit commencer �� fa�onner son caract�re, qu�il doit concevoir aussi nettement que possible l�oeuvre dont la r�alisation lui incombe, et qu�il doit s�efforcer, avec plus ou moins de succ�s, vers l�id�al auquel il aspire. Quant � la purification finale, quant � la ma�trise absolue des pens�es, quant � l��dification parfaite du caract�re, quant � la transmutation compl�te des forces inf�rieures en �nergies sup�rieures, - je ne pr�tends nullement que toutes ces perfections doivent �tre r�alis�es avant que l�aspirant puisse franchir le seuil du Temple. En r�alit�, dans l�Enceinte Ext�rieure, il est occup� � b�tir les fondations de son �difice, � tracer avec soin, et d�une mani�re suffisamment compl�te, les plans de la construction qu�il compte parfaire un jour. L�ex�cution de ces plans, l�assemblage d�finitif des mat�riaux sur ces fondations, l��rection des murs, le placement de la derni�re pierre, cl� de vo�te de l��difice entier, - tout ce travail d�finitif doit s�accomplir plut�t au sein� m�me du temple, apr�s que les yeux ont �t� ouverts, et non pendant que l�aspirant, encore partiellement aveugle, s�efforce dans l�Enceinte Ext�rieure.
����������� Mais ce que je tiens � vous faire comprendre avant tout, c�est que le plan �est trac�, adopt�, c�est que le candidat se propose d�atteindre ce but sublime de l�humanit� parfaite, et rien de moins ; � au cours des �ges, d�autres attitudes plus sublimes encore se d�voileront � ses yeux. Quelque immense que puisse sembler une telle aspiration, quelque grandiose que puisse para�tre l�esquisse de l�oeuvre dont les d�tails seront � parfaire plus tard, cette esquisse pr�liminaire n�en est pas moins adopt�e d�s l�Enceinte ext�rieure, dessin d�ensemble o� les d�tails viendront se fixer un � un. Quelque modestes que puisse �tre les accomplissements actuels, ils n�en sont pas moins les fondements bine d�termin�s qui serviront de base aux r�alisations glorieuses de l�avenir.
����������� J�insiste sur ce point parce qu�il m�a �t� sugg�r� qu�en assignant un champ si vaste � l�Enceinte Ext�rieure, en tra�ant une esquisse si immense, je pourrais donner � quelques-uns, parmi mes auditeurs, un sentiment de d�couragement ou m�me de d�sespoir. En sorte qu�il est utile de faire comprendre � tous que les commencements, tout en impliquant un trac� de l�ensemble, ne sont encore que les commencements, et qu�une fois le seuil franchi, bien des vies resteront encore � vivre, ou l�oeuvre commenc�e pourra �tre amen�e � sa perfection. Rappelez-vous seulement que l��difice complet aura pour base le plan que l�architecte doit tracer d�s maintenant.
����������� Ce point nettement fix�, laissez-moi vous parler de la construction du caract�re. Il s�agit d�une construction nette et positive, et c�est l� la t�che essentielle que le candidat s�imposera dans l�Enceinte Ext�rieure du Temple. Nous savons d�j� qu�il doit avoir �t�, dans ses vies ant�rieures, un homme vertueux et religieux. Il doit avoir reconnu qu�aucun vice positif n�est admissible en sa nature, qu�aucun mal ne peut �tre tol�r�. S�il reste un germe de vice, il doit �tre imm�diatement rejet�; s�il reste des tendances au mal positif, elles doivent �tre d�finitivement et compl�tement d�racin�es. Dans cette Enceinte Ext�rieure, il ne peut du moins y avoir aucun compromis avec le mal, aucune complaisance pour ce qui n�est pas juste, pur et bon. Il peut y avoir encore des faiblesses dans l�accomplissement du bien, mais l��me n�est plus capable de rester, insouciante, dans le mal. De cela , l�aspirant s�est d�tourn� une fois pour toutes : les �l�ments les plus grossiers de sa nature sont d�j� �limin�s, le stade pr�liminaire de la lutte int�rieure est accompli. Il n�est pas permis � l�homme d�apporter pour sa construction dans l�Enceinte du Temple, des pierres brutes. La taille doit �tre poursuivie � travers bien des vies pass�es, le caract�re doit avoir �t� longuement travaill� avant de pouvoir �tre employ� m�me dans l�Enceinte Ext�rieure d�un tel Temple.
����������� Nous avons donc laiss� derri�re nous ce d�grossissage pr�liminaire du caract�re, et nous allons nous occuper de la construction des vertus positives. Comme nous le verrons, les vertus que nous allons �tudier sont �lev�es et nobles entre toutes. Ce ne sont pas les simples vertus reconnues comme n�cessaires dans le monde, mais bien plut�t les vertus que l�aspirant doit pratiquer afin de devenir un Auxiliaire et un Sauveur du monde, les caract�ristiques qui sont la marque des R�dempteurs de l�humanit�, pionniers et pr�mices de la race enti�re.
����������� Ce qui nous frappera sans doute d�s l�abord, dans cette construction du caract�re chez l�homme parvenu dans l�Enceinte ext�rieure, c�est sa nature essentiellement d�lib�r�e. Ce n�est plus le moment des impulsions passag�res, des constructions fantaisistes abandonn�es ou reprises selon le hasard des circonstances, des efforts spasmodiques dirig�s tant�t dans un sens, tant�t dans un autre. Il ne s�agit plus de courir le monde � la recherche d�un but. Toutes ces tergiversations pr�liminaires sont choses du pass� : l�objet de la vie est reconnu, et le but de l�effort est nettement d�termin�. Il s�agit donc d�une construction d�lib�r�e, comme peut en faire l�homme qui sait qu�il a le temps devant lui, et que rien dans la Nature ne peut �tre perdu. Il s�agit d�une construction d�lib�r�e qui commence avec les mat�riaux que l�architecte a sous la main, avec le caract�re tel qu�il est au moment actuel. L�homme consid�re avec calme toute sa force et toutes ses faiblesses, et il se met � l�oeuvre pour accro�tre la force et pour rem�dier aux faiblesses. Il va falloir b�tir d�lib�r�ment suivant un plan nettement con�u et sculpter patiemment en marbre dur et stable la statue dont le mod�le est d�j� achev�. Ainsi la premi�re chose que l�on observera chez ces candidats dans l�Enceinte Ext�rieure, c�est la nettet� du but poursuivi et le caract�re d�lib�r� de l�action. L�homme sait d�sormais que toute entreprise commenc�e sera continu�e. Il sait qu�il emportera avec lui, de vie en vie, les tr�sors accumul�s. Il sait qu�un lacune d�couverte, sans pouvoir �tre enti�rement combl�e, est n�anmoins combl�e jusqu�� un certain point et qu�une partie de la t�che est accomplie. Il sait qu�une puissance nouvelle, une fois d�velopp�e, lui reste acquise � tout jamais, qu�elle fait partie int�grante de son Âme, qu�elle est tiss�e en la substance m�me de Son Individualit� et ne pourra lui �tre ravie.
����������� Le candidat construit donc de propos d�lib�r�, et son assurance prend racine dans le savoir v�ritable, qui reconna�t la Loi Une sous tous les aspects de la Nature. Comprenant que la Loi est immuable, certain de pouvoir placer en elle sa confiance totale, absolue, il invoque la Loi, il sait qu�elle ne peut tromper son attente, il fait appel � la Loi, car il sait que la Loi jugera. Il n�y a plus trace d�h�sitation en lui, il ne reste pas l�ombre d�un doute. Les forces qu�il d�pense doivent fatalement produire leurs effets; et chaque graine qu�il s�me est sem�e avec la certitude absolue qu�elle fructifiera selon son esp�ce, et qu�aux jours � venir il r�coltera la moisson correspondante, et rien d�autre. Il n�y a donc point de h�te dans son travail, point d�impatience dans son labeur. Si le fruit n�est pas m�r, il pourra le cueillir plus tard; si la graine n�est pas pr�te, il attendra qu�elle soit form�e. Il sait que cette Loi, � laquelle il s�est donn�, est en m�me temps immuable et bonne. Il sait qu�elle lui apportera chaque chose � son heure, et que, pour le monde comme pour lui-m�me, il n�est point d�heure pr�f�rable � celle-l�.
����������� Le candidat se met donc � l�oeuvre, muni des mat�riaux qu�il trouve en sa possession. Ces mat�riaux lui suffisent, car ils sont les fruits de son propre pass�, que la Loi lui rapporte. Il s�en contente pleinement, car c�est avec eux seuls qu�il doit travailler, avec eux et non point avec d�autres. Que son bagage soit abondant ou d�fectueux, riche ou mesquin, il s�en empare et commence � l��laborer. Car il sait que, malgr� sa pauvret� actuelle, la richesse qu�il peut atteindre n,a point de limites; il sait que, malgr� toute la m�diocrit� de ses facult�s actuelles, l�immensit� de leur expansion, � travers les temps futurs, n�a point de bornes. Il sait qu�il r�ussira fatalement, qu�il ne s�agit pas d�une vague possibilit� mais d�une certitude absolue, qu�il ne s�agit pas d�une entreprise hasardeuse, mais d�une r�alit� positive et d�termin�e.� La Loi doit� lui� rendre l��quivalent de ce qu�il donne, et m�me s�il ne donne que peu, ce peu lui reviendra un jour� et pourra servir de base � des constructions ult�rieures. Ajoutant sans cesse � son tr�sor, l�homme s��l�vera un peu plus haut par chaque effort nouveau, par chaque r�alisation nouvelle.
����������� Nous connaissons d�j� en partie la m�thode suivant laquelle il doit construire. Nous savons qu�il doit commencer par la bonne pens�e, nous avions �tudi� cet entra�nement de la pens�e et, la semaine passée, entra�nement dont la n�cessit� s�impose si l�homme veut apprendre � choisir le bien et � rejeter le mal. Travaillant constamment � cette ma�trise de la pens�e et sachant les condition qu�elle implique, comprenant les lois qui pr�sident � la g�n�ration des pens�es et d�terminent en m�me temps leur action sur le monde et leur r�action sur celui qui les engendre, - le candidat est d�sormais � m�me de choisir d�lib�r�ment, pour la construction de son caract�re, la bonne pens�e. Ce sera l� une des premi�res t�ches qu�il s�imposera dans sa travers�e de l�Enceinte Ext�rieure.
����������� Ils s�imposera cette t�che pour deux raisons. La premi�re, c�est que sa bonne pens�e agit sur ses semblables, et que tous les candidats au Temple ont pour motif primordial le Service de l�Humanit�. En sorte que, lorsqu�il choisit ses pens�es, soit qu�il veuille cr�er mentalement lui-m�me, ou admettre simplement en sa conscience ce qui provient d�autrui, son mobile essentiel sera l�influence de ces pens�es sur les autres et non pas leur action sur lui-m�me. Avant toute chose, il est candidat au Service des mondes. C�est pourquoi, en choisissant les pens�es qu�il vivifiera de son �nergie propre, il calculera leur action sur le monde ext�rieur. Il verra en quoi elles peuvent aider, en quoi elles peuvent fortifier, en quoi elles peuvent purifier. Dans le puissant courant de pens�e qu�il sait devoir proc�der de son intelligence, il d�versera les pens�es qui sont utiles aux autres, et son but, nettement d�termin�, sera de servir ainsi ses fr�res, d�aider au progr�s du monde.
����������� En second lieu, il prendra en consid�ration la nature de ses pens�es en tant qu�elles l�affectent lui-m�me, en tant qu�elles r�agissent sur lui pour former son caract�re; - consid�ration dont nous comprendrons dans quelques moments l�importance vitale, car voici � vrai dire l�instrument qui servira � b�tir le caract�re de l�homme. Et non seulement il envisagera la r�action de ses pens�es sur son caract�re, mais il verra comment, en transformant ce caract�re, elles en font un aimant qui attire � lui toutes les pens�es de m�me nature. En sorte que l�homme, agissant comme un foyer de pens�es hautes et nobles (et d�sormais inaccessible, esp�rons-le, � celles qui sont activement mauvaises ), fera d�lib�r�ment de sa conscience un aimant pour tout ce qui est bon. Les forces mauvaises s�an�antiront au contact� de son �me puissante, et les forces pures et bonnes entreront � flot dans sa conscience pour y �tre nourries, vivifi�es et fortifi�es. Les bonnes pens�es des autres viendront � lui, pour �merger � nouveau dans le monde avec un surcro�t de force de vive. Ainsi, non content d��tre une source de force secourable gr�ce aux pens�es qu�il engendre lui-m�me, il deviendra un chenal de secours providentiel gr�ce aux pens�es qu�il re�oit, qu�il vivifie et qu�il transmet. Et toutes ces influences contribueront � l��dification de son caract�re, en sorte que, d�s le d�but de la construction, cette droite pens�e sera l�influence ma�tresse dans son esprit. Il observera constamment ses pens�es, il les scrutera avec un soin jaloux, afin que, dans ce sanctuaire de sa conscience, rien d�impur ne puisse p�n�trer. Si ce point n�est pas surveill�, tout le reste est ouvert � l�ennemi. C�est ici la citadelle m�me de la place, et c�est en m�me temps la porte unique par o� passent toutes les choses qui entrent.
����������� Poussant plus loin sa construction, l�homme apprendra � s�il ne l�a pas appris d�j� � � surveiller ses paroles. La droite parole, avant tout, doit �tre vraie, une v�rit� scrupuleuse et exacte. La v�racit� banale du monde ext�rieur ne suffit plus ici, bien qu�elle ne soit pas � d�daigner, il faut au disciple cette v�racit� scrupuleuse et stricte, qualit� indispensable entre toutes, pour qui veut �tudier l�occultisme ; - v�rit� dans l�observation des faits, v�rit� dans leur transmission, v�rit� dans la pens�e, v�rit� dans la parole, v�rit� dans l�action. Sans cette recherche constante de la v�rit� et cette r�solution in�branlable de devenir vrai soi-m�me, nulle possibilit� d�occultisme qui ne soit un danger, nulle possibilit� sauf la chute, d�autant plus terrible et plus profonde que l��tudiant sera parvenu plus haut. Car la v�racit� est en m�me temps, pour l�occultisme, un guide et une armure. Elle est un guide, car elle donne l�intuition qui lui permet de discerner la route vrai de la route fausse, le sentier de droite du sentier de gauche. Elle est une armure, car s�il n�est rev�tu de cette armure de v�rit�, il sera fatalement victime des illusions et des fantasmagories des mondes qu�il lui faut traverser.� La pratique de la v�rit� en pens�e, et en action �veille graduellement cette intuition spirituelle qui transperce tous les voiles d�illusion et que nulle puissance au monde n�est capable de d�cevoir. Partout des voiles sont �tendus; de toutes parts surgissent, dans ce monde d�illusion, les apparences trompeuses, - jusqu�au jour o� l�intuition spirituelle traverse, de sa vision direct et impeccable, tous les masques des choses. Mais il est oiseux de pr�tendre � cette intuition-l� si la v�rit� n�est suivie dans le caract�re, cultiv�e dans l�intelligence, d�velopp�e dans la conscience. Sans elle, c�est l��chec fatal, l�aberration in�vitable.
����������� La parole doit donc,, avant toute chose, �tre vraie. En second lieu elle doit �tre douce. Car la v�rit� et la douceur ne sont pas oppos�es, comme on est trop souvent tent� de le croire. La parole ne perd rien de sa v�racit� pour �tre parfaite en douceur, en courtoisie et en compassion. Et m�me, plus elle est vraie, plus elle doit n�cessairement �tre douce; car, au coeur m�me des choses, la v�rit� et la compassion vivent �ternellement. C�est pourquoi la parole qui refl�te l�Essence la plus intime de l�Univers ne peut ni blesser sans motif un �tre vivant quelconque ni donner lieu au moindre soup�on de fausset�. La parole doit donc �tre vraie et douce, - vraie, douce et courtoise. Voil� en quoi consiste l�aust�rit� du langage, la vraie p�nitence en paroles, le sacrifice que chaque aspirant doit offrir.
����������� Enfin, de la pens�e vraie et de la parole vraie d�coule in�vitablement l�action vraie. Nul autre r�sultat ne peut proc�der d�une force pareille. Car l�action n�est que la manifestation des forces int�rieures, et lorsque la pens�e est pure, lorsque la parole est vraie et droite, l�action doit in�vitablement �tre noble. L�eau qui s��coule d�une source si douce ne peut qu��tre douce elle-m�me; l�action qui proc�de d�un coeur et d�un cerveau purifi�s ne peut qu��tre juste et bonne.
�����������
Tel est le triple lien qui lie l�aspirant � l�humanit� d�une part et, de l�autre,
� son Ma�tre; le triple lien qui, dans plusieurs grandes religions, est consid�r�
comme le symbole de la parfaite ma�trise de soi : ma�trise de la pens�e,
de la parole et de l�action. Tel est le triple lien qui lie l�homme au service
supr�me, qui lie le disciple aux pieds de son Ma�tre, le triple lien qu�il n�est
point facile de rompre.
Ces choses une fois comprises, notre candidat,� tout en travaillant � les appliquer journellement dans sa vie, doit commencer � mettre en oeuvre pour la construction de son caract�re un ensemble de pratiques m�thodiques, nettement d�termin�es. Et d�abord, il devra se construire ce que nous appelons un� �Id�al�.
L�intelligence, travaillant dans son domaine propre, doit construire une image int�rieure, image dont les �l�ments seront emprunt�s en grande partie, au fur et � mesure de la croissance de l�homme, � des sources ext�rieures. Mais bien que les mat�riaux en soient emprunt�s� au monde ext�rieur, l�id�e elle-m�me r�sulte de l��laboration interne de ces mat�riaux par l�intelligence. Une id�e est, dans sa plus haute acception,� une chose abstraite; et si nous parvenons � concevoir la gen�se d�une id�e abstraite dans la simple conscience c�r�brale, il nous sera facile de comprendre clairement ce qu�on peut entendre par un � Id�al �. Une l�g�re extension de l�id�e obtenue nous donnera exactement ce dont nous avons besoin.
����������� Je prendrai l�exemple classique, l�id�e abstraite du triangle. L�id�e du triangle peut se former tout d�abord, dans la conscience c�r�brale de l�enfant, par l��tude d�un grand nombre de figures qu�on lui dit �tre des triangles. Il remarquera qu�elles ont des formes tr�s diff�rentes, qu�elles sont form�es de lignes orient�es suivant des directions tr�s diverses. Il trouvera, en les examinant s�par�ment avec sa conscience c�r�brale d�enfant, qu�elles diff�rent �norm�ment. Il les prendra donc � premi�re vue pour des figures diff�rentes, et ne pourra reconna�tre certaines unit�s sous-jacentes qui donnent � toutes ces figures le m�me nom. Mais � mesure que son travail de pens�e se poursuit, l�enfant apprend graduellement qu�il y a certains �l�ments invariables qui servent de base au concept unique du triangle; qu�il comporte toujours trois lignes droites et trois angles, que la somme de ces trois angles a toujours une certaine valeur d�termin�e, que les trois lignes, appel�es les c�t�s du triangle, ont entre elles certains rapports, et ainsi de suite. � mesure qu�elle �tudie, l�intelligence s�assimile toutes ces conceptions diverses; puis par une sorte d��laboration collective, elle en extrait ce que nous appelons l�id�e abstraite du triangle, qui n�a ni forme ni grandeur particuli�re, et dont les angles, pris s�par�ment, n�ont aucune valeur d�termin�e. Et cette id�e abstraite est construite par l�op�ration de l�intelligence sur la multiplicit� des formes concr�tes, du moins en ce qui concerne la conscience c�r�brale; car je laisse de c�t�, pour le moment, l�id�e plus haute dont cette abstraction n�est peut-�tre qu�un reflet. Voil� donc comment se construit, dans le cerveau, une id�e abstrait qui n�a ni couleur ni forme, dont les caract�ristiques ne peuvent �tre exprim�es par aucune figure particuli�re, et qui r�unit n�anmoins en elle ce qui fait l�unit� d�une multitude de figures diverses.
����������� L�id�al que nous devons construire est un concept abstrait de nature analogue. Il est l�oeuvre de la facult� imaginative de notre intelligence, qui extrait l�essence de tout ce qu�elle a pu obtenir en fait d�id�es relatives aux grandes vertus, relatives � ce qui est beau, � ce qui est vrai, � ce qui est harmonieux,� � ce qui est compatissant, � ce qui satisfait au plus haut point les aspirations de l�esprit et du coeur De toutes ces id�es diff�rentes, telles qu�elles ont �t� per�ues dans leur manifestation imparfaite, l�intelligence extrait l�essence puis elle construit et projette devant elle une vaste figure h�ro�que o� toute chose est amen�e � sa perfection, o� toute chose atteint son expression la plus haute et la plus compl�te. Ici, l�esprit n�envisage plus les choses vraies, mais la v�rit�; il n�envisage plus les choses belles, mais la beaut�; il n�envisage plus les choses fortes, mais la force; il n�envisage plus les choses tendres, mais la tendresse; il n�envisage plus les �tre aimants, mais l�amour m�me. Et c�est l� la figure parfaite � puissante et harmonieuse en toutes ses proportions, plus sublime que tout ce que nous avons vue sur la terre, inf�rieure seulement � ces lueurs de la Beaut� supr�me que l�esprit, en de rares moments d�inspiration, rayonne d�en haut sur notre intelligence; - c�est l� l�id�al de perfection que l�aspirant se construit � lui-m�me, aussi parfait qu�il peut le concevoir, sachant bien, n�anmoins, que son r�ve le plus sublime n�est que l�ombre p�le, infiniment vague, de la R�alit� qu�il veut refl�ter. Car dans le monde du R�el il existe en Lumi�re vivante, planant dans les profondeurs infinies du ciel au-dessus des sommets neigeux de l�aspiration humaine, l�Arch�type �ternel dont l�homme n�entrevoit ici-bas qu�un vague reflet aux p�les couleurs. Tout ce que l�Âme humaine peut imaginer de plus parfait, de plus sublime, tout ce qu�elle peut concevoir du Tout ultime qu�elle cherche, tout cela n�est que l�ombre et le reflet de l��ternel R�alit�. L�id�al que l�homme se construit est donc bien imparfait, car il ne peut �tre autrement. Mais quelque imparfait qu�il soit, il n�en est pas moins son id�al � lui, l�id�al suivant lequel la construction de son caract�re doit �tre entreprise.
����������� Mais pourquoi construire un id�al ? Ceux d�entre vous qui m�ont suivi jusqu�� ce point � travers les op�rations de la pens�e humaine, sauront pourquoi un id�al est n�cessaire. Laissez-moi vous citer deux passages des �critures, emprunt�s l�un � l�Inde, l�autre au Christianisme, afin de vous montrer comment les Initi�s parlent des m�mes faits quelque soit la langue qu�ils emploient,� quelque soit la civilisation � laquelle ils s�adressent. Il est dit dans l�un des plus mystiques d�entre les Upanishads, le Chh�ndogya : � L�homme est une cr�ature de r�flexion; ce � quoi il r�fl�chit, il le devient; r�fl�chis donc sur Brahman. � Plusieurs milliers d�ann�es apr�s, un autre grand Instructeur, l�un de ceux qui b�tirent le Christianisme, formule, en d�autres termes exactement la m�me pens�e : � Ainsi nous tous, contemplant � visage d�couvert, comme dans un miroir, la gloire du Seigneur, sommes transform�s en cette m�me image, de gloire en gloire. �
����������� � Contemplant comme dans un miroir �� car l�intelligence est un miroir qui refl�te les images projet�es sur lui; et l�Âme qui dans le miroir de l�intelligence contemple la gloire du Seigneur, est, de gloire en gloire, transform�e en cette divine image. Ainsi donc, sous les paroles du Sage de l�Inde et sous celles du Saint chr�tien, � travers les �critures Saintes de l�Occident comme � travers celles de l�Orient Antique, le m�me enseignement de la Grande Fraternit� nous est nettement transmis; il faut avoir un id�al devant vous� afin de le refl�ter, et l�objet sur lequel l�esprit m�dite sans cesse est n�cessairement ce que l�homme lui-m�me deviendra.
����������� Et comment �l�verons-nous notre �difice vers l�id�al ? � Car c�est l� la question qu�il nous reste � consid�rer maintenant.
����������� Par la contemplation. � D�lib�r�ment, de plein propos, choisissant son heure qu�il ne variera point, l�aspirant qui travaille � discipliner son caract�re contemplera, de jour en jour, l�id�al qu�il a construit. Il fixera sur lui sa pens�e, et sa conscience le reflétera sans cesse. De jour en jour il reviendra sur les traits de l�id�al aim�; de jour en jour il m�ditera sur lui dans sa pens�e. Et � mesure qu�il contemplera, il sentira na�tre en son coeur, in�vitablement, ce respect et cette notion sainte qui marquent l�adoration, la grande puissance transformatrice par o� l�homme devient lui-m�me ce qu�il adore. Et cette contemplation sera essentiellement celle qui v�n�re en m�me temps qu�elle aspire. � mesure que l�homme contemplera, les rayons de l�Id�al Divin descendront sur lui, pour les recevoir, son aspiration� ouvrira les portes de l��me. En sorte que ces rayons l�illumineront int�rieurement et projetteront ensuite leur lumi�re en dehors, l�Id�al lumineux planant sans cesse en lui et au-dessus de lui, et marquant le sentier qu�il doit suivre.
����������� Afin de pouvoir contempler ainsi, l�homme doit s�entra�ner � la concentration. L�intelligence ne doit pas �tre dispers�e comme elle l�est trop souvent. Il faut apprendre � la fixer et � la fixer fermement. Cette fixation de la pens�e doit �tre pour nous l�objet d�un exercice continuel. Il faut y travailler � travers toutes les occupations banales de la vie journali�re. Pour cela, il suffit de nous appliquer � faire toujours une seule chose � la fois, jusqu�� ce que notre cerveau ob�isse docilement � notre volont�; il suffit d�accomplir chacun de nos devoirs� avec toute la force de notre intelligence concentr�e sur un point unique. Vous objecterez sans doute, que la plupart de vos occupations sont triviales. Peu importe. L�entra�nement qui fera de vous un disciple ne tient pas � la nature m�me des choses que vous faites, mais seulement � la mani�re dont vous les faites. Ce qu�il faut prendre en consid�ration, ce n�est pas le genre de travail qui vous est d�volu dans le monde ; c�est la m�thode que vous apportez � ce travail, la pens�e que vous y consacrez, les forces que vous y appliquez, l�entra�nement que vous en retirez. Encore une fois, peu importe ce qu�est votre vie; vous pouvez la faire servir, telle quelle, � votre entra�nement. Quelque triviale que puisse �tre � vos yeux l�occupation du moment, vous pouvez l�employer comme un terrain d�entra�nement pour votre pens�e. Quelque soit l�objet qui vous occupe actuellement, vous pouvez, par votre attention soutenue, donner � votre esprit l�habitude de la concentration spontan�e.� Et souvenez-vous qu�une fois la facult� acquise, vous serez libres de l�appliquer comme bon vous semblera. D�s que vous aurez appris � tenir votre pens�e fermement en main, vous pourrez l�orienter � volont� et choisir librement l�objet sur lequel ses forces seront concentr�es.
����������� Mais en attendant, vous pouvez vous exercez et acqu�rir cette ma�trise de la pens�e, dans les petites choses tout aussi bien que dans les grandes. En fait, vous le pouvez m�me beaucoup mieux, parce que les petites choses vous entourent � toute heure, tandis que les grandes ne se pr�sentent que rarement. En pr�sence d�une grande chose l�esprit rassemble, d�instinct, toutes ses forces; en pr�sence d�une grande chose, toutes les �nergies de l��me sont appel�es � agir, afin qu�elle puisse aborder dignement la noble t�che qui la r�clame. Mais la valeur r�elle de l��me se r�v�le plut�t dans les petites choses o� rien n�excite l�attention, o� nul applaudissement ne nous attend, o� l�homme travaille d�lib�r�ment pour la fin qu�il s�est choisie et emploie tout ce qui l�entoure comme moyen de se discipliner.
����������� Cette discipline que l�homme s�impose est la clef de toute la m�thode. Organisez votre vie suivant un plan d�termin�. �tablissez pour vous-m�mes certaines r�gles auxquelles votre existence se conformera; puis, ces r�gles une fois �tablies, suivez-les. Si vous croyez devoir les modifier, modifiez-les d�lib�r�ment comme vous les avez d�abord �tablies. Prenez une chose toute simple : par exemple, une r�gle fixe pour vous lever le matin (une telle r�gle a son importance, car le corps doit, lui aussi, �tre gouvern�). Fixez l�heure que vous croyez �tre la meilleure pour votre travail, l�heure qui s�adapte le mieux � l�organisation de votre vie domestique. Une fous cette heure fix�e, maintenez-la.� Ne permettez pas au corps de choisir son heure sous l�impulsion du moment, mais habituez-le � cette ob�issance instantan�e et automatique, qui peut, seule, en faire un serviteur utile de l�intelligence. Si, apr�s quelque temps de pratique, vous trouvez que votre choix est mauvais, changez. N�allez pas tomber dans le rigorisme sous pr�texte de fortifier votre volont�. Soyez toujours pr�t � changer ce qui ne convient pas, mais changez-le � l�heure qui vous convient, et de propos d�lib�r�. Ne le changez pas sous l�influence de la passion, de l��motion ou de quelque d�sir corporel. Ne le changez pas sur la demande de la nature inf�rieure qui doit �tre ma�tris�e.� Mais changez-le si vous trouvez que vous avez mal choisi. Car jamais les r�gles impos�es � votre propre vie ne doivent �tre une g�ne pour ceux qui vous entourent; jamais il ne faut choisir, pour vous discipliner, des m�thodes susceptibles d�impatienter ou de g�ner les autres au lieu d��tre limit�es � votre propre entra�nement.
����������� La m�thode � employ� dans la construction du caract�re une fois nettement comprise, il vous restera � �tudier le caract�re lui-m�me. Car il faut travailler non pas aveugl�ment, mais en connaissance de cause. Afin de juger votre propre caract�re, vous agirez peut-�tre sagement en consid�rant quelques-unes des qualit�s que de grands hommes vous proposent, qualit�s dont l�ensemble forme l�esquisse d�un caract�re susceptible de vous conduire au seuil m�me du Temple.� Prenez, par exemple, l�esquisse que Shri Krishna� donne � Ardjouna dans le XVIième chapitre de la Bhagavad G�ta ,� alors qu�il lui explique les qualit�s n�cessaires � la formation du caract�re divin. Vous pouvez prendre cette description comme un mod�le � suivre dans votre propre construction.� Il y a l� une liste de qualit�s qui pourraient faire l�objet de votre pens�e et de votre effort constant. Et souvenez-vous ici que le caract�re se construit d�abord par la contemplation de la vertu, puis par la mise en oeuvre, dans la parole et dans l�action de la vie quotidienne, de cette vertu, devenue partie int�grante de la pens�e.
���������Voici donc cette liste (quelque immense qu�elle puisse sembler, vous avez tout le temps de la remplir ) : � L�absence de toute crainte, la puret� du coeur,� la constance dans le Yoga de la Sagesse, la charit�, la ma�trise de soi,� le sacrifice et l��tude des �critures, l�aust�rit� et la franchise, la v�racit�, l�absence de col�re, le renoncement, la paix, l�absence de calomnie, la compassion envers les �tres vivants, l�absence de tout d�sir, la douceur, la modestie,� l�absence de caprice, l�audace, la cl�mence, la magnanimit�, la droiture, l�affection, l�absence de tout orgueil. � voil� ce qui devient l�apanage de celui qui na�t avec les qualit�s divines. �
����������� Ces vertus ne lui appartiennent pas d�embl�e, mais elles deviennent son apanage, et cela, par la construction du caract�re. Et si vous relisez cette liste avec soin, dans un moment de loisir, vous verrez que l�on peut grouper ces vertus en des cat�gories nettement d�termin�es, et que chacune peut �tre pratiqu�e, bien imparfaitement d�abord, mais n�anmoins avec constance, de jour en jour, sans jamais se d�courager parce qu�on ne r�ussit point. Seule, doit subsister la joie de sentir que le but est l�, de savoir que chaque pas est un pas vers une fin qui sera n�cessairement r�alis�e. Et remarquez comme � travers toute cette trame sont tiss�s les fils d�or du d�sint�ressement, de l�amour, de l�innocence; voyez comment le courage, la force, l�endurance� y trouvent aussi leur place, donnant au caract�re un �quilibre exquis. C�est un caract�re fort et tendre � la fois, audacieux et compatissant, un caract�re puissant et immuable, et pr�t � se d�vouer� au secours des faibles, un caract�re rempli de d�votion et de puret�, un caract�re disciplin�, et par suite harmonieux.
����������� Supposons que vous acceptiez un tel caract�re comme id�al destin�e � guider votre pens�e de chaque jour, et que vous commenciez � le mettre en oeuvre dans ces d�tails. Consid�rons un point qui se pr�sente fr�quemment au cours de cet effort, un point qui r�sume � lui seul plusieurs autres vertus et donne lieu � bien des malentendus. Consid�rons un instant cette vertu collective, et voyons quel sera son r�le dans la construction du caract�re. Cette vertu porte un nom qui rend un son �trange aux oreilles occidentales : c�est l�indiff�rence . On l��nonce parfois, d�une mani�re plus d�taill�e, comme indiff�rence au plaisir et � la douleur, indiff�rence au chaud et au froid, indiff�rence � la louange ou au bl�me, indiff�rence au d�sir et � l�aversion, et ainsi de suite. Que signifie donc r�ellement cette indiff�rence..
����������� Avant toute chose, elle signifie ce sentiment de la relativit�, qui s�introduit n�cessairement dans la vie de quiconque a entrevu le R�el parmi les choses qui passent, la Lumi�re �ternelle cach�e au sein des ombres �ph�m�res.� L�immensit� du but une fois comprise, la multiplicit� des existences humaines une fois admise, lorsque l�aspirant con�oit qu�il a devant lui l��ternit�, lorsqu�il comprend toute la grandeur de la t�che � accomplir et tout l�infini des possibilit�s qui l�attendent, encore cach�es sous le voile myst�rieux de l�avenir; lorsque l�homme a entrevu la lumi�re du R�el, toutes les choses d�une courte vie doivent prendre la place qui leur revient en proportion avec le tout.. Aussi, lorsqu�une �preuve se pr�sentera, cette �preuve ne semblera plus aussi grave qu�au jour o� l�homme n�envisageait qu�une existence unique. Car il commencera � comprendre qu�il a travers� d�j� bien des �preuves, et qu�il n�en est sorti que plus fort et plus paisible. Et lorsqu�une joie se pr�sentera, il saura qu�il a travers� d�j� bien des joies, et qu�� leur �cole aussi il s�est instruit, et qu�entre autres choses elles lui ont appris que leur nature est �ph�m�re. En sorte que, s�il se pr�sente une joie ou une peine, il les acceptera; loin de leur �tre insensible, il les sentira beaucoup plus vivement que l�homme ordinaire du monde ne peut sentir. Mais il les sentira � leur vraie place, il les estimera � leur r�elle valeur dans le vaste ensemble de sa vie.
����������� � mesure que l�homme se perfectionne en cette indiff�rence, il ne faut pas croire qu�il devienne insensible, il les sentira beaucoup plus vivement que l�homme ordinaire du monde ne peut sentir. Mais il les sentira � leur vraie place, il les estimera � leur r�elle valeur dans le vaste ensemble de sa vie.
����������� � mesure que l�homme se perfectionne en cette indiff�rence, il ne faut par croire qu�il devienne insensible. Au contraire, il ressent de plus en plus nettement les moindres fr�missements de la vie en lui et hors de lui. Puisqu�il s�harmonise de plus en plus avec le Tout, il doit n�cessairement devenir plus sensible � chaque nuance d�harmonie que ce Tout renferme. Mais pas une de ces vicissitudes n�est capable de l��branler, pas une d�entre elles n�est capable d��branler sa s�r�nit� parfaite, car sa vie r�elle prend racine en un lieu o� il n�y a point de temp�tes, en un lieu que nul changement ne peut atteindre; et tout en restant sensible aux modifications,� jamais plus sa volont� ne peut �tre influenc�e par elles. Toute chose prend la place qui lui revient, en proportion avec le cycle immense de la vie de l��me.
����������� Cette indiff�rence, cette r�elle indiff�rence qui est synonyme de �force , comment la d�velopperez-vous ?
����������� Vous la d�velopperez d�abord en m�ditant journellement, suivant la m�thode d�j� indiqu�e, sur la signification de cette vertu : en l��tudiant trait par trait jusqu�� ce que vous la compreniez parfaitement, en �tudiant d�tail par d�tail de mani�re � savoir exactement� ce qu�elle repr�sente � vos yeux. Ensuite, - quand vous vous m�lerez � vos semblables � en la mettant en pratique dans votre vie quotidienne. Vous la mettrez en pratique, non pas en devenant durs, mais en faisant cro�tre en vous la sympathie; non pas en vous entourant d�une cuirasse qui tient tout � distance, mais en arrivant � r�pondre aux moindres vibrations du dehors. En m�me temps vous conserverez un �quilibre int�rieur qui se refusera� � se laisser influencer, alors m�me que la secousse se ferait sentir jusqu�au fond.
����������� C�est l� une le�on p�nible et difficile, mais une le�on qui donne tant d�espoir et de joie, un tel regain d�intensit� et d�activit� vitales que, pour ces avantages seuls, il vaudrait la peine de l�apprendre. Car l�Âme se sentant devenir trop forte pour pouvoir �tre �branl�e tout en restant sensible � chaque vibration de l�ext�rieur, voit sa vie s��largir merveilleusement; elle voit l�harmonie devenir plus compl�te, elle voit sa conscience toujours grandir et toujours plus s�affirmer son identit� avec l�ensemble dont elle fait partie. � mesure que s��vanouit le sentiment d�isolement, l�Âme est inond�e de la joie qui r�side au coeur des choses et, là m�me o� l�homme du monde voit des peines il n�y a plus rien, pour le disciple, de p�nible.� Car ces peines il les sent, en quelque sorte, comme faisant partie de la Vie Universelle. Elles ne sont pour lui qu�une syllabe dans l�immense langage de la Manifestation. Il peut en apprendre le sens, le coeur libre de souffrance; car la paix, fruit de son savoir grandissant, le compense et au-del� : elle transforme, pour ainsi dire, son attitude � l��gard de toutes ces exp�riences du monde ext�rieur envisag�es par les hommes comme des souffrances et des pertes. Pensant et agissant de la sorte, vous verrez ce sentiment cro�tre en vous � ce sentiment de calme, de paix, de s�r�nit�. Aussi vous semblera-t-il �tre dans un lieu paisible, quelle que soit la temp�te du monde ext�rieur. Vous verrez et sentirez la temp�te mais n�en serez pas �branl�.
����������� Paix intime et profonde que jamais rien ne trouble, voil� les pr�mices de la Vie Spirituelle. Elle se manifeste d�abord par la paix, puis par la joie de l��me, et fait de la vie du disciple un d�veloppement continu don le but est d�aller toujours plus haut, toujours plus avant jusqu�au coeur m�me des choses, qui est Amour.� Ceci fait na�tre le sentiment que nous sommes ma�tre de nous-m�me, que le Soi en nous est plus fort que les changements ext�rieurs. Le Soi veut que les contacts ext�rieurs trouvent un �cho en lui, mais il ne veut pas se laisser troubler par eux. Alors, de l�empire sur soi-m�me et de l�indiff�rence, na�t cette facult� de ne ha�r personne, facult� sur laquelle il est tant insist� au cours de la construction du caract�re demand�e � l�aspirant qui voudrait devenir disciple. On ne doit rien ha�r. Tout doit �tre ramen� dans le cercle de l�Amour. Peut importent les dehors les plus repoussants : au coeur de toutes choses sont la Vie et l�Amour. Aussi, l�aspirant qui s�instruit ne saurait-il rien exclure du cercle de la compassion. Tous les �tres y �tant admis en tenant compte de la sensibilit� par eux acquise, il devient leur ami � tous, il aime tout ce qui est dou� de vie et de sensibilit�.
����������� En faisant entrer de telles pierres dans la construction de son �difice moral, l�aspirant devient intr�pide; intr�pide, car, ne ha�ssant rien, rien ne peut lui faire du mal. Le mal qui nous vient de l�ext�rieur n�est que la r�action de ce qu�il y a en nous d�agressif. Nous sommes les ennemis des autres, voil� pourquoi ils sont, � leur tour, nos ennemis. Nous allons de par le monde en infligeant le mal, voil� pourquoi les �tres vivants nous font le mal en retour. Nous qui devrions aimer les �tres, nous promenons partout la destruction, la tyrannie et la haine, recherchant nos semblables pour les tyranniser et non pour les former � comme si la t�che de l�homme ici-bas n��tait pas de former ses fr�res plus jeunes et d�employer � leur rel�vement toute sa tendresse et toute sa compassion. Nous allons de par le monde en tyrannisant les autres, hommes ou brutes, d�s qu�ils sont plus faibles que nous � que dis-je, leur faiblesse m�me donne souvent la mesure de notre tyrannie, et leur d�bilit� la mesure du fardeau que nous leur imposons. Et nous somme surpris que les cr�atures vivantes nous fuient � que dans le monde, nous sommes accueillis par la crainte des faibles, par la haine des forts ! Nous ignorons, dans notre aveuglement, que toute la haine du monde ext�rieur est le reflet du mal qui est en nous et que, pour le coeur aimant, il n�est rien de ha�ssable � rien par cons�quent qui puisse nuire. L�homme en qui est l�amour peut marcher sans danger � travers la jungle, il peut entrer sans �tre attaqu� dans le rep�re des fauves ou prendre en ses mains le serpent. Car le coeur o� tout est amour ne voit de haine nulle part. L�amour qui envoie ses rayons dans le monde et attire � lui toutes choses pour les servir et non pour leur faire du mal, �veille en toutes choses, par cette attraction, l�amour et non la haine. Voil� pourquoi le tigre se roule, en ami, aux pieds du Yogi, aux pieds du saint, la b�te la plus sauvage d�pose ses petits, lui demandant abri et secours; voil� pourquoi tous les �tres vivants viennent � l�homme qui aime, car tous sont d�origine divine. Le Divin est Amour et quand ce principe est devenu parfait dans l�homme, il attire � lui toutes choses. Nous apprenons donc graduellement et lentement � marcher sans crainte, bien que nous puissions avoir encore des souffrances � subir. Car, - nous le savons, - si l�on nous fait du mal, c�est seulement que nous payons la dette d�un pass� mauvais; avec le paiement de chaque dette, nous sentons diminuer ce qui est, en quelque sorte, notre passif inscrit au grand livre de la Nature.
����������� Nous serons sans crainte aussi parce que nous arriverons � savoir, et que la crainte na�t du doute aussi bien que de la haine.� L�homme qui sait �a laiss� le doute en arri�re et marche d�un pas assur� l� o� il sait pouvoir marcher; son pied ne rencontre qu�un terrain solide et il n�y a point de pi�ge sur son chemin. Il en r�sulte une volont� bas�e sur le savoir et rendue confiance par l�amour. En traversant l�Enceinte Ext�rieure, le pas de l�aspirant devient plus ferme, sa d�cision plus in�branlable et plus forte. Le caract�re commence � pr�senter un aspect d�fini, clair et distinct, car l�Âme approche de sa maturit�.
����������� Alors vient l�absence de d�sirs, le d�tachement graduel de toutes les cha�nes qui nous lient au monde ext�rieur, l��limination progressive de toutes les convoitises que l�exp�rience des vies pass�es nous a montr�es comme incapables de satisfaire notre �me; alors vient la cessation du d�sir personnel et l�identification graduelle de nous-m�mes avec le tout. Car cet aspirant qui se d�veloppe ne veut plus se laisser lier aux r�incarnations par des liens terrestres. Les hommes reviennent sur la terre parce qu�ils y sont retenus, li�s par cette cha�ne de d�sirs qui les attache � la roue des naissances et des morts. Mais l�homme dont nous parlons entend devenir libre. L�homme qui va �tre libre doit briser lui-m�me cette cha�ne des d�sirs. Une seule chose peut le lier encore, une seule chose peut le ramener en incarnation : l�amour de ses semblables, le d�sir de les servir. Il n�est pas attach� � la roue, car il est libre � mais il peut revenir afin de tourner une fois de plus la roue de l�amour de ceux qui y sont li�s, afin de rester aupr�s d�eux jusqu�� ce que toutes les Âmes aient bris� leurs entraves. En devenant libre, il brise les liens de la n�cessit�. Il apprend ainsi le d�sint�ressement parfait, car l�exp�rience lui montre que ce qui est bon pour tous est pr�cis�ment ce qu�il cherche lui-m�me, et que son but personnel et le bien de l�Ensemble sont identiques. Puis il apprend � compter sur lui-m�me. Cet homme qui s��l�ve vers la lumi�re apprend � devenir fort afin de pouvoir aider autrui; il apprend � compter sur le Soi en lui-m�me, qui est le Soi de tous, et avec lequel, en se d�veloppant, il tend � s�identifier de plus en plus.
����������� Il est une �preuve que l�aspirant doit affronter et dont il faut dire quelques mots, car elle constitue peut-�tre une des phases les plus p�nibles dans la travers�e de l�Enceinte Ext�rieure. En p�n�trant dans cette Enceinte, connaissant et voyant l�immense joie qui est au-del�, il s��tait d�tourn� de bien des objets qui font, pour ses semblables, le charme de la vie.� Mais il arrive parfois pour l�Âme un moment d�angoisse p�nible, o�, s��tant en quelque sorte �lanc�e dans le vide, aucune main ne semble tenir la sienne, o� l�obscurit� l�enveloppe et o� ses pieds ne rencontrent plus d�appui. Il y a des moments, dans ces phases de la croissance de l�Âme, o� rien de terrestre ne peut plus la contenter, o� les vieilles amiti�s sont moins vives, o� les joies de ce monde ont perdu toute leur saveur, o� nous ne sentons pas encore � bien qu�elles nous tiennent � les mains qui nous attendent, o� le roc sous nos pieds � bien que nos pieds s�y posent � ne nous appara�t pas encore comme immuable et fixe, o� l�Âme, couverte encore d�un voile �pais d�illusion, se croit d�laiss�e et ne sait � qui demander du secours. C�est le vide o� tout aspirant a d� plonger � son tour; c�est le vide que tout disciple a franchi. Quand il s�ouvre, b�ant devant l�Âme, l�Âme recule. Quand il appara�t � obscur et insondable en apparence � l�aspirant, debout sur le bord, recule �pouvant�. Et pourtant cette crainte est sans raison. Jetez-vous hardiment dans le vide et vous y trouverez la pl�nitude ! �lancez-vous dans les t�n�bres et vous trouverez le roc sous vos pieds ! L�chez les mains qui vous retiennent, et des Mains plus puissantes saisiront les v�tres et vous tireront en avant. Ces Mains-l� ne vous abandonneront jamais. Les �treintes terrestres faiblissent quelquefois, la main d�un ami peut s��chapper de la votre et la laisser vide, mais les Amis qui sont sur l�autre bord ne l�chent jamais prise, quelles que soient les vicissitudes terrestres.� Vous trouverez que votre solitude est la plus grande des illusions et que cette obscurit� est une lumi�re qui ne s��teindra plus pour vous. Cette �preuve, une fois franchie, semblera compl�tement illusoire; et le disciple, s�il ose s��lancer, se trouvera sain et sauve sur l�autre rive.
����������� Ainsi se poursuit la construction du caract�re. Elle se continuera � travers les vies � venir, de plus en plus noble � chaque vie nouvelle. Ces premi�res assises sont simplement les fondations de l��difice que je vous ai fait entrevoir; et si l�entreprise para�t immense, c�est que, dans l�imagination de l�architecte, l��difice est toujours complet. D�s les premi�res lignes du plan, l�imagination voit l��difice termin� et conna�t le but vers lequel elle travaille.
����������� Et la fin ? Ah ! La langue humaine est impuissante � d�crire la fin de cette construction du caract�re. Les couleurs sombres de la terre ne peuvent donner la moindre id�e de la beaut� de cet Id�al parfait que nous esp�rons atteindre � que dis-je, que nous savons devoir atteindre un jour. Vous est-il jamais apparu, dans les heures silencieuses ? En avez-vous jamais aper�u un reflet dans la paix de la terre et dans le calme du ciel ? Avez-vous jamais entrevu ces Figures divines, vivantes et agissantes � ces �tres qui furent des hommes mais sont maintenant plus que des hommes, surhumains dans Leur majest� � exemple de ce que deviendra l�humanit� mais de ce qu�elle n�est pas encore, sauf dans les derni�res Enceintes du Temple ?
����������� Si vous avez jamais eu cette vision dans vos instants de plus profond silence, toutes mes paroles sont inutiles pour la d�crire. Vous connaissez la comparaison qui semble d�abord constituer l��tre tout entier, dans sa radieuse perfection, dans sa glorieuse divinit�; la tendresse, immense au point de s�abaisser jusqu�aux plus petits et de planer au-dessus des plus grands, tendresse � qui n��chappent ni l�effort le plus faible ni le plus grandiose succ�s, tendresse plus profonde, en v�rit�,� pour les faibles que pour les forts, puisque les faibles ont un plus grand besoin d�aide et de sympathie constante; l�amour dont le caract�re si parfaitement humain voile seule la nature divine, l�amour qui nous fait sentir qu�en Eux homme et Dieu sont un.
����������� Et derri�re la tendresse, la force, - la force que rien ne peut alt�rer, la force qui participe � la nature des fondements m�mes de l�Univers, et qui pourrait servir de base aux mondes sans� �tre �branl�e. Force infinie jointe � une compassion sans limites � comment ces qualit�s peuvent-elles se rencontrer en un seul �tre dans une harmonie aussi parfaite ! Puis la joie radieuse, la joie triomphante qui voudrait partager avec tous sa b�atitude, le soleil rayonnant qui ne conna�t point d�ombre, la gloire de la conqu�te achev�e qui promet � tous la victoire, la joie d�une vision qui voit plus loin que la souffrance, et sait, en pr�sence m�me de la douleur, que tout finira dans la paix.
����������� Tendresse, force, joie, paix ineffable � paix d�un lac tranquille, s�r�nit� que rien ne peut troubler : - voil� quelques traits de l�Id�al que nous r�aliserons un jour en nous. Si nous osons porter nos regard � ces hauteurs, c�est que Leurs Pieds foulent encore la terre o� nous marchons nous-m�mes. Ils se sont �lev�s bien au-dessus de nous, mais ne s�en tiennent pas moins aux c�t�s de Leurs fr�res. Ils nous surpassent, mais ne nous ont pas abandonn�s pour cela, bien qu�� tous �gards, Ils �chappent � notre entendement. Car toute l�humanit� trouve place dans le coeur du Ma�tre, et l� o� est l�humanit�, nous, ses enfants, pouvons penser sans crainte � notre pr�sence.
����������� Les trois conf�rences pr�c�dentes ont eu pour objet les progr�s, simultan�ment r�alis�s, par lesquels l�aspirant doit, pour p�n�trer dans le Temple, se purifier graduellement, ma�triser ses pens�es et construire son caract�re ou, plus exactement, en poser les fondements. Telles sont les trois phases que nous avons consid�r�es. Nous avons vu que tout homme, en entrant dans l�Enceinte Ext�rieure et en prenant pour objectif la grande t�che, doit faire ces diff�rents efforts parall�lement plut�t que successivement, cherchant, petit � petit, � ma�triser sa nature en l�employant � la poursuite du but qu�il se propose d�atteindre.
����������� Ayant pris successivement ces trois phases� - il le fallait pour plus de clart� � supposons que notre candidat tourne maintenant son attention vers une autre partie de sa grande t�che. J�ai donn� � cette partie le nom d�Alchimie Spirituelle, entendant par ce terme un processus de transformation, de transmutation � allusion �vidente , � l�oeuvre de l�Alchimiste qui fait d�un m�tal de peu de valeur un m�tal plus noble, qui change par exemple le cuivre en or. La transmutation dont je veux parler s�op�re dans le monde, autour de nous; elle s�op�re dans une certaine mesure, j�imagine, dans l�esprit et dans la vie de toute personne r�fl�chie et religieuse. Seulement, comme je l�ai si souvent r�p�t�, elle est consciente et volontaire chez notre candidat qui voit les moyens et le but, et s�applique de propos d�lib�r� � l�accomplissement de son d�sir.
����������� Ce processus d�alchimie spirituelle peut �tre regard�, dans le sens le plus g�n�ral du terme, comme une transmutation de forces. Tout homme poss�de la vie, l��nergie, la vigueur, la puissance de volont� et ainsi de suite. Voil� les forces qui doivent lui servir d�instruments � voil� les �nergies qui lui feront atteindre son but. En vertu d�un processus qu�on peut bien appeler alchimique, il transmue ces forces en les appliquant � des fins plus hautes; il les transmue, d��nergies grossi�res qu�elles �taient en �nergies purifi�es et spiritualis�es. Ce n�est pas seulement qu�il change leur objectif � ou que le changement d�objectif soit le point que j�entends faire ressortir ici; - c�est plut�t qu�il change et purifie les forces elles-m�mes sans alt�rer cependant leur nature essentielle. Tel l�alchimiste, prenant une mati�re grossi�re et lui faisant subir un processus de purification intime. Il ne se contente pas d�en �liminer les impuret�s ext�rieures mais, poussant la purification beaucoup plus loin, il prend le m�tal lui-m�me et le ram�ne � un �tat plus subtil � pour faire entrer ensuite ces �l�ments dans la composition d�un type plus noble et plus quintessenci�. Vous pouvez donc vous repr�senter l�alchimiste spirituel prenant toutes les forces de sa nature, les reconnaissant comme des forces et sachant par cons�quent leur utilit� et leur n�cessit� � mais les changeant, les purifiant et les affinant m�thodiquement. Nous allons �tudier la mani�re dont l�affinage s�op�re, la mani�re dont le but peut �tre atteint.
����������� L�alchimie spirituelle n�a pas seulement pour objet cette transmutation de forces, bien que ce soit l� son but principal. Elle en a un autre, secondaire, dont il faut tenir compte. Les �mes sont li�es � l�existence terrestre, � la roue des naissances et des morts, par leurs d�sirs. Elles y sont maintenues par l�ignorance � encha�n�es par leur convoitise des jouissances mat�rielles, des joies go�t�es dans la s�paration et dans l�ignorance.� Toujours agissante, l�Âme se lie elle-m�me par ses actions. Qu�elles soient bonnes ou mauvaises, secourables ou malfaisantes � toujours elles pr�sentent, chez l�homme ordinaire, un caract�re commun : elles ont leur source dans le d�sir, et c�est le d�sir qui lie l�homme et qui l�encha�ne.
����������� D�autre part, l�action elle-m�me continuera � �tre indispensable tant que l�homme restera dans le monde. L�action est n�cessaire; sans elle, plus de manifestation. A mesure qu�un homme grandit en noblesse, en sagesse et en force, son action devient un facteur de plus en plus important dans le progr�s du monde. Si les hommes les plus �volu�s renon�aient � l�action, le progr�s de notre race en serait ralenti et son �volution in�vitablement retard�e.
����������� Comment sera-t-il donc possible que l�action s�accomplisse et que l�Âme reste libre ? � C�est ici encore, un� cas d�alchimie spirituelle. Gr�ce � elle, l�homme le plus avanc� agira, pour servir le monde, avec une activit� supr�me � mais son service ne l�engagera pas, car il est une Âme lib�r�. Voil� un exemple de ce qui semble paradoxal � premi�re vue : un service laissant parfaitement libre celui qui le rend. Or, en parlant d�une alchimie spirituelle qui assure cette libert�, j�entends simplement faire allusion � la Loi fondamentale du Sacrifice � Loi supr�me qui, dans l�univers manifest�, est � la base de tout, constamment proclam�e; Loi dont les formes sont si vari�es qu�il est ais� de la m�conna�tre, et dont l�action est si complexe qu�elle rend les erreurs faciles. L�erreur la plus facile � commettre consiste peut-�tre dans le choix m�me des expressions, car nous avons affaire � une v�rit� � faces multiples qui, surtout, offre un double aspect suivant qu�on la consid�re d�en haut ou d�en bas. Elle constitue une Loi universelle, gouvernant � on peut le dire � chaque atome. Elle est, dans toute la force du terme, l�expression de la Vie Divine manifest�e.
����������� En effleurant un sujet pareil, les occasions d�erreurs sont innombrables : erreurs de termes pour celui qui parle, erreurs d�interpr�tation pour les auditeurs qui ne peuvent saisir une pens�e imparfaitement pr�sent�e. Aussi, dans cette �tude, risque-t-on fort de se montrer partial suivant l�aspect qui, sur le moment, occupe plus particuli�rement l�esprit � suivant qu�on se place au point de vue de la Mati�re ou au point de vue de l�esprit ; suivant que de l�ext�rieur on regarde le centre, ou que du centre on se tourne vers l�ext�rieur. Lorsqu�on veut �tudier un sujet immense, faisant na�tre des pens�es qu�aucune parole ne peut exprimer � un sujet dont la seule conception est � peine abordable pour des �tres peu d�velopp�s comme nous � il est extr�mement malais�, pour celui qui parle comme pour celui qui �coute, d��viter les malentendus, d��viter de sacrifier un point de vue � un autre, perdant par l� cet �quilibre qui seul peut exprimer parfaitement la v�rit�. C�est peut-�tre sp�cialement le cas en ce qui concerne la Loi du Sacrifice. Envisageons-la d�abord dans son aspect inf�rieur Il n�est pas � n�gliger car il a beaucoup � nous apprendre, bien que, dans tous les mondes, son caract�re d�inf�riorit� apparaisse nettement. Envisageons d�abord la Loi telle que nous la trouvons exprim�e dans la Nature manifest�e, empreinte sur la face du Cosmos, agissant dans les mondes physique, astral et mental � impliquant, non seulement une certaine relation entre les �tres vivants tels que nous les connaissons ici-bas, mais aussi un rapport avec d�autres �tres vivants appartenant aux mondes qui nous entourent. Arr�tons-nous un instant sur cet aspect inf�rieur avant de vouloir nous �lever plus haut, car, ici encore, nous apprendrons une le�on pr�cieuse et f�conde en lumi�res qui nous aideront � traverser l�Enceinte Ext�rieure.
����������� Le sacrifice, dans les mondes inf�rieurs, pourrait assez exactement se d�finir comme un �change de services mutuels, une rotation continuelle de la roue de l�existence, dans laquelle chaque �tre re�oit et donne � ne peut pas �viter de recevoir et ne doit pas refuser de donner. Le sacrifice � si vous l�envisager un instant dans ce que j�ai appel� son aspect inf�rieur � vous appara�tra donc comme la rotation continuelle de la roue de l�existence. Toutes choses y prennent part, consciemment ou non. Le caract�re conscient de leur coop�ration sera en raison direct de leur d�veloppement. Cette mani�re d�envisager le sacrifice a �t� clairement exprim�e, plus clairement peut-�tre que partout ailleurs, dans le Chant du Seigneur [Bhagavad Git�] , un des livres sacr�s de l�Inde, qui parle de cette roue de l�existence et o� vous trouvez le sacrifice et l�action associ�s d�un fa�on qu�il est bon de conna�tre. Le grand Ma�tre dit :
Le monde est li� par toute action ayant un but autre que le sacrifice. C�est avec le sacrifice pour but et libre de tout attachement, � fils de Kounti, que tu dois agir.
����������� Puis, remontant dans le pass� pour compl�ter le cycle du sacrifice par service mutuel, le Ma�tre ajoute :
Ayant, dans les temps anciens, par un acte de sacrifice, fait �maner l�humanit� hors de lui-m�me, le Seigneur de l��manation dit : � Que votre propagation soit par l� assur�e; que ce soit l� pour vous le Kamaduk (c�est-�-dire le lait du d�sir ); vous en nourrirez les Dieux, puissent les Dieux vous en nourrir. Vous nourrissant ainsi mutuellement, vous recueillerez le bien supr�me. Car, nourris par le sacrifice, les Dieux vous accorderont la jouissance de ce que vous d�sirez. � - En v�rit�, c�est un voleur celui qui jouit de Leurs dons sans rien Leur rendre. Les cr�atures subsistent par la nourriture; la nourriture proc�de de la pluie; la pluie na�t du sacrifice, le sacrifice a sa source dans l�action. Sache que l�action proc�de de Brahma et que Brahma proc�de de l�Imp�rissable. Brahman, qui p�n�tre toutes choses, est donc toujours pr�sent dans le sacrifice. Celui qui ne suit point ici-bas ce mouvement circulaire de la vie, p�che dans sa mani�re de vivre et, sensuellement heureux, cet homme, � fils de Prith�, m�ne une vie inutile [Bhagavad Git�, lll,� 9-16, ].
����������� Vous avez l� cette roue de la vie qui constitue dans toutes les religions la base du sacrifice. Plus est pure, plus est �lev�e la religion, plus pure et plus �lev�e sera l�id�e de sacrifice dont elle est impr�gn�e. Remarquez � quel point nous trouvons r�alis�e ici l�id�e alchimique de toujours transformer. La nourriture se transforme en �tres; mais pour que la nourriture puisse exister, la pluie a �t� transform�e en nourriture; pour que la pluie p�t tomber, le sacrifice a �t� offert aux Dieux; - alors les Dieux nourrissent. Vous trouverez ce mouvement circulaire partout mis en �vidence dans ces antiques religions. Le Brahmane, par exemple, jette dans le feu son sacrifice, car, est-il dit, Agni est la bouche des Dieux. Or, jadis, l�acte de jeter ce sacrifice dans le feu � accompagn� qu�il �tait de Mantras compos�s par des hommes qui savaient et donnaient aux paroles du Mantra [Le � mantra � est la formule d�invocation qui accompagne l�acte de sacrifice. Les paroles sacramentelles de la religion chr�tienne sont ce que l�Hindou appellerait des mantras.] une influence sur les forces inf�rieures de la nature � cette mani�re de sacrifier r�gularisait beaucoup de ces forces naturelles qui, agissant sur la terre, produisent les aliments de l�homme. Bien que l�acte lui-m�me f�t un symbole, ce qu�il symbolisait �tait r�el, et la force qui proc�dait des l�vres du pr�tre purifi�, de l�homme de pouvoir, �tait r�elle aussi. Le symbole devait enseigner au peuple ce mouvement circulaire de la vie, lui faire comprendre que l�action� est , dans son essence, un sacrifice et que toute action� doit �tre de la nature du sacrifice; - en d�autres termes qu�il faut accomplir l�action parce que cela est bien et sans autre motif; qu�il faut l�accomplir pour mettre l�homme en harmonie avec la loi; qu�il faut l�accomplir parce que c�est la r�ponse de l��tre � la loi et sa part dans la t�che commune.
����������� D�apr�s cette doctrine, le sacrifice constituait donc un lien commun, fil d�or unissant les �tres dans cet univers manifest�. Et l�action �tant la base du sacrifice, l�action proc�dant du Dieu cr�ateur qui se manifeste lui-même dans l�univers, il �tait dit que Brahman �tait pr�sent dans chaque sacrifice. D�s lors toute action pouvait �tre accomplie comme un devoir envers le monde, sans d�sirer de profit individuel, sans d�sirer de gain personnel, sans souhaiter d�obtenir quelque chose pour le � moi � s�par�, - c�est ici �que se trahit le mobile inf�rieur, vil �go�ste, qui pr�sida plus tard aux sacrifices. � Telle est l�essence m�me de cette alchimie qui, en contribuant � faire tourner la roue, en accomplissant le devoir pour l�amour du devoir, transforme l�action en sacrifice, consume les liens du d�sir et lib�re le sage. Ainsi br�l�e dans le feu de la sagesse, l�action n�a plus aucune prise sur l�Âme L�Âme coop�re avec le divin dans la Nature, et chaque action jet�e sur l�autel du devoir devient une force qui fait tourner la roue de la vie, mais n�est plus capable de lier l�Âme
����������� Cet �change constant, ce service mutuel, voil� une forme de la grande Loi du Sacrifice.� La transformation op�r�e et caract�ris�e par le fait, que l�action, accomplie comme un devoir, devient une partie de l�harmonie universelle, fait progresser l��volution, aide nettement � faire avancer la race. Le travail du novice, dans l�Enceinte Ext�rieure, consiste � s�entra�ner graduellement � accomplir tout acte dans cet esprit de sacrifice comprenant clairement qu�il l�accomplit ainsi, en ne cherchant rien, en ne s�attendant � aucun profit, en ne sollicitant aucune r�compense, accomplissant l�acte parce qu�il le doit, sans autre motif. Agir ainsi, c�est vraiment pratiquer l�alchimie spirituelle qui purifie toute action dans le feu de la sagesse; c�est � en se mettant consciemment en harmonie avec la Volont� divine dans l�univers manifest� � devenir une �nergie secondant le progr�s. La race enti�re recueille le b�n�fice d�une action qui, autrement, n�aurait apport� � l�auteur du sacrifice qu�un fruit personnel � et ce fruit, � son tour, e�t �t� pour l�Âme un lien, diminuant ses aptitudes virtuelles au bien. Voil� donc comment se pr�sente le m�canisme de cette loi du sacrifice, envisag�e sous son aspect inf�rieur.
����������� �tudions-la maintenant � un point de vue plus sublime, afin d��viter tout malentendu, j�essayerai de m�exprimer avec d�autant plus de soin, avec d�autant plus d�insistance, que je sais avec quelle facilit� les erreurs peuvent r�sulter d�une exposition incompl�te dont je serais moi-m�me responsable. Je veux ce soir m�arr�ter un moment sur l�essence m�me du sacrifice, et chercher avec vous ce qu�il signifie r�ellement. Il me semble � et c�est l� la pens�e par laquelle je vous demande de commencer � que le sacrifice envisag� dans son essence intime, envisag� � un point de vue qui sera de plus en plus le n�tre � mesure que nous nous �l�verons vers une vie plus divine � que le sacrifice, dis-je, consiste � donner ou � r�pandre au dehors. Il a pour motif le d�sir de donner; son essence est le d�sir passionn� de prodiguer un objet poss�d� � objet pr�cieux aux yeux de son possesseur et que celui-ci veut, pour cette raison, prodiguer afin d�aider et de r�jouir les autres.� Il faut donc envisager le sacrifice dans la nature � au point de vue int�rieur, cette fois, et non sous son apparence externe � comme l�acte de donner, de prodiguer pour faire le bonheur d�autrui. Aussi, le sacrifice est-il essentiellement joyeux et non p�nible, ayant en quelque sorte pour �me la joie du don lui-m�me.
����������� Laissant de c�t�, pour y revenir plus tard, tout ce qui accompagne la gen�se du sacrifice, commen�ons donc par admettre que le sacrifice, consid�r� en lui-m�me, est un don. Ce don est offert par une nature qui d�sir donner, par une nature qui aspire � se r�pandre au dehors, qui voudrait partager avec les autres son bonheur tout entier, n�ayant en cela qu�un seul mobile, cette unique aspiration � se r�pandre elle-m�me dans les autres pour s�unir � eux dans une m�me joie. Mais, me direz-vous, pourquoi dans la joie ? � Parce que je vous ai pri� de me suivre jusqu�au coeur et au centre m�me de la Manifestation. Le sacrifice supr�me, ai-je os� dire ailleurs [Sagesse Antique, chap. x. � La Loi du Sacrifice�.] , a �t� cet acte par lequel l�Existence Unique s�est limit�e, Elle-m�me, par lequel elle a donn� naissance, sous forme d��nergie, au Logos manifest�. Or, je constate, - et c�est assez naturel car, en �tudiant le processus et son action sur l�univers, j�ai trop insist� sur un de ses aspects � je constate, dis-je, que cette mani�re d�envisager le sacrifice a �t� comprise comme impliquant l�id�e d�une � agonie du Logos �, deux mots � mon avis contradictoires. Mais qu�est-ce que le Logos ?� - Brahman manifest�. � Or, nous le trouvons maintes fois r�p�t� dans les �critures anciennes, ayant, � leur tour, pour racine une science plus ancienne encore � que la nature de Brahman est f�licit�. Aucune autre conception n�est possible si vous tentez d�aborder par la pens�e ce qui est au-del� de la manifestation. Brahman est F�licit� � telle est la note tonale de la religion Arienne la plus ancienne. Dans l�ascension de l�homme vers Brahman, l�ultime enveloppe de l�Âme est appel�e l�Enveloppe de F�licit�. �tudiez, d�apr�s le R�ja Yoga de l�Inde, les v�hicules permettant � l�Âme de se manifester dans les diff�rents mondes. Vous verrez qu�en se retirant du monde inf�rieur l�Âme se d�pouille des enveloppes inf�rieures. Elle rejette l�enveloppe corporelle, puis l�enveloppe du d�sir, puis l�enveloppe mentale, puis l�enveloppe de la sagesse.� Et vous verrez que, dans cette ascension continuelle o� elle se rapproche de plus en plus de ce Brahman qui est elle-m�me et retrouve de plus en plus sa nature essentielle � vous verrez qu�enfin il lui reste une enveloppe unique, la plus �lev�e, si subtile qu�elle la diff�rencie � peine de l�Unique, - voile translucide assurant la conservation de l�identit� individuelle, n�cessaire pour contenir enti�rement la r�colte des �ges �coul�s. Cette enveloppe porte un nom ; on l�appelle l�enveloppe de F�licit� [Anandamayakosha]� comme pour rappeler � tous ceux qui, dans ce monde se d�battent dans les liens de l�ignorance � comme pour rappeler � chacun que ces progr�s dans le Yoga, dans l�union avec l��tre Divin, doivent se poursuivre de phase en phase jusqu�au moment o� l�Âme n�est plus envelopp�e que de F�licit�. Alors, nous est-il dit, � Brahman est F�licit� �.
����������� Vous comprendrez donc, pour peu que vous saisissiez quelque chose de ce grand enseignement, qu�il ne peut exister de sacrifice, dans ces r�gions sublimes, qui ne soit un pur acte de joie, un pur acte de f�licit� � peu importe l�imperfection avec laquelle je l�ai personnellement exprim�e� -� c�est que, de cette Nature supr�me, de cette F�licit�, est n� l�univers;� c�est que de cette limitation volontaire de l��tre est sorti le Logos, qui est lui-même L�objet de cette limitation volontaire de l��tre divin a pr�cis�ment �t� de r�pandre la f�licit� inh�rente � sa propre nature essentielle, afin que, le cycle de l�existence une fois achev�, il p�t exister une foule d�individualit�s, rayonnantes et joyeuses, capables de partager Sa f�licit� parfaite, f�licit� sans cesse grandissante � mesure qu�elles se rapprochent de Lui. L��loignement imaginaire, d� au voile d�ignorance qui enveloppe l�Âme, peut seul rendre l�homme malheureux.
����������� L�id�e fondamentale sera donc, si vous le voulez bien, la suivante : la Loi du Sacrifice a pour base la Nature Divine; le Sacrifice supr�me auquel est d� l��manation de l�univers, c�est ce don de Soi-m�me fait par la Nature qui est f�licit�; par suite, l�ensemble doit avoir pour but ce partage, cette effusion de la f�licit�. Enfin la racine m�me du Sacrifice divin est la joie de r�pandre au dehors, afin de pouvoir unir � Soi un grand nombre d�Âmes� - union qui aura pour cons�quence la � Paix qui surpasse tout entendement �.
����������� Cette id�e, une fois comprise, nous permettra de mettre en lumi�re la Loi du Sacrifice et de saisir ce que j�ai appel� son double aspect : dans l�acte de donner, c�est tout d�abord la joie; mais, la nature inf�rieure �tant plus avide que g�n�reuse, c�est, au point de vue de la nature inf�rieure, le renoncement continuel � c�est la souffrance. Examinons ce point d�un peu plus pr�s. Nous pourrons, je crois, �viter toute contradiction et, peut-�tre, sonder d�un oeil plus clairvoyant ce grand myst�re � comme on l�a justement nomm� � qu�est la Loi du Sacrifice. Comprenons que donner est la joie supr�me, parce qu�elle est de la m�me essence que la nature Divine. Comprenons ensuite qu�en devenant lui-même� c�est-�-dire en devenant consciemment divin � l�homme trouvera en lui-m�me une joie de plus en plus grande et, pour les autres, une source de joie de plus en plus abondante. La f�licit� doit donc grandir quand la nature sup�rieure se d�veloppe. La souffrance ne peut na�tre que du d�saccord et des agitations de la nature inf�rieure qui, au fond, n�est que le m�me Soi accabl� de son ignorance et envelopp� de ses illusions. Aussi verrons-nous, en poursuivant cette �tude, que la souffrance a pour but de nous d�livrer de l�ignorance � que tout le processus de la croissance et de l��volution consiste � nous d�livrer de l�ignorance. Ceci se traduit pour nous par de la souffrance, des soucis et des luttes � impressions constamment �prouv�es par notre nature inf�rieure. Et pourtant le degr� de d�veloppement du v�ritable homme int�rieur, le degr� de son activit� consciente, le degr� de son aptitude � trouver expression dans sa nature inf�rieure, sera strictement d�termin� d�apr�s la mani�re dont il saura comprendre que l��me de tous ses efforts est de secourir un monde plong� dans la tristesse, en manifestant la joie et la paix. Il arrivera graduellement � faire passer sa propre conviction, pour ainsi dire, dans sa nature inf�rieure, la purifiant de son ignorance et ouvrant ses yeux � la r�alit�, qui remplacera d�s lors pour elle les apparences trompeuses.
����������� Alors, peut-on demander avec raison,� pourquoi l�id�e de souffrance a-t-elle si souvent �t� rattach�e � l�id�e de sacrifice ? Pourquoi ces deux notions ont-elles �t� identifi�es � tel point que le mot sacrifice donne in�vitablement, � une personne qui pense ou qui lit, l�id�e d�un pur supplice? � Il semble que cette conception erron�e ait sa cause dans la nature inf�rieure dont les premi�res activit�s tendent invariablement � saisir, � �treindre, � garder pour son � moi � isol� et s�par�. Celui-ci cherche, dans le monde ext�rieur, des exp�riences � accumuler. Mais l�homme sup�rieur est encore bien loin d��tre d�velopp�; son caract�re embryonnaire rend son influence sur l�homme inf�rieur presque nulle. La nature inf�rieure se plonge donc dans le monde des sensations, tendant de tous c�t�s des mains avides vers tout ce qui semble s�duisant, ignorant la nature des objets, ignorant les cons�quences des actes, ayant pour seuls guides les apparences ext�rieures et ne sachant ce que peut cacher cette surface trompeuse. Ces premi�res exp�riences, longtemps renouvel�es pour la nature inf�rieure, consistent donc � rechercher constamment des joies apparentes, et � d�couvrir constamment qu�elles la satisfont moins qu�elle ne l,avait imagin�. Je vois ai expliqu� un jour en d�tail, vous vous en souvenez peut-�tre, la signification et l�utilit� de la souffrance qui montre graduellement � l�homme, avec la nature de la Loi, le caract�re fugitif des d�sirs sensuels et des jouissances propres � l�homme animal. Voil� comment la souffrance am�ne au savoir � comment aussi le plaisir y conduit. En apprenant � conna�tre ces deux faces de la nature manifest�e, l�Âme gagne une premi�re connaissance de la r�alit� sous-jacente. En acqu�rant de la sorte une exp�rience qui peut �tre � et est souvent � p�nible � obtenir, l�Âme transforme son exp�rience en savoir et change son savoir en sagesse, qui lui sert d�s lors de guide. � mesure que s�accumule le savoir, possession de l�homme v�ritable, le Soi grandissant commence � comprendre ce qu�il est. Il transforme le savoir en sagesse, et la sagesse devient d�s lors pour lui une source de joies pures et sans m�lange.� Cette sagesse grandissante est toujours accompagn�e d�une vision plus p�n�trante, d�une s�r�nit� et d�une force croissantes. Par suite elle accepte ce qui, pour la nature inf�rieure, est p�nible, car elle voit dans ces peines une source d�exp�rience. Quand l�homme v�ritable s�aper�oit qu�un plaisir avidement recherch� am�ne le d�sappointement et la lassitude, il transforme cette exp�rience en sagesse. Ainsi envisag�e, la douleur elle-m�me a donc son aspect joyeux, car l�homme consid�re, dans cette exp�rience, non pas la souffrance passag�re de la nature inf�rieure, mais le gain r�alis�, en savoir, par la nature sup�rieure. Il comprend que de toutes ces exp�riences� r�sultera, pour lui-m�me, une augmentation de savoir et de puissance. Il les choisit��� � et le choix fait de propos d�lib�r� est joyeux, parce qu�il voit le but final et l�or qui sortira du feu.
����������� Consid�rons maintenant l��tre humain aveugl� par l�ignorance dans le monde inf�rieur. Supposons-le soumis � ces le�ons que la Nature enseigne sans cesse, le�ons s�v�res et p�nibles. Supposons qu�il recherche les jouissances animales, insouciant des souffrances qui en r�sultent pour son entourage, foulant aux pieds ses semblables pour saisir lui-m�me quelque objet convoit�. Il est certain qu�en voyant cette objet bris� dans sa main, sa premi�re impression sera une douleur aigu�, un d�sappointement profond, un sentiment de lassitude et de d�go�t. � ce point de vue l�exp�rience est r�ellement p�nible, bien qu�au point de vue sup�rieur elle m�rite d��tre faite � cause de la sagesse qu�elle engendre, � cause de l�aptitude plus grande � p�n�trer les choses de la nature et de la compr�hension plus nette de la Loi, qu�elle a pour cons�quences. Mais il y a beaucoup plus. Les natures inf�rieures et sup�rieures se trouvent en conflit. La seconde se propose un certaine but, elle doit l�atteindre au moyen de la premi�re qui ne comprend pas o� vise sa compagne et ne per�oit pas l�objet qu�elle a en vue. Sans la coop�ration de la nature inf�rieure, la nature sup�rieure ne peut atteindre son but. D�o� cette lutte avec la nature inf�rieure qu�il faut tant�t pousser, tant�t retenir. Tout cela � pour la nature inf�rieure encore envelopp�e d�ignorance, - se traduit par un sentiment de g�ne, un sentiment d�abandon forc� des objets d�sir�s. Mais, � la longue na�t dans cette nature inf�rieure � � mesure que la nature sup�rieure agit plus efficacement sur elle � une conviction de plus en plus net : � Il est bon que telle action soit faite; si la souffrance peut en r�sulter, le gain � r�aliser vaut la souffrance �; et le fait d�avoir vaincu la difficult� par l�effort, m�me douloureux, procure un accroissement de forces tel que la douleur passag�re de l�effort s�oublie dans la joie de l�exploit accompli. Au cours du d�veloppement de l�Âme il se fera donc � m�me en ce qui concerne la nature inf�rieure � un double travail dans l�intellect, dans l�intelligence de l�homme; il choisira d�lib�r�ment un but difficile � atteindre, parce qu�il le trouve d�sirable au supr�me degr�. Pourtant il ne saurait l�atteindre sans sacrifier certains d�sirs inf�rieurs. Il les sacrifie donc et les br�le, pour ainsi dire, dans le feu du savoir. Mais il s�aper�oit alors qu�il a br�l� en m�me temps ses entraves et ses liens, qu�il a br�l� ses faiblesses, obstacles � son progr�s, et que la sensation de br�lure, douloureuse tout d�abord, n�est due en r�alit� qu�� l�action de la flamme sur ses propres cha�nes. Il accueille donc joyeusement la libert�. L�exp�rience est r�p�t�e, et l�homme voit de plus en plus la libert�, de moins en moins la souffrance qui en est le prix. � ce point de vue int�rieur la souffrance s�est donc, ici encore, chang�e en joie, car ici encore agit l�alchimie spirituelle. L�homme voit que, dans cet effusion de l��l�ment Sup�rieur dans l��l�ment inf�rieur, le premier am�ne le second � partager sa joie et � mieux go�ter sa f�licit� inalt�rable et toujours croissante. Et quand l�Âme approche du portail du Temple, quand le but de toutes ces le�ons lui appara�t clairement, elle commence � voir qu�elles tendent, en somme, � la d�livrer de ses entraves � seul si�ge de sa souffrance, puisqu�elles seules emp�chent l�Âme de r�aliser son identit� avec ses soeurs, son identit� avec l�Etre Divin. A mesure que s�affirme cette conviction et que s�accentue l�effusion de la Nature Divine qui est l�homme v�ritable, on �prouvera toujours, dans la suppression des conditions limitatives, cette joie divine; on sentira que la souffrance n�est en sommes due, ici encore, qu�� la s�paration, que la s�paration a sa cause dans l�ignorance et que, l�ignorance d�truite, la souffrance sera supprim�e du m�me coup. Il y a plus encore. Du jour o� les entraves sont reconnues comme illusoires, comme apparentes et non r�elles, comme n�ayant point d�existence dans le monde o� vit l�homme v�ritable, ce dernier commence r�solument � transmuer les facult�s de la nature inf�rieure et, par cet acte d�alchimie, � les affiner.
Prenons un ou deux exemples, et voyons comment cette transmutation pourra s�op�rer. Consid�rons d�abord une des grandes sources de souffrance dans le monde entier : la recherche du plaisir pour le � moi � personnel sans tenir compte des d�sirs ou des sentiments d�autrui � le d�sir de jouir seul, de jouir dans un cercle restreint, bien isol� du monde ext�rieur et consacr� � cette satisfaction exclusive du � moi � inf�rieur. Cet instinct qui pousse � la recherche du plaisir, comment l�Âme agira-t-elle � son �gard? Pr�sente-t-il un �l�ment que le feu puisse transformer ? � La recherche du plaisir, que la souffrance suit toujours, peut devenir la facult� de r�pandre la joie et de faire partager � tous le gain d�un seul. L�Âme d�couvrira qu�elle peut op�rer cette transmutation en cherchant graduellement � �liminer l��l�ment s�paratif dans cet instinct qui demande le plaisir au monde ext�rieur; en s�effor�ant constamment de chasser ce d�sir d�exclusion; en renversant le petit mur d�ignorance qui l�entoure dans ces mondes inf�rieurs o� elle se manifeste; en br�lant cette muraille inf�rieure qui ne pourra plus, ainsi, la s�parer des autres. Si bien, qu�apr�s avoir imagin� et obtenu un plaisir, le � soi � s��panche au dehors parmi tous ses fr�res et leur apporte le bonheur qu�il a trouv�. En ceci, rien n�est perdu, car l�Âme trouve bient�t dans l�ob�issance une joie profonde. Dans un monde o� la Loi est partout, vivre en harmonie avec elle doit in�vitablement assurer la paix et le bonheur. La pr�sence seule d�une dissonance montre que l�harmonie avec la loi n�existe point. Mais cette Âme qui se d�veloppe, voyant qu�elle a gagn� certaines forces, certaines connaissances, certaines v�rit�s spirituelles, s�habituera � sentir que la joie de poss�der consiste r�ellement, non pas � gagner mais � pouvoir donner, et que, ce qu�il lui faut, ces renverser toutes ces murailles �lev�es jadis de ses propres mains, au� temps de son ignorance, afin que sa joie puisse rayonner librement � travers le monde des hommes et des choses. L�instinct qui cherche le plaisir peut donc se transmuer en facult� de r�pandre la joie; et l��tre, qui jadis cherchait le plaisir dans l�isolement, comprendra que la joie existe seulement dans le partage et que les seules biens dignes d��tre acquis sont ceux qu�on poss�de pour les donner. La joie de donner � voil�, au fond, le sacrifice essentiel, la profusion en faveur de tous ce qui perdrait autrement toute valeur, �tant renferm� dans un � moi � isol�.
����������� Prenons un autre sentiment susceptible d��tre soumis � la m�me alchimie spirituelle : l�amour �go�ste. Nous avons ici quelque chose de plus �lev� que la simple recherche instinctive du plaisir, car le mot m�me d�amour implique tout au moins l�id�e de donner; autrement, ce ne serait pas de l�amour. Mais ce sentiment peut �tre fort �go�ste, cherchant encore plus � recevoir qu�� donner, songeant avant tout � ce qu�il peut obtenir des objets de son attachement, et non � ce qu�il peut leur donner. Par cela m�me qu�il recherche un gain, cet amour manifeste in�vitablement les tristes caract�res de l�exclusion, de la jalousie, du d�sir de tenir les autres � l��cart, du d�sir de garder l�objet aim� pour soi seul, et si je puis m�exprimer ainsi, de couvrir le soleil d�un toit pour ne lui permettre d��clairer que sa propre maison et priver toutes les autres de ses rayons bienfaisants.
����������� Cet amour �go�ste, comment le transformer ? � ce ne sera certes pas en le restreignant, comme certains cherchent � le faire; ce ne sera pas en essayant de le rendre plus froid, plus dur, comme si l�amour pouvait jamais �tre froid et dur. Ce sera plut�t en encourageant l�amour, tout en cherchant � �liminer m�thodiquement les �l�ments qui le d�gradent. Il faudra surveiller le � moi � inf�rieur et, d�s qu�il commence � �lever un petit mur d�exclusion, renverser ce mur; s�il veut garder tel objet pr�cieux, admirable, chercher imm�diatement � le partager avec le prochain; s�il tend � priver les autres de l�objet affectionn�, prodiguer cet objet au dehors et le faire partager � autrui. L�Âme doit arriver � comprendre que ce qui d�gage la beaut� et la joie doit �tre donner � tous, pour qu�eux aussi puissent go�ter le bonheur trouvé jadis par un seul dans l�objet aim�. Ainsi dispara�tront, petit � petit, tous ces �l�ments grossiers. L��go�sme s��veille-t-il, il sera r�solument mis de c�t�. La jalousie cherche-t-elle � s�exprimer, elle sera tout de suite arr�t�e. Aussi, l� o� r�gnait ce sentiment : �Restons seuls et jouissons �, on verra na�tre cet autre sentiment : � Allons ensemble � travers le monde pour donner et partager avec d�autres la joie que nous avons trouv�e ensemble. �
����������� Ainsi, gr�ce � ce proc�d� d�alchimie, l�amour se transformera en divine compassion et se r�pandra dans toute l�humanit�; et celui qui aimait � recevoir les dons de l�objet aim� mettra toute sa joie � prodiguer � tous ce qu�il a trouv�. Il est possible que cet amour ait �t� �go�ste autrefois. Peut-�tre unissait-il un homme et une femme. Il s�est �largi ensuite jusqu�� comprendre le cercle de la famille, puis la vie de la communaut�, puis la vie de la race; - il s��largira finalement jusqu�� contenir tout ce qui vit, dans un univers o� rien ne se trouve qui n�ait vie. Cet amour n�aura rien perdu de sa profondeur, rien de sa chaleur, rien de son intensit�, rien de sa ferveur; mais il se sera �tendu � l�Univers au lieu de se concentrer sur un seul coeur; il sera devenu cet oc�an de compassion o� trouve place tout ce qui est dou� de sensibilit�. Voil� comment s�appliquerait � l�amour l�alchimie de l�Âme
����������� Vous pouvez prendre de m�me, successivement toutes les qualit�s de la nature inf�rieur et les soumettre au m�me examen. Vous verrez que le processus consiste, en sommes, � se d�livrer de la s�parativit� et � la consumer m�thodiquement par la volont�, le savoir et le discernement.� Vous verrez aussi que toute cette op�ration est une joie pour l�homme v�ritable, pour l�homme r�el, malgr� l�inintelligence dont peut faire preuve, dans son aveuglement, l�homme inf�rieur. Quand cette conviction s�est faite, alors ce qui s�appelait souffrance perd son aspect p�nible et devient une joie. L� m�me o� r�gne cette sensation qu�autrement on appellerait douleur, la joie l�emporte et transforme la souffrance, parce que l�Âme voit et que la nature inf�rieure commence � comprendre la fin et l�objet de la destin�e humaine.
����������� En continuant ainsi cette �tude, nous verrons qu�il y a encore une mani�re dont cette transmutation peut s�op�rer. Au fur et � mesure que cette flamme de sagesse et d�amour, la Nature Divine dans l�homme, se r�pand de plus en plus dans la nature inf�rieur et, br�lant toutes les limites dont j�ai parl�, la transforme � sa propre image, il se produit aussi un d�gagement d��nergie spirituelle. Le Soi qui se manifeste ainsi dans l�homme inf�rieur parvient � mettre en jeu des �nergies et des facult�s qui semblent,� chose �trange, r�sulter du processus m�me que nous avons �tudi�. Gr�ce � l�alchimie qui existe dans la nature, quand cette Âme se manifeste par sa flamme d�amour et de sagesse dans le monde des hommes, il semble que, par le seul fait de la combustion des �l�ments inf�rieurs, il y ait, � un niveau plus �lev�, une lib�ration de forces subtiles.
����������� Le r�sultat de cette combustion est donc de d�gager la vie spirituelle, de mettre en libert� ce qui, d�abord li� et incapable de se manifester, deviendra, l�enveloppe ext�rieure une fois consum�e, pr�t � agir puissamment dans le monde. Nous arrivons � comprendre vaguement � dans cette ascension de l�Âme vers des r�gions plus hautes o� elle per�oit de plus en plus son identit� avec tous, son unit� avec tous � nous arrivons, dis-je,� � discerner l�existence d�une grande v�rit�. L�Âme peut, en vertu de son unit� avec les autres Âmes, les faire participer � ce qu�elle poss�de et les aider en bien des mani�res; elle peut, par un sacrifice joyeux, faire l�abandon de biens qu�elle aurait pu garder pour elle-m�me, mais qu�il faut donner au monde puisqu�elle s�est identifi�e avec tous. Voil� comment les fruits de ses efforts spirituels � les possibilit�s de repos spirituels, de f�licit� spirituelle, de croissance spirituelle, qui ne pourraient se partager � peuvent �tre abandonn�s par l�Âme en vertu d�un acte joyeux rendu n�cessaire par sa nature m�me, afin que tous les biens auxquels elle renonce puissent devenir un tr�sor commun r�pandu dans l�humanit� pour en h�ter l��volution. Aussi nous parle-t-on de disciples qui renoncent au D�vakhan, d�Adeptes qui renoncent au Nirv�na. Il faut entendre par l�, nous le sentons obscur�ment, que ces hommes sont arriv�s � s�identifier avec leurs fr�res au point que le partage avec d�autres du prix de leurs efforts devient pour eux une divine obligation; leur v�ritable r�compense n�est pas la joie du D�vakhan ni les b�atitudes inimaginables du Nirv�na; la seule joie qu�ils veuillent go�ter est jeter tout ce qu�ils poss�dent, tout ce dont ils auraient pu jouir, dans le fonds commun. Ils aideront ainsi l��volution g�n�rale; ils contribueront � faire progresser un peu la race dont ils font partie.
����������� Nous entrevoyons maintenant une autre v�rit�, car nous commen�ons � comprendre la mani�re dont ce secours peu quelquefois �tre donn�. Quand un homme est �cras� par une souffrance dont lui-m�me est l�auteur v�ritable, quand le formidable balancier d�une loi in�luctable fait tomber sur une Âme humaine une douleur, une souffrance dont elle-m�me a jadis� sem� la cause, il est possible � pour un homme aux yeux duquel la s�paration n�existe pas et qui conna�t son identit� avec l�Âme souffrante sur le plan de la r�alit� � non pas de prendre sur lui-m�me le r�sultat in�vitable, �pargnant au semeur l�effort pr�cieux de la r�colte, mais de se tenir en quelque sorte � ses c�t�s pendant que dure son labeur, et de lui insuffler une force nouvelle, une vie nouvelle, une compr�hension nouvelle. C�est ainsi qu�on peut aider l�Âme souffrante dans l�accomplissement de sa lourde t�che, en influant non pas sur la nature de cette t�che mais sur l�attitude de l��tre appel� � la remplir; en transformant, non pas le fardeau, mais les forces dont l�Âme dispose pour le soulever. Une des plus grandes joies, une des plus hautes r�compenses pouvant �choir � l�Âme qui se d�veloppe et ne demande rien pour elle-m�me, sauf le pouvoir de servir, lui est accord�e quand elle rencontre une Âme plus faible, �cras�e par suite de sa faiblesse, et qu�elle parvient � inspirer � cette Âme un peu de courage divin, du soulagement et de la compr�hension qui donne, avec l�espoir, la force de supporter. Le secours apport� donne � l�Âme soeur la force d�accomplir sa t�che. Il ne la d�livre pas d�un fardeau qu�elle s�est cr�� et que, dans son propre int�r�t, elle doit porter; mais il lui communique un peu de cette force qui r�sulte de la compr�hension des choses. Gr�ce � cette force, la souffrance d�un ch�timent subi devient, ici encore, la r�signation tranquille � des peines qui portent en elles-m�mes leur enseignement.� Une Âme ainsi secourue devient joyeuse, m�me sous le fardeau de son Karma. Le don qui lui est fait la rend plus forte : c�est le rayonnement de la Vie Divine venant du plan o� toutes les Âmes ne sont qu�une. Sur ce plan abonde toujours l��nergie spirituelle, �nergie qui devient une aide puissante gr�ce aux dons constants de ceux qui ont d�couvert la joie divine de se prodiguer. Pour eux point d�autre r�compense que de voir leurs fr�res s��lever vers la lumi�re qu�ils ont eux-m�mes atteinte.
����������� Mais, s�il en est ainsi, comment expliquer une pens�e troublante qui nous est, � tous, famili�re ? L�aspirant l�a sans doute souvent entendue exprimer; il se sent en sa pr�sence d�s le d�but de ces �preuves pr�paratoires; peut-�tre m�me croit-il qu�elle r�gne seule dans l�Enceinte Ext�rieure, d�s le portail franchi. Pourquoi ce chemin a-t-il �t� nomm� � la Voix Douloureuse � si,� � chaque pas nouveau, une divine joie y rayonne de plus en plus ? � Le choix de cette expression s�explique pourtant sans peine. Il faut seulement, pour cela, comprendre pour qui �le chemin doit para�tre tout d�abord douloureux. Il faut comprendre que l�ascension directe de la montagne, la volont� arr�t�e de s��lever aussi vite, la ferme r�solution de prendre les devants sur l��volution humaine normale � am�neront in�vitablement la concentration, dans quelques br�ves vies, de r�sultat qui eussent �t�, sans cela, r�partis sur une longue s�rie d�incarnations. Le Karma du pass� viendra fondre subitement sur l�Âme, puisqu�il faut maintenant lui faire face et le payer en un temps aussi bref; et les difficult�s surgiront avec une intensit� d�autant plus formidable. Ce premier assaut peut �tre d�une violence d�concertante, d�une stup�fiante �nergie, et faire �prouver � l�Âme la souffrance � un degr� qu�elle ne connaissait point jusque l�. Mais ce n�est pas l�Âme qui subit r�ellement la douleur, m�me en cet instant, - c�est la nature inf�rieure encore aveugle et toujours pouss�e en avant par l�aiguillon de la nature sup�rieure. M�me en cette heure d��preuve cruelle, quand toutes les causes accumul�es pendant tant de vies pass�es viennent fondre sur un �tre aussi hardi pour provoquer ainsi sa destin�e � m�me en ce moment, l�Âme est dans la paix, joyeuse d�accomplir promptement ce qui, autrement, e�t dur� pendant bien des existences, joyeuse de pouvoir enfin prendre pour objectif la seule vie qui lui paraisse digne d��tre v�cue.
����������� Voil� pourquoi ce chemin, vu d�en bas, a �t� nomm� la Voix Douloureuse. C�est aussi parce que les hommes, en s�y engageant, renoncent � tant de choses qui constituent, aux yeux du monde, le plaisir : plaisirs sensuels, plaisirs mondains, jouissances de tous genres qui paraissent � tant de personnes � et sont en effet pour elles � les fleurs m�me bordant le chemin de l�existence. Mais l�Âme d�cid�e � monter a perdu le go�t de ces choses; l�Âme ne les d�sire plus; l�Âme cherche ce qui ne se fane point � des joies permanentes. Le chemin peut sembler, vu du dehors, la Voie du Renoncement; mais ce renoncement, envisag� au point de vue inverse, implique un surcro�t de joie, de paix et de bonheur. Car il ne s�agit pas d�appeler la douleur pour le plaisir de souffrir, mais bien de rejeter un bonheur �ph�m�re pour une f�licit� �ternelle, d��changer des objets dont peuvent nous priver les circonstances ext�rieures pour les biens intimes, apanage de l�Âme, tr�sors que nul voleur ne touchera jamais, joies que nulle vicissitude terrestre ne saurait att�nuer, troubler ou obscurcir.
����������� A mesure que l�Âme s�avance dans la Voie, sa joie devient de plus en plus profonde car, d�s le d�but, le chagrin a montr� qu�il avait sa racine dans l�ignorance. Assur�ment l�amertume et la douleur pr�c�deront souvent encore la connaissance; mais leur cause est dans l�ignorance, dans l�aveuglement. C�est ainsi que la tristesse r�gne au coeur de ceux qui, peut-�tre d�termin�s par cette tristesse m�me, se consacrent � la recherche du Sentier; - la tristesse les �treint, souveraine, lorsque, jetant leurs regards sur l�humanit�, ils voient partout r�gner la d�tresse et la mis�re; lorsqu�ils voient hommes, femmes, enfants, revenir ici-bas pour y souffrir, tous les cent ou tous les mille ans; lorsqu�ils voient les hommes souffrir sans savoir pourquoi, sous l�aiguillon de l�ignorance, seule cause r�elle de leur douleur. En jetant les yeux sur un monde enseveli dans les t�n�bres, sur une humanit� qui se d�bat sous l��treinte de l�ignorance, les hommes destin�s � devenir des Sauveurs sentent toute la mis�re de ce monde, et un d�sir leur vient de chercher, afin de le secourir, le chemin de la Lib�ration. N�avez-vous jamais �t� frapp�s, en �tudiant dans le pass� l�histoire de ces Grands Etres � les quelques lueurs jet�es par l�histoire ou par la tradition sur Leur vie� dans le monde des hommes � n�avez-vous jamais �t� frapp�s par ce fait que l�angoisse qu�ils eurent � traverser pr�c�da, pour eux, la d�couverte de la lumi�re ? Que cette angoisse fut l�angoisse de l�impuissance, l��cho des chagrins �prouv�s sans en conna�tre encore le rem�de ? Si vous consid�rez la douleur de l�Homme Divin que tant de millions d�hommes de notre race� regardent aujourd�hui comme le plus �lev� et le plus grand, comme la fleur m�me de notre humanit�, la douleur de ce Bouddha qui a maintenant pour fervents un tiers du genre humain � vous souvenez-vous comment� il chercha la cause de la souffrance; comment il g�mit sur l�ignorance et la mis�re du monde et ne vit pas � peut-�tre est-ce une parabole � et ne vit pas de rem�de; comment il renon�a � Sa femme et � Son fils, � Son palais, � Son foyer, � Son royaume; comment Il s�en alla, ne portant que le bol du mendiant, seul dans la jungle, loin des habitations humaines; comment la douleur pesait sur Son coeur parce que ses yeux �taient encore voil�s ? � Il ne savait, nous est-il dit, comment sauver le monde, et cependant Il ne pouvait trouver la paix tant que le monde souffrirait. Il traversa bien des dangers, bien des souffrances, bien des mac�rations : il subit aussi l�obscurit� et la d�tresse d�un esprit qui cherche en vain la lumi�re. Un jour, enfin, assis sous l�Arbre sacr�, Il re�ut l�illumination et comprit la cause de la souffrance. Alors la souffrance s��vanouit et la joie prit sa place. Ce jour-l�, dans les paroles tomb�es de Ses l�vres et que les si�cles nous on conserv�es, �clat�rent le triomphe, la joie, le bonheur � jamais inalt�rable. Peut-�tre vous rappelez-vous les termes dans lesquels un po�te anglais a traduit Ses paroles, montrant dans l�ignorance la cause de la souffrance, et dans la sagesse l�illumination et l�av�nement du bonheur :
Moi, Boudha, qui m�lai mes larmes � toutes celles de mes fr�res,
Dont les souffrances du monde entier ont bris� le coeur,
Je ris et me r�jouis, car la libert� existe.
����������� La libert�! Mais c�est la joie. L�ignorance et l�aveuglement faisaient couler les larmes. La souffrance du monde brisait le coeur comme elle brise aujourd�hui� encore les coeurs ignorants. Mais il y a une libert�. Elle nous apporte ce message : � La cause de la souffrance est en nous et non pas dans l�univers � dans notre ignorance et non pas dans la vie. � Voil� comment, quand brille la lumi�re, la libert� l�accompagne et, nous est-il dit, la joie et le rire de l�homme deviennent divins. Car la lumi�re divine a inond� Son Âme; il est illumin�; Il est sage � et pour le sage le chagrin n�existe point, car dans l�Âme divinement illumin�e, la douleur est morte � tout jamais.
����������� Nous voici parvenus au Seuil des Portes d�Or, des Portes que tout homme peut ouvrir, des Portes qui, ouvertes, laissent p�n�trer l�homme dans ce Temple grandiose� d�o� jamais ne ressortent ceux qui y sont entr�s. Ce soir, si nous le pouvons, nous nous efforcerons de comprendre la condition de l�aspirant qui marche sur le Seuil qu�il sait devoir franchir bient�t pour s�unir aux rangs des serviteurs du monde qui travaillent � guider l��volution de la race, � h�ter le progr�s de notre humanit�.
����������� Attardons-nous un moment � consid�rer les hommes qui peuplent cette Enceinte ext�rieure dans laquelle nous avons s�journ� pendant les quatre conf�rences pr�c�dentes. Nous verrons ressortir une caract�ristique essentielle, commune � tous ceux qui sont l�. Ils diff�rent grandement en qualit�s mentales et morales, ils diff�rent grandement en progr�s accompli; ils diff�rent en r�alisation des conditions requises, en aptitude � monter plus haut; mais une chose appara�t que tous ont en commun, la sinc�rit� [Earnestness. Nous ne trouvons pas d��quivalent exact pour ce mot au sens o� il est pris ici. Il faudrait extraire l�essence de : ardeur, attention, z�le, bonne foi, s�rieux, empressement, etc. On aura l�id�e juste en consid�rant le mot �sinc�rit� somme une abr�viation de la p�riphrase : � qualit� de l�homme qui s�y est mis pour tout de bon �. Cet homme-l� a cess� d��tre ce que l�on appelle vulgairement �amateur�. ] �Ils ont tous devant eux un but d�termin�. Nettement et clairement ils comprennent ce � quoi ils aspirent; lorsqu�ils consid�rent le monde, � la base de leur vie ils sentent une r�solution sinc�re. Voil�, me semble-t-il, la caract�ristique la plus saillante, commune � tous, ainsi que je l�ai dit. Ceux d�entre vous qui sont familiaris�s avec la litt�rature sacr�e des contr�es lointaines se souviendront de l�importance qu�elle attache � cette qualit� de sinc�rit�, � ce fait d�avoir devant soi un but bien d�fini qu�on travaille � r�aliser d�une mani�re d�termin�e. Si vous examinez quelques-uns des livres anciens qui appartiennent aux religions de l�Inde, vous y trouverez la n�gligence marqu�e comme un d�faut des plus dangereux, la sinc�rit� comme une des vertus les plus essentielles.� Quelque soit la religion envisag�e, vous trouverez sur ce point une unanimit� parfaite. L�homme, parvenu au degr� que nous consid�rons ici, a franchi les bornes qui s�parent une religion d�une autre religion; il a compris qu�au fond de toutes les croyances vivent les m�mes grands enseignements, et que tous hommes religieux tendent vers le m�me but sublime. En sorte qu�il n�est pas surprenant de voir les �critures de cultes diff�rents � issues toutes de la m�me Confr�rie des Ma�tres � attribuer � l�aspirant les m�mes caract�ristiques, et donner unanimement la sinc�rit� comme une des qualit�s les plus indispensables � quiconque veut �tre disciple. Au deuxi�me chapitre du Dhammapada �vous trouverez cette qualit� indiqu�e aussi clairement et d�une mani�re peut-�tre un peu plus d�taill�e, qu�en tout autre passage. Je cite :
����������� Si l�homme sinc�re s�est �veill� � l�action, s�il n�est point oublieux, si ses oeuvres sont pures, s�il agit avec discernement, s�il est ma�tre de lui, s�il vit selon la loi, la gloire de cet homme cro�tra.
����������� Par l�activit�, par la sinc�rit�, par l�aust�rit� et la puret�, l�homme sage peut se b�tir une �le qu�aucun d�luge ne submergera.
����������� Les fous courent apr�s la vanit�, hommes d�un savoir mauvais. Le sage conserve la sinc�rit� comme son plus pr�cieux joyau.
����������� Ne poursuis pas les choses vaines, les joies de la convoitise et du faux amour! L�homme sinc�re et m�ditatif obtient une ample moisson de joie.
����������� Lorsque, par la sinc�rit�, l�homme instruit a chass� la vanit�, alors sage, il monte aux hautes terrasses de la sagesse et regarde les fous qui sont en bas. Serein, il consid�re la foule qui se d�m�ne, tel un homme debout sur une montagne et regardant ceux qui sont dans la plaine.
����������� Attentif parmi les �tourdis, �veill� parmi les dormeurs, le sage avance comme un cheval de course, laissant derri�re lui la haridelle.
����������� C�est par la sinc�rit� que Maghavan est devenu le souverain des dieux. Les hommes louent la sinc�rit�; la n�gligence est toujours bl�m�e.
����������� Le Bhikshou [Mendiant. � Nom sonn� aux moines bouddhistes. ] qui fait de la sinc�rit� ses d�lices et regarde avec crainte la n�gligence se meut partout comme le feu, br�lant ses liens petits et grands.
����������� Si vous jetez un coup d�oeil r�trospectif sur tout le travail que nous avons �crit, vous verrez comment cette qualit�, la sinc�rit�, est � la base de chacune des phases de l�oeuvre Purification, contr�le de la pens�e, construction du caract�re, transmutation des tendances inf�rieures en qualit�s sup�rieures � la t�che tout enti�re pr�suppose une nature sinc�re qui a reconnu son but et cherche r�solument � l�atteindre.
����������� Telle est donc la caract�ristique essentielle commune � tous ceux qui sont dans l�Enceinte Ext�rieure; et il peut �tre bon de noter en passant que cette caract�ristique se montre d�une mani�re tr�s saillante � ceux dont les yeux sont ouverts. Vous n�ignorez sans doute pas que le caract�re d�une personne peut �tre d�termin� dans une large mesure d�apr�s l�aspect de ce qu�on nomme son �aura�. D�autre part, certains d�entre vous se souviendront qu�en parlant de l��volution humaine j�ai dit que l�Âme, aux premiers jours de sa croissance, �tait une chose fort peu d�finie, comparable � une volont� n�buleuse sans contours pr�cis, sans limite nettement marqu�e. Or, � mesure que l�Âme progresse, cette n�buleuse prend une forme de plus en plus nette, et l�aura de la personne devient pr�cise en ses contours. Au lieu de finir dans le vague, de s�effacer graduellement dans l�espace ambiant, elle se d�tache de plus en plus nettement avec ses contours nettement marqu�s � mesure que se poursuit la formation de l�individualit�. Si donc vous pouviez regarder de la sorte les hommes qui sont dans l�Enceinte Ext�rieure, vous seriez frapp�s par la d�limitation claire et pr�cise de leur aura, symbole ext�rieur de la nettet� int�rieure acquise par l�Âme individuelle. Je dis cela afin de vous faire comprendre que chaque progr�s de l�Âme se marque par des signes visibles qui ne laissent subsister aucune possibilit� d�erreur. La place que l�Âme occupe ne lui est point donn�e par une faveur arbitraire : elle ne lui vient pas du hasard et ne peut d�pendre d�aucun accident. Son degr� d��volution consiste en un� �tat bien d�termin�, comportant des qualit�s nettement form�es, des pouvoirs nettement acquis. Et ces pouvoirs sont reconnaissables � des signes pr�cis, visibles pour tout observateur ayant d�velopp� en lui-m�me des pouvoirs de perception sup�rieurs � ceux de la mani�re purement physique. Ainsi la sinc�rit� a pour r�sultat de d�velopper l�individualit�, donnant � l�aura un contour nettement marqu�. On peut dire que cette atmosph�re nettement d�limit�e qui entoure l�homme est l�indice ext�rieure d�une condition interne commune � tous ceux qui sont dans l�Enceinte Ext�rieure; et bien que cette caract�ristique soit plus marqu�e chez les uns que chez les autres, elle se trouve n�anmoins pr�sente chez tous ceux qui sont l�.
����������� L�admirable petit trait� qui a pour titre La Lumi�re sur le Sentier �dit fort justement que les aspirants dans l�Enceinte Ext�rieure n�ont point d�autres initiations que celles de la vie. Ce ne sont pas les Initiations nettes et pr�cises qui viendront plus tard, les degr�s distincts qui sont � l�int�rieur du Temple et dont le premier marque l�entr�e des Portes d�Or. Mais ce sont des initiations continuelles qui viennent instruire le candidat tandis qu�il suit le chemin de sa vie journali�re. On peut donc dire ici que la vie est, en un sens tr�s r�el, le grand Initiateur. Toutes les vicissitudes qui viennent assaillir le candidat servent � �prouver sa force et � d�velopper ses facult�s.
����������� En vous rapportant � ce m�me petit trait�, La Lumi�re sur le Sentier, vous y trouverez indiqu�es certaines conditions que les � Commentaires [Commentaires qui figurent � la suite de l�ouvrage.] � disent �tre inscrites dans l�antichambre, dans la salle qui pr�c�de l�entr�e de la Loge elle-m�me. Et elles sont formul�es en un langage mystique, assez intelligible cependant, bien que, ainsi qu�il arrive toujours lorsqu�il s�agit d�un langage mystique, des difficult�s puissent s��lever d�une interpr�tation trop litt�rale, d�avoir voulu s�attacher aux sens des mots eux-m�mes au lieu de chercher � comprendre les v�rit�s int�rieures que les mots veulent exprimer. Et ces quatre grandes v�rit�s inscrites dans l�antichambre sont formul�es comme suit :
Avant que les yeux puissent voir, ils doivent �tre inaccessibles aux larmes.
Avant que l�oreille puisse entendre, elle doit avoir perdu sa sensitivit�.
Avant que la voix puisse parler en pr�sence des Ma�tres, elle doit avoir perdu le pouvoir de blesser.
Avant que l��me puisse se tenir debout en pr�sence des Ma�tres, ses pieds doivent �tre lav�s dans le sang du coeur
����������� Or, le m�me auteur, par l�entremise duquel fut donn�e La Lumi�re sur le Sentier, �crivit quelque temps apr�s des commentaires explicatifs. Ces � commentaires � m�ritent une �tude approfondie, car ils expliquent une grande partie des difficult�s inh�rentes au trait� lui-m�me,� et peuvent aider l��tudiant � �viter cette interpr�tation trop litt�rale dont j�ai signal� le danger. Ils nous disent que cette premi�re phase - � Avant que les yeux puissent voir, ils doivent �tre inaccessibles aux larmes � - signifie que l�Âme doit quitter la vie de la sensation pour entrer dans la vie de la connaissance; qu�elle ne doit pas rester en ce lieu o� elle est continuellement secou�e par les vibrations violentes qui lui viennent des sens; qu�elle doit passer de cette r�gion instable dans celle de la connaissance, o� r�gnent la fixit�, le calme et la paix. Les yeux sont les fen�tres de l�Âme, fen�tres qui viennent troubler la �� bu�e � de l�existence, ainsi qu�on l�appelle. En d�autres termes, de ces sensations intenses, plaisirs ou douleurs, se d�gage comme une bu�e qui voile et obscurcit les fen�tres de l�Âme, en sorte qu�au travers d�elles l�Âme ne peut plus regarder clairement. Cette bu�e vient du monde ext�rieur, non de l�int�rieur, elle proc�de de la personnalit� et non de l�Âme, elle est le r�sultat d�une sensation intense, et non d�une compr�hension de la vie. Elle est, pour cette raison, symbolis�e par les larmes, consid�r�es� comme le signe d�une �motion violente, joyeuse ou douloureuse. Jusqu�au jour o� les yeux sont inaccessibles � de telles larmes, jusqu�au jour o� les fen�tres de l�Âme cessent d��tre obscurcies par la bu�e de l�ext�rieur, jusqu�au jour o� elles laissent transpara�tre clairement la lumi�re de la connaissance, les yeux de l�Âme ne peuvent voir r�ellement. Et ce n�est pas, ainsi qu�on nous l�explique, que le disciple doive perdre sa sensibilit� : c�est simplement que nulle force ext�rieure ne doit �tre capable de rompre son �quilibre. Ce n�est pas qu�il doive cesser de souffrir et de jouir � car ces souffrances et ces joies seront plus profondes que celles de l�homme ordinaire :� - c�est simplement que ni la souffrance ni la joie ne pourront faire vaciller sa r�solution, ne pourront lui faire perdre cet �tat d��quilibre qui r�sulte de la fixit� du savoir acquis. Et ce savoir, c�est la compr�hension des choses permanentes, compr�hension qui rend l�irr�el et le transitoire incapables de voiler effectivement la vision de l�Âme
����������� De m�me pour la seconde v�rit� - � Avant que l�oreille puisse entendre, elle doit avoir perdu sa sensitivit�. � - Elle doit avoir atteint le lieu du silence. Et la raison de ceci, nous est-il dit plus loin, ces que la voix des Ma�tres, qui toujours raisonne dans le monde, ne peut �tre entendue tant que l�oreille humaine est pleine du tumulte de la vie ext�rieure. Ce n�est pas que le ma�tre se taise, car il nous parle sans cesse, sans cesse . Sa voix en nous retentit. Mais les sons qui entourent l�Âme du disciple sont tellement bruyants que cette harmonie plus douce et plus profonde ne peut �tre per�ue � travers les sons grossiers qui viennent des sens et des �motions inf�rieures. C�est pourquoi il est n�cessaire que le disciple, avant m�me de quitter l�Enceinte ext�rieure, atteigne un s�jour de silence afin qu�il puisse entendre un instant le son de la R�alit�. Et ce s�jour du silence, une fois atteint, donnera presque, pour un temps, l�impression d�un manque de sensibilit�, � cause du calme qui y r�gne, � cause de la tranquillit� ininterrompue que l�Âme y per�oit pour la premi�re fois.
����������� Ici, l�auteur parle, et parle avec une grande force, des difficult�s de la lutte qui surviennent lorsque, pour la premi�re fois, le silence est per�u. Accoutum�s que nous sommes � tous les bruits qui nous entourent, lorsque pour un moment le silence vient s�abattre sur l�Âme, il apporte avec lui un sentiment de n�ant. C�est comme si on entrait dans un ab�me o� tout se d�robe, dans des t�n�bres qui enveloppent l�Âme comme dans un drap mortuaire, -� sentiment de solitude absolue, de vide complet, comme si tout s��tait effondr�, comme si toute vie s��tait an�antie avec la cessation du bruit des choses vivantes. Alors, nous est-il dit, bien que le Ma�tre lui-même soit l�, tenant la main de son disciple, le disciple n��treint que le vide; il semble qu�il est perdu de vu son Ma�tre et tous ceux qui l�on pr�c�d� sur la Voie, et qu�il se sente isol� au sein de l�insaisissable espace, sans rien au-dessus, ni au-dessous, ni d�aucun c�t�. Et dans cet instant de silence la vie semble �tre en suspend; dans cet instant de silence il semble que tout, que l�existence m�me de l�Âme ait cess�.
����������� Et c�est � travers ce silence que, de l�autre rive des choses, la Voix se fait entendre, La Voix qui, entendue dans le silence, sera per�ue � jamais parmi tous les bruits du monde. Cette Voix une fois entendue, l�oreille restera toujours sensible � sa m�lodie. Aucun des sons que la terre peu rendre ne sera jamais capable de noyer cette harmonie qui s�est fait entendre � l�Âme dans le silence.
����������� Ces deux V�rit�s, nous est-il dit, doivent �tre senties,� doivent �tre �prouv�es avant qu�il soit possible d�atteindre aux vraies Portes d�Or. Ces deux v�rit�s doivent �tre v�cues par l�aspirant avant qu�il puisse gravir les marches et attendre, debout sur le seuil, qu�on lui permette d�entrer au Temple m�me.
����������� D�apr�s la description qui en est donn�e, les deux autres V�rit�s semblent appartenir plut�t � l�int�rieur du Temple qu�� l�ext�rieur. Et cela, bien qu�elles se trouvent inscrites dans � l�antichambre �, - car on trouve inscrites dans cette antichambre bien des pr�ceptes qui ne seront enti�rement accomplis que sur l�autre rive, pr�ceptes destin�s � guider l�aspirant� afin qu�il sache dans quel sens il doit diriger ses efforts, afin qu�il puisse se pr�parer au travail int�rieur du Temple m�me. Car il me semble, d�apr�s la description faite, que ces deux autres grandes V�rit�s � ayant trait au pouvoir de parler en pr�sence des Ma�tres et de se tenir devant Eux face � face � ne trouvent leur plein accomplissement qu�une fois franchies les Portes d�Or, bien que le n�ophyte puisse tenter de les faire fleurir dans son Âme d�s l�Enceinte Ext�rieure.
����������� Quelles sont donc ces deux autres V�rit�s dont les signes pr�curseurs se montrent dans le n�ophyte parvenu au seuil du Temple ?
����������� La premi�re � pouvoir de parler en pr�sence des Ma�tres � c�est, nous dit-on, l�appel jet� par l�Âme vers la Puissance qui est � la t�te du Rayon [Ou de la Hi�rarchie (N.D.T.)]. ) �auquel appartient l�aspirant. L�appel monte vers les sommets, puis, renvoy� comme un �cho, il rebondit vers le disciple et, passant outre, se propage dans le monde des hommes. Le n�ophyte demande � savoir � c�est l� son appel � et la r�ponse � l�appel, venue d�en haut, lui donne le pouvoir de transmettre la connaissance qu�il re�oit. Il ne pourra parler en Leur pr�sence que s�il transmet aux autres le savoir obtenu, que s�il devient lui-m�me un cha�non de la grande cha�ne qui unit le plus Haut au plus bas, que s�il fait passer � ceux qui sont au-dessous de lui la connaissance des v�rit�s que sa situation lui permet de comprendre. C�est pourquoi il est dit que celui qui demande � �tre n�ophyte doit � l�instant devenir serviteur, car il ne pourra recevoir que s�il consent � donner.
����������� Ce pouvoir de la parole � non pas de la parole purement externe qui n�appartient qu�aux plans inf�rieurs, mais de la parole vraie qui parle d�Âme� Âme et montre la voie � ceux qui la cherchent non par de simples mots, mais en leur faisant sentir la v�rit� que les mots expriment si imparfaitement � ce pouvoir de parler d�Âme� Âme n�est donn� au n�ophyte que s�il d�sire en user pour le service, s�il d�sire devenir une de ces langues de feu vivant qui se meuvent � travers le monde des hommes et leur enseignent le secret qu�ils cherchent.
����������� La derni�re v�rit�, enfin, nous enseigne que ceux-l� seuls peuvent se tenir en pr�sence des ma�tres, dont les pieds sont lav�s dans le sang du coeur Les larmes, nous a-t-on dit, symbolise cette bu�e de la vie qui proc�de des sensations intenses; le sang du coeur, � son tour, repr�sente la vie elle-m�me. Lorsque les pieds du disciple sont lav�s dans le sang du coeur, cela signifie qu�il ne consid�re plus sa vie comme un bien personnel, mais ne demande qu�� la r�pandre afin que le monde entier y puisse communier. Et parce que la vie est le bien le plus pr�cieux que l�homme poss�de, c�est elle qu�il doit donner avant de pouvoir se tenir en pr�sence de Ceux qui ont tout donn�. Il ne d�sire plus la vie pour lui-m�me, il ne recherche plus la naissance pour les biens� ou les exp�riences qu�elle peut lui rapporter. Il a lav� ses pieds dans le sang du coeur, il a renonc� au d�sir de vivre pour lui-m�me, et il re�oit sa vie comme un d�p�t qui lui est confi� pour le bien de la race, pour le service de l�humanit�. Il lui faudra donc donner tout ce qui lui appartient avant de pouvoir se tenir debout en pr�sence de Ceux qui ont accompli ce total sacrifice.
����������� Vous comprenez maintenant pourquoi j�ai dit que ces deux derni�res v�rit�s trouvaient leur application plut�t � l�int�rieur du Temple qu�� l�ext�rieur; car ce sacrifice absolu de toute la vie, cette lib�ration de tout d�sir, ce renoncement � toute possession s�par�e, � tout ce qui ne peut �tre transform� en don � ce sacrifice est r�serv�, dans sa perfection finale, aux plus �lev�s d�entre ceux qui sont au seuil de l�Adeptat supr�me; c�est l� un des derniers triomphes de l�Arhat [Voir � Sagesse Antique �. chap. Xl, � L�Ascension humaine �. ] qui n�a plus qu�un degr� � franchir pour atteindre la totale connaissance, le point o� il n�y a plus rien � apprendre ni � gagner dans notre syst�me cosmique. Cependant, la� connaissance de cette V�rit�, qui deviendra plus tard une r�alit� vivante, ne peut qu�aider � diriger la vie du n�ophyte, c�est pourquoi nous la trouvons inscrite dans l�antichambre, bien que nul, en cette p�riode pr�paratoire, ne puisse esp�rer l�atteindre compl�tement.
����������� En consid�rant ces degr�s qui conduisent au seuil du Temple, nous commen�ons � comprendre un peu ce que doivent �tre ceux qui se tiennent au seuil m�me, pr�ts � franchir les Portes d�or. Il leur reste encore bien des imperfections, bien des choses � accomplir dans les vies qui vont suivre : il leur reste encore quatre grands degr�s � franchir avant d�atteindre la condition sublime du Ma�tre. Mais nous voyons qu�ils sont tous des hommes � la r�solution ferme, au caract�re bien d�fini, � la vie purifi�e, aux passions �teintes ou en voie de s��teindre, ma�tres d�eux-m�mes, ardemment d�sireux de servir � des hommes dont la noble existence est remplie d�aspirations pures et sublimes.
����������� Et maintenant, parvenus sur le seuil, osons jeter un moment nos regards � l�int�rieur, afin de comprendre plus clairement encore ce qui attend l�homme au del� des Portes d�or, afin de comprendre pourquoi de telles conditions� sont impos�es, pourquoi l�aspirant, dans l�Enceinte Ext�rieure, doit mettre en pratique les le�ons que nous avons �tudi�es. Pour un moment laissons nos yeux se reposer, bien qu�ils ne puissent le faire qu�imparfaitement, sur les quatre Sentiers, ou les quatre degr�s du Sentier unique, qui s��chelonnent � l�int�rieur du Temple.� Chaque degr� est pr�c�d� d�un Portail, et les quatre portails sont les quatre grandes initiations. La premi�re, celle que vous trouverez souvent d�crite comme �� l�Initiation de l�homme qui entre dans le courant � - expression employ�e dans La Voix du Silence et dans maint ouvrage exot�rique � marque le passage du seuil, passage net et pr�cis, entr�e d�finitive du Temple d�o� le disciple initi� ne ressortira jamais plus pour retomber dans la vie du monde. Il n�en ressortira jamais, car il reste toujours au sein du Temple alors m�me qu�il travaille parmi les hommes.
����������� Cette entr�e dans le courant est donc un degr� bien d�fini, et vous trouverez dans les ouvrages exot�riques que le disciple, parvenu � ce point, a encore devant lui sept incarnations terrestres. Dans une note de �La Voix du Silence �il est dit qu�un Ch�l� [disciple.] entr� dans le courant atteint rarement le but dans la m�me existence et qu�il lui faudra g�n�ralement sept incarnations pour franchir le degr� supr�me. Mais il est bon de nous rappeler, dans nos lectures, que ces phrases ne doivent pas toujours �tre prises au pied de la lettre : car les vies sont des effets, et ne sont pas toujours mesur�es par des naissances et des morts terrestres. Peut-�tre sont elles plus souvent des stades du progr�s de l�homme que des incarnations physiques; - cependant� elles peuvent parfois �tre comprises entre le berceau et la tombe. Et ces derni�res vies du disciple se suivent sans interruption. Il passe de l�une � l�autre, progressant toujours, sans aucune solution de continuit� dans son �tat conscient. Pendant cette succession rapide d�existences, toutes les faiblesses qui subsistent encore en la nature humaine doivent �tre �limin�es une � une, �limin�es d�une mani�re compl�te et d�finitive. Ce ne sont plus les travaux incomplets de l�Enceinte Ext�rieure, ce ne sont plus les efforts partiels, les tentatives inachev�es. Ici chaque travail entrepris doit �tre enti�rement termin�, et l�on nous enseigne qu�� chaque degr� certaines � entraves � bien d�termin�es doivent �tre bris�es, certaines faiblesses de la nature humaine doivent �tre enti�rement �limin�es, � mesure que le disciple poursuit sa marche vers la perfection, vers la totale manifestation du Divin dans l�homme.
����������� Au sujet de la deuxi�me Initiation il est dit que l�homme qui la franchit ne rena�tra qu�une fois. Une seule fois il se verra forc� de revenir avant que s�ach�ve pour lui le cycle des naissances et des morts obligatoire. Il pourra revenir maintes fois en incarnation volontaire, mais ce sera de sa propre volont� fix�e dans la voie du service, et non plus parce qu�il est li� � la roue des naissances et des morts.
����������� Ce degr� franchi, la troisi�me grande Initiation atteinte, le disciple devient � celui qui ne rena�tra plus �, car dans cette incarnation m�me il franchira le quatri�me degr� qui le conduira jusqu�au seuil du Nirv�na; et d�s lors nulle loi ne peut plus lier l�Âme aux mondes inf�rieurs, car tous ses liens sont rompus et elle est libre � tout jamais. Le quatri�me degr� est celui de l�Arhat, o� les derni�res �entraves� sont compl�tement bris�es [Pour l��tude des divers stades de l�Initiation,� voyez le �Sentier du disciple�, par Annie Besant. Voyez aussi �Sagesse Antique�, ch. Xl �L�Ascension humaine� (N.D.T.).].
����������� Pouvons-nous tenter de d�crire ces derniers stades de l�ascension humaine, ces quatre degr�s de l�Initiation? Nous sera-t-il possible de concevoir, quelque imparfaitement que ce soit, le travail qui permet � l�homme de franchir ces quatre Portails, l�effort qui, de l�autre c�t� du seuil, transforme enti�rement son existence? � Nous avons vu que le candidat est loin d��tre parfait. Les ouvrages o� transpara�t une lueur �man�e de l�int�rieur du Temple nous disent qu�il reste encore dix entraves de faiblesse humaine qui doivent, une � une, �tre rejet�es. Je ne vous les expliquerai point en d�tail, car cela nous m�nerait trop loin. C�est l�Enceinte Ext�rieure seule que j�ai voulu d�crire ici, et non les myst�res int�rieurs du Temple. Sans entrer dans les d�tails, guidons-nous donc simplement d�apr�s ces indications, et cherchons � comprendre pourquoi les Gardiens du Temple sont si exigeants, pourquoi ils attendent de nous un si grand effort avant de consentir � nous ouvrir les Portes sacr�es.
����������� Il est facile, me semble-t-il, de voir que les conditions d�crites par les conf�rences pr�c�dentes doivent �tre partiellement remplies avant que l�aspirant puisse franchir le seuil. Chaque degr� franchi de l�autre c�t� mettra entre ses mains des puissances de plus en plus grandes. De l�autre c�t�, � l�int�rieur du Temple, ses yeux seront ouverts; il pourra agir, vivre, en une mani�re impossible � r�aliser en de�� du seuil. Le fait de voir, et d�entendre, et d�agir, fera de lui un homme tr�s diff�rent de ceux qui l�entourent, un homme dou� de pouvoirs qu�ils ne partagent point, d�une vision qu�ils ignorent, de connaissances qui leur �chappent. Il devra se mouvoir parmi eux sans �tre r�ellement l�un d�entre eux, car tout en participant � leur vie commune, il sera par sa nature un �tre bien diff�rent. Mais s�il en est ainsi, n�est-il pas juste d�exiger que le disciple se distingue par son caract�re du commun des hommes avant que ces pouvoirs lui soient confi�s? Car une fois obtenus, il les poss�de et peut les employer comme bon lui semble.
����������� Supposez donc qu�il soit afflig� des faiblesses si communes dans le monde ext�rieur, qu�il soit facilement irrit� par les fautes de ceux qui l�entourent, qu�il soit facilement d�mont� par les �v�nements communs de la vie journali�re; supposez que son humeur ne soit pas bien ma�tris�e, qu�il n�ait pas en son coeur une compassion toujours croissante, une sympathie profonde et large; supposez qu�une injure puisse provoquer chez lui la col�re et non la compassion, l�irritation et non le pardon, qu�il ait, en un mot, peu de tol�rance et peu de patience � quel sera le r�sultat de l�admission d�un tel homme au del� du seuil, de la mise � sa disposition , m�me dans une faible mesure, de pouvoirs qui sont surhumains si l�on prend pour type l�homme ordinaire? Ne devra-t-on pas craindre, �tre certain m�me, de voir ces petites fautes, si communes chez ceux qui vivent de la vie du monde, amener comme r�sultat des catastrophes? Chez un disciple irrit�, ces puissances nouvelles �closes en son Âme, la force de sa volont�, l�intensit� de sa pens�e, ne sont-elles pas une source de danger pour ses semblables si elles ne sont ma�tris�es et contenues? Supposez qu�il manque de tol�rance, qu�il n�ait pas appris � compatir, � conna�tre les faiblesses par lui conquises, et � comprendre toute la facilit� d�une chute : qu�elle sera parmi les hommes la position de cet Initi� capable de voir les pens�es, de discerner les faiblesses, de lire comme � livre ouvert, dans cette � aura � dont nous parlions tout � l�heure, ces traits intimes du caract�re que les hommes se cachent entre eux sous le masque des apparences ext�rieures. � quelle sera dis-je, la position de celui qui voit ses semblables tels qu�ils sont r�ellement,, et non plus tels qu�ils peuvent para�tre? Assur�ment il ne peut �tre juste ni bon qu�une telle puissance � et c�est une des moindres que donne l�Initiation � soit plac�e entre les mains d�un homme qui n�a pas appris, par ses propres �preuves, � compatir avec les plus faibles; d�un homme que le souvenir de ses propres fautes n�incline pas, secourable et compatissant, aux c�t�s du plus imparfait de ceux qu�il rencontre sur son chemin.
����������� Il est donc juste et bon que l�aspirant soit oblig� de satisfaire � ces exigences inflexibles avant qu�on lui permette de franchir le seuil. Il est juste et bon qu�il soit tenu d��liminer en grande partie ces fautes ordinaires des hommes avant d��tre admis dans ce Temple puissant o� il n�y a place que pour les Assistants vou�s au service, � l�amour de l�humanit�. Et la t�che qu�il y devra remplir est tellement gigantesque qu�un progr�s franchement r�alis� en semble comme un pr�liminaire indispensable. Car il ne s�agit de rien moins que de s�affranchir de toute trace des faiblesses humaines, d�acqu�rir toute connaissance possible dans les limites de notre syst�me cosmique, de d�velopper en soi-m�me des pouvoirs capables de placer toute cette connaissance, � volont�, � la port�e de la conscience en sorte qu�il suffise de porter son attention dans une direction quelconque pour saisir � l�instant tout ce qu�il y a l� de connaissable.
����������� Telle est, en effet, la position qu�occupe l�Adepte. L�Adepte est �celui qui n�a plus rien � apprendre�; et l�Adeptat n�est que le degr� final de ce Sentier int�rieur du Temple, que nous consid�rons maintenant, et qu�il faudra gravir en quelques br�ves vies, - t�che si gigantesque, r�alisation si sublime que, n��tait le fait que des hommes l�on accomplit dans le pass�, et que d�autres l�accomplissent aujourd�hui m�me, elle semblerait �tre au-del� de toute possibilit�. Quelle impossibilit� ne serait-ce pas, au point de vue de l�homme ordinaire, que d�assigner cette courte s�rie d�existences au progr�s inconcevable qui doit porter le disciple du niveau comparativement bas de la premi�re Initiation jusqu�� la hauteur sublime o� se tiennent les Adeptes parfaits, couronnement et fleur de toute l��volution humaine? Et puisque c�est l� l�exploit qu�il nous faudra accomplir, puisque aucune trace de faiblesse humaine et d�ignorance humaine ne devra rester attach�e � l�Arhat pr�t � recevoir l�Initiation finale, il n�est gu�re �tonnant qu�un travail s�rieux s�impose avant m�me que le seuil puisse �tre franchi, il n�est gu�re �tonnant que les fondations dont nous avons parl�, et qui auront � soutenir le poids d�un �difice colossal, doivent �tre rendues solides et fermes.
����������� Et songez qu�une fois les yeux ouverts, la t�che doit sembler plus immense encore qu�aux jours d�aveuglement; que pour celui qui est entr� dans la Voie, la Voie doit sembler bien plus haute et plus longue qu�elle n�est aux regards troubles de ceux qui n�ont pas encore atteint le Seuil. Car le disciple doit voir plus clairement Ceux qui sont au del�,� il doit mesurer plus exactement la distance qui les s�pare d�Eux. � la lumi�re de Leur gloire parfaite, combien ternes doivent sembler ses propres r�alisations; combien mesquins et faibles tous ses plus grands efforts, � la lumi�re de Leur force parfaite; combien incommensurable son ignorance, � la lumi�re de Leur parfaite sagesse! Et quatre Degr�s seulement entre eux et Lui, quatre Degr�s � franchir en quelques existences rapides � Mais combien les conditions sont diff�rentes! Cela seul permet d�expliquer la possibilit� de l�accomplissement. Car nous sentons que les hommes qui ont achev�, et ceux qui sont en voie de le faire, sont entr�s, aussit�t le seuil franchi, dans un mode de vie si diff�rent, que ce qui semblait impossible en de�� devient possible au del�, et que ce qui paraissait si difficile est accompli avec une facilit� relative.
����������� Bien que nous ne puissions pas concevoir pleinement toutes ces conditions nouvelles qui nous attendent au del� du seuil, certaines d�entre elles semblent possibles � comprendre, et elles montrent combien la vie int�rieure du Temple diff�re de la vie ext�rieure. Le premier fait qui ressort, dans ce changement de condition, c�est que les hommes qui sont l� comprennent, - et ce mot � comprennent � renferme tout un monde. Vous connaissez les paroles que j�ai omises intentionnellement, la semaine derni�re, en vous citant le chant de triomphe qui s��chappe des l�vres du Bouddha lorsqu�il proclame la fin de l�esclavage et l�aurore de la libert�; vous savez que ce cri, jet� vers les hommes du monde ext�rieur pour leur dire la cause de la mis�re humaine, parle aussi de la cessation de cette mis�re, cessation qui proc�de de la perception de la r�alit� :
O vous qui souffrez ! Sachez
Que vous �tes vos propres bourreaux. Nulle autre force ne vous contraint,
Nulle autre volont� ne vous lie � la roue des vies et des morts.
Celui qui a franchi le seuil sait que ces paroles sont la pure v�rit�. La souffrance des hommes vient d�eux-m�mes; ils ne sont point li�s. La compr�hension de ce fait transforme, aux yeux du disciple, la face du monde; et toutes les difficult�s du Sentier changent �galement d�aspect. Car une fois que nous sentons, une fois que nous comprenons que les ennuis et les difficult�s du monde proc�dent de l�ignorance, que les hommes souffrent parce qu�ils ne savent pas qu�ils passent de vie en vie, et qu�ils progressent si lentement � cause de cette ignorance m�me; une fois que nous savons que la vie leur profite si peu parce qu�ils ne savent point, et que cette roue des naissances et des morts les tient li�s � cause de leur aveuglement, parce qu�ils ne voient pas que la libert� leur est acquise s�ils veulent seulement s�en convaincre; ces choses une fois comprises (et il ne s�agit pas encore ici de la vision du Sage Illumin�, mais d�une conception cependant assez claire pour entra�ner la pleine conviction), le monde entier change d�aspect aux yeux du disciple qui a franchi le seuil. Et lorsqu�il jette ses regards en arri�re sur la foule des hommes, avec toutes leurs tristesses et toutes leurs mis�res, avec leurs yeux mouill�s de larmes et leurs coeurs bris�s par la douleur, il sait que ces souffrances auront une fin, et que la mort de l�ignorance am�nera la mort de la douleur. La mis�re humaine perd ainsi son caract�re navrant; et bien que la tristesse puisse subsister, le d�sespoir a quitt� pour toujours l�Âme du disciple. Et c�est plus qu�un espoir, c�est une certitude; c�est plus que l�attente de l�aube, c�est la vision en soi-m�me du soleil levant, la certitude du jour qui luira finalement pour tous.
����������� D�autres changements encore surviennent dans la condition du disciple qui a franchi le seuil. Un des plus grands bienfaits que lui donne l�Initiation, c�est la possession d�un �tat conscient qui ne sera plus interrompu, sur lequel la mort n�aura aucun pouvoir, sur lequel la naissance ne pourra plus passer l��ponge de l�oubli. Sa conscience, � travers les vies qui l�attendent, doit �tre une conscience continue, ininterrompue, une soi-conscience qui, une fois acquise, ne pourra jamais �tre perdue ni obscurcie. En v�rit�, la soi-conscience de l�Âme ne peut jamais �tre perdue une fois qu�elle a commenc� chez l�homme; mais elle ne s�exprime pas dans la conscience c�r�brale chez celui qui n�a pas franchi le seuil. Mais de l�autre c�t�, � l�int�rieur du Temple, la soi-conscience est un savoir ininterrompu, en sorte que l�Âme peut regarder en avant et en arri�re et se sentir forte dans la connaissance du Soi immortel. Et voyez comme toute sa vie sera par l� modifi�e. Quelles sont en effet les deux grandes douleurs de l�existence, auxquelles l�homme ne peut �chapper? � Deux des pires douleurs qui ont broy� et broient encore les coeurs des hommes sont celles de la s�paration et de la mort, - s�paration par le fait de l�espace, quand des centaines ou des milliers de lieues s��tendent entre l�ami et l�ami; s�paration par le fait de la mort qui interpose son voile sombre entre l�Âme rest�e sur terre et l�Âme partie dans l�au-del�. Mais pour celui qui a franchi le seuil, la s�paration et la mort n�existent pas comme au temps o� il se mouvait dans le monde des hommes. Il peut les sentir jusqu�� un certain point, puisque l�entrave de l�ignorance n�est pas encore totalement rejet�e. Il peut souffrir encore de la s�paration par la distance ou par la mort, - mais cette souffrance ne peut plus voiler totalement sa vie v�ritable, elle ne peut plus interrompre sa conscience de la r�alit�. C�est seulement quand il est dans son corps physique que la s�paration existe pour lui; et ce corps, il peut � volont� le quitter pour aller l� o� le temps et l�espace ne l�affectent plus. En sorte que ces deux grandes souffrances humaines sont ray�es � tout jamais de ses existences futures. Nul ami pour lui ne peut �tre perdu, nul mort ne peut enlever � ses c�t�s ceux qui sont li�s � lui par le lien de la vie r�elle. Ni la s�paration ni la mort n�ont pour lui d�existence v�ritable; sous leur forme la plus terrifiante, maux du pass� vaincu, elles sont mortes pour toujours.
����������� Et ce n�est pas tout.� Non seulement cette conscience ininterrompue� rend toute s�paration impossible, mais elle signifie encore que, dans ces vies qui l�attendent, il ne pourra plus retomber dans le m�me �tat qu�au temps pass�. Il ne retournera plus dans le monde, inconscient, pour gaspiller peut-�tre la moiti� d�une vie � ne pas savoir ce qu�il cherche.� Il ne rena�tra plus, ignorant toute r�alit�, aveugl� par le voile de la mati�re, inconscient du vrai but der la vie. Il reviendra, en v�rit�, mais il reviendra avec la connaissance; il reviendra, mais pour progresser; et ce sera de sa propre faute, maintenant, si son progr�s se ralentit, s�il n�avance pas d�une mani�re continue. Il a acquis la conscience qui rend le progr�s possible, et tout arr�t ou tout ralentissement devra �tre imput� � lui-m�me, et non pas � la n�cessit�.
����������� Un autre changement de conditions est d� aux nouveaux liens d�amiti� que le disciple forme, amiti�s qu�aucun nuage ne trouble, que le doute et le soup�on ne peuvent atteindre, amiti�s qui planent au-dessus de toutes les brumes terrestres, o� les choses d�en bas n�ont plus de place et ne peuvent jeter leur trouble dans l�Âme Car, en p�n�trant au Temple, il est entr� en rapport avec les grands Instructeurs; en franchissant le seuil, les Ma�tres sont devenus pour lui visibles, et la possibilit� seule d�un contact si �lev� modifie son existence � tout jamais. Il a pris contact avec le permanent, et le transitoire ne peut plus l��branler comme aux jours o� il ne connaissait pas l��ternel. Ses pieds sont fix�s pour toujours sur le roc, et les vagues ne pourront plus le balayer et l�obliger � se d�battre � nouveau dans la mer d�mont�e.
����������� Ainsi donc, de l�autre c�t� du seuil, quelque gigantesque que la t�che puisse �tre, les conditions diff�rent � tel point qu�elle en semble moins impossible; et nous commen�ons � comprendre comment elle a pu �tre accomplie autrefois, comment elle peut l��tre aujourd�hui m�me. Nous commen�ons � concevoir qu�avec de tel changements la Voie, quelque immense qu�elle soit, peut cependant �tre suivie jusqu�au bout; et que ces degr�s qui gravissent le flanc de la montagne, bien qu�ils transportent l�Âme� des hauteurs incommensurables, peuvent n�anmoins �tre franchis avec une rapidit� incroyable� sous des conditions si diff�rentes, alors que s��panouissent toutes les puissances de l�Âme, alors que les t�n�bres sont dissip�es et que la lumi�re est vue.
����������� En consid�rant ces degr�s supr�mes de l�ascension humaine qui restent encore � franchir, en examinant ces entraves qui restent � briser, nous voyons que les derni�res phases de la faiblesse humaine, une � une, vont dispara�tre pour laisser enfin briller, forte, calme et pure, la lumi�re de l�Âme L�illusion du � moi � inf�rieur se dissipe, et tous les hommes sont regard�s comme un avec le Soi r�el. Le doute s��vanouit remplac� par la connaissance; le doute devient impossible � mesure que l�esprit per�oit la r�alit�. Bient�t l�Âme ne d�pend plus en rien des choses ext�rieures et transitoires. Dans son contact intime avec les r�alit�s vivantes toute chose externe reprend la place vraie; l�ext�rieur perd toute importance r�elle, et les choses qui divisent les hommes sont connues comme des ombres et non plus comme des r�alit�s. Toutes les diff�rences de religions, de c�r�monies plus ou moins efficaces, tous les rites exot�riques si divers, appartiennent au monde ext�rieur et ne sont que des murs d�illusion dress�s entre les Âmes des hommes. L�Âme qui apprend verra tomber toutes ces entraves obscures et passer, pour ne plus y revenir, ces traces de faiblesse humaine.
����������� Ensuite se d�veloppent les puissances de l�Âme, la vision et l�ou�e; des connaissances jusqu�alors insoup�onn�es font irruption de toutes parts dans l�intelligence, devenue r�ceptive tout enti�re. Les limites des sens ne subsistent plus comme ici-bas; il n�y a plus cette exclusion de l�Univers presque entier, ne laissant filtrer �� et l� qu�un fragment minuscule sous forme� de connaissance. De toutes parts le savoir fait irruption, et la surface enti�re de l�Âme est r�ceptive; en sorte que l�acquisition de la connaissance semble comme un processus de vie sans cesse accru, comme une lumineuse atmosph�re p�n�trant l�Âme qui s�ouvre de toutes parts pour la recevoir.
����������� Plus loin, nous voyons l�Âme se d�livrer des derniers d�sirs qui s�attachent � elle, nuages d�j� �th�r�s, derni�res ombres de vie terrestre capables de la retenir encore� Mais lorsque nous atteignons la derni�re des Initiations, celle qui pr�c�de le degr� supr�me et fait de l�homme un Arhat, nous trouvons qu�il est impossible de concevoir quelles entraves, quelles impuret�s peuvent subsister dans un �tat aussi sublime. Il est �crit, et � juste titre, que le Sentier de l�Arhat � est difficile � comprendre, comme celui des oiseaux dans l�air �; comme eux il semble passer sans laisser aucune trace, il semble voler sans contact, sans entraves, dans cette haute atmosph�re o� il se meut. Et de cette r�gion descend un sentiment de paix immuable. Car, nous dit-on, rien ne peut le froisser, rien ne peut l��branler, il reste inattaquable � toutes les tourmentes terrestres, dans une paix ineffable, dans une s�r�nit� que rien ne peut troubler. Ceux qui connaissent cette condition ont tent� de la d�crire; en termes n�cessairement insuffisants, comme toute parole humaine, ils ont parl� des caract�ristiques d�un homme semblable, et leurs syllabes semblent refl�ter faiblement cette condition sublime. Il est, nous disent ils;
Tol�rant comme la terre, comme la foudre d�Indra; il est comme un lac sans boue; il n�y a plus de naissance nouvelles en r�serve pour lui. Sa pens�e est calme, calmes sont ses paroles et ses actes lorsqu�il a acquis la libert� par le r�el savoir, lorsqu�il est ainsi devenu un homme tranquille.
Et il semble que, de cette tranquillit�, nous sentions descendre sur nous une impression de paix, de s�r�nit�, de calme inalt�rable que rien ne peut changer ou troubler; et nous comprenons pourquoi, d�un tel homme il est �crit :
Il n�y a point de souffrance pour l�homme qui a achev� son voyage et abandonn� la douleur, pour celui qui de toutes parts s�est d�livr� et a rejet� toute entrave.
Tel est l�Arhat qui se tient au sommet du Sentier; tel, l�homme qui n�a qu�un pas � faire pour n�avoir plus rien � apprendre; tel, le but de la Voie que tous peuvent suivre; telle, la fin de la lutte � et cette fin est la paix parfaite [Les citations sont tir�es du � Dhammapada �, chap. Vll, � L�Arhat �].
En d�crivant les stades du Sentier pr�paratoire, en parlant, en termes si imparfaits, de ce qui nous attend au del� des Portes d�Or, ai-je parfois sembl� m�exprimer trop durement, ai-je parfois sembl� vous peindre le Sentier sous des couleurs trop sombres ? � S�il en est ainsi, la faute est � moi-m�me, et non au Sentier,; s�il en est ainsi, l�erreur incombe � l�orateur, non � ce qu�il a tent� de d�crire faiblement. Car, bien qu�il y ait difficult�, lutte et souffrance, il est vrai pour tous ceux qui p�n�trent dans l�Enceinte Ext�rieure � pour ne rien dire de ceux qui ont franchi la Porte d�Or � qu�une fois entr�s dans l�Enceinte, tous les tr�sors de la terre seraient impuissants � les faire redescendre � leur condition premi�re. Et pour ceux qui ont pass� le seuil, quelle joie, quelle promesse terrestre pourrait leur faire jeter f�t-ce un coup d�oeil en arri�re sur le monde qu�ils ont quitt�? � Car ce Sentier qui s��tend devant nous est un Sentier dont les peines valent mieux que les joies de la terre, dont les souffrances sont plus glorieuses que les prosp�rit�s du monde. Si vous pouviez condenser entre les limites d�une existence humaine toutes les joies que peut donner la terre, si vous pouviez la remplir de plaisirs, avec la puissance de jouir sans interruption; si, entre les limites de cette vie humaine, vous pouviez accumuler tout ce que l�homme conna�t des joies des sens, tout ce qu�il conna�t, m�me, des joies de l�intellect; si vous pouviez en effacer toute trace de souffrance et de lassitude; si vous pouviez en faire une vie id�ale, pour autant que la terre peut fournir un id�al � alors, � c�t� des degr�s du sentier, quelques sombres qu�ils puissent sembler, vus du dehors, cette vie de joie terrestre semblerait mis�rable et terne, et ses harmonies seraient des dissonances � c�t� des harmonies qui chantent au del�. Car, sur ce Sentier, chaque pas accompli est accompli � tout jamais; chaque douleur subie, quelque profond�ment qu�elle soit sentie, est la bienvenue � cause de la le�on qu�elle apporte.
����������� Et le Sentier devient plus lumineux � mesure que d�cro�t l�ignorance, plus paisible � mesure que dispara�t la faiblesse, plus serein � mesure que les vibrations de la terre perdent leur pouvoir de froisser et de troubler. Ce qu�il est � son extr�mit� finale, Ceux-l� seuls peuvent le dire qu ont eux-mêmes terminé; ceux-là seuls peuvent le dire qui, debout sur la cime, nous attendent � travers les �ges. Mais ceux m�mes qui ne font qu�aborder les stades inf�rieurs savent que les tristesses de ce Sentier sont des joies lorsqu�on les compare aux joies de la terre, et que la moindre des fleurs qui y croissent vaut tout les joyaux que la terre peut offrir. Et telle est la Lumi�re qui toujours l�illumine, la Lumi�re qui grandit sans cesse � mesure que le disciple avance, qu�un seul de ses rayons suffit � faire sembler obscure tout le soleil d�ici-bas.� Ceux qui foulent ce Sentier connaissent la paix qui surpasse toute compr�hension, la joie que nulle mis�re terrestre ne peut d�truire, ils go�tent le repos supr�me sur le roc que nul tremblement de terre ne peut briser, dans l�asile int�rieur du Temple o� r�gne pour toujours la f�licit�.
PAIX � TOUS LES �TRES.
Le présent ouvrage est la traduction de "In the Outer Court" recueil de cinq conférences données par Annie Besant à Londres, Angleterre in 1895.
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