LA MORT ET LES ÉTATS QUI LA SUIVENT
par C.W.Leadbeater
Conférence
publique faite le 23 Décembre 1899, à Paris,
sous les auspices de la Section française de la Société
Théosophique.
Deuxième Édition - 1907
Publications Théosophiques, 10, rue Saint Lazare, Paris
Le sujet sur lequel je vais vous entretenir ce soir a pour titre: La mort et les états qui la suivent. Je crois que ce sujet ne peut qu'être intéressant pour nous tous, parce que, de toutes les questions touchant notre avenir, la plus certaine est que nous mourrons tous. Ce qui nous pousse encore davantage à l'étude de cette question, c'est qu'il n'est personne, parmi nous, qui, à un moment ou à un autre, n'ait perdu quelque personne aimée. Pour toutes ces raisons, donc, il est certain que toutes les informations sur les états qui suivent la mort doivent nous intéresser vivement.
Ce que je veux exposer ce soir, c'est l'enseignement de la théosophie à ce sujet, et je crois que vous jugerez cet enseignement digne de toute votre attention. Nous ne demandons à personne d'accepter aveuglément aucune des assertions émises par la théosophie; nous les exposons en disant, d'abord, qu'elles nous ont été transmises par de plus savants que nous, et, ensuite, que plusieurs, parmi nous, sous la direction de tels Maîtres, ont appris à vérifier par eux-mêmes certaines de ces assertions.
Je crois que cette modeste affirmation a déjà plus de poids que celle des prédicateurs de la plupart des églises, car bien peu d'entre eux pourront vous dire que, de leur propre expérience, ils savent quelque chose concernant ces états.
Voilà donc une notion un peu nouvelle et digne d'être prise en considération.
Tout
d'abord, un grand nombre d'idées fausses, concernant la mort,
ont cours parmi nous, et il en résulte pour l'homme un mal inutile.
Je reconnais dans l'auditoire quelques membres de la Société
Théosophique qui ont déjà consacré un certain
temps à l'étude de ces questions: ce que je vais dire n'aura
aucune nouveauté pour eux. Je m'adresse donc plutôt aux autres,
et, à ceux-là, j'espère parler un langage nouveau; j'espère
pouvoir leur donner "la bonne nouvelle".
Avant tout, je vais mentionner trois de ces idées erronées dont je parlais tout à l'heure, puis je chercherai à vous démontrer comment la vérité est précisément contraire à ces fausses conceptions ordinaires.
En premier lieu,je rencontre l'idée si universellement acceptée, à l'époque actuelle, que la mort est la fin de tout. Peut-être direz-vous que cette idée n'est partagée que par des matérialistes très radicaux. Néanmoins, vous pourrez constater qu'un grand nombre de personnes qui rejetteraient l'épithète de matérialistes agissent comme si leur mort devrait être la fin de tout. Quoi qu'elles puissent dire, elles ne croient pas, en réalité, à une vie posthume, car leur existence tout entière démontre qu'elles y prennent, comme éléments de calcul, uniquement les choses qui sont en deçà de la tombe. Cette idée donc, que la mort est la fin de tout est une erreur absolue.
Au contraire, comme l'ont dit les auteurs classiques, la mort est la porte de la vie, elle conduit l'homme d'un stade de la vie à un autre, et rien de plus.
Vous pourrez croire, après tout, que ce n'est là qu'une assertion identique à celle qui est faite par la plupart des religions, mais, par ce seul fait, vous devriez comprendre la vérité qui s'y trouve renfermée.
Néanmoins, j'espère pouvoir vous montrer que la base sur laquelle j'établis cette assertion est différente de celle que les prêtres adoptent.
Une autre idée fausse, concernant la mort, est cette idée que la mort produit un changement radical de l'être humain, qu'un homme ordinaire, comme nous tous, par exemple, devient aussitôt après sa mort, soit un ange, soit un démon. L'homme, lorsqu'il meurt, ne transforme pas davantage sa nature réelle, qu'il ne se transforme en passant d'une chambre à une autre. S'il était, avant la mort, un homme à l'intelligence élevée, subtile, il se trouve encore, après sa mort, un homme à l'intelligence élevée ou subtile; s'il était un homme pensant bien et agissant bien, il reste un homme capable de bonnes pensées et de bonnes actions; s'il était ignorant, le changement subit de la mort ne lui donne pas de connaissances plus hautes, il reste le même ignorant qu'il aura été sur terre; et, si ses désirs, ici-bas, étaient vils et bas, ils ne subissent aucune variation après la mort.
Il n'y a donc pas, comme je l'ai dit, une transformation de la nature, mais, en quelque sorte, un passage d'un état à un autre état, ou d'un lieu à un autre lieu.
J'espère vous montrer tout à l'heure, vous faire comprendre l'état dans lequel l'homme passe alors.
La troisième fausse conception concernant la mort est cette idée qu'il nous est tout à fait impossible de savoir quoi que ce soit de l'état qui succède à la mort. C'est là une idée commune depuis un grand nombre d'années - et par ce mot, j'entends dire qu'elle est commune parmi nous, dans notre civilisation actuelle, parce que, dans des civilisations plus antiques, cette idée n'a jamais été admise. Les anciens reconnaissaient parfaitement la possibilité d'obtenir beaucoup de connaissances concernant l'état qui suit la mort.
Nous sommes fréquemment portés à adopter un point de vue très étroit et très mesquin, en ce qui concerne la civilisation humaine, en général. Tout ce que nous ignorons, nous croyons que le monde l'a ignoré; parce que nous croyons représenter la plus haute forme de civilisation existant à l'époque actuelle, nous croyons savoir tout ce qui peut être su. Sans doute, nous pourrions savoir tout ce que l'homme actuel a la possibilité de savoir, si nous consentions à apprendre; mais malheureusement, en même temps que la connaissance très réelle que notre civilisation nous a donnée, nous possédons ce que j'appellerai une très haute idée de nous-mêmes. Nous croyons, en somme, que tout ce qui en dehors du champ de nos connaissances actuelles ne vaut pas la peine d'être appris, et nous avons une force tendance à croire qu'avant notre époque,l'homme était essentiellement un «homme primitif», et que, puisque les anciens n'avaient pas inventé les chemins de fer et le télégraphe, ils ne pouvaient pas davantage avoir découvert quoi que ce soit sur les questions élevées concernant l'âme.
Ceci est donc un fait, et un fait très fâcheux, à savoir que, pendant bien des années, nous avons pratiquement organisé notre vie d'après cette théorie, sans vouloir tenir compte des civilisations plus antiques qui avaient étudié ces questions. Par une étude approfondie de la littérature orientale, il aurait été en notre pouvoir de savoir beaucoup de choses concernant les états qui suivent la mort. Mais nous avons étudié cette littérature avec la persuasion qu'elle est pleine de superstitions, et que nous devons, sur ce point, en savoir plus long que les auteurs de ces vieux ouvrages. Quelques-uns d'entre nous ont au contraire accepté, sans trop y réfléchir, les assertions émises par les religions actuelles de l'Occident, et, bien que l'enseignement de ces religions soit assez précis d'une certaine manière, l'on s'imagine de très bonne foi qu'après la mort d'un homme, il est impossible de rien savoir au sujet de l'état où il se trouve, laquelle assertion n'est pas plus exacte que les autres.
Pour me faire comprendre de ceux qui n'ont pas étudié cette question, il me faut dire quelques mots de la constitution de l'être humain.
L'homme ne possède pas seulement une âme et un corps, c'est-à-dire deux choses résidant l'une dans l'autre; au contraire, l'âme véritable ou esprit de l'homme, possède plusieurs véhicules qu'elle peut habiter sous des conditions diverses. Nous sommes accoutumés, au moins les églises protestantes que je connais, à parler de l'âme et du corps, comme s'il ne pouvait y avoir rien en dehors de ces deux principes. Je n'en vois pas exactement la raison, parce que les Écritures sur les quelles ces religions se basent parlent très distinctement d'un plus grand nombre de divisions. Vous trouverez, par exemple, que Saint Paul [ Ep. aux Corint. XV, 40-47 ] parle de quatre choses distinctes dans l'homme. Il parle de l'esprit et de l'âme comme de deux choses distinctes en les appelant par des noms différents, et il parle d'un corps physique, d'un «corps charnel», comme il l'appelle, et d'un corps spirituel. Voilà donc, comme vous le voyez, quatre principes constitutifs dans l'être humain.
Le premier point que j'aimerais à vous faire comprendre, par rapport aux états qui suivent la mort, c'est que tout ce que l'homme perd à ce moment, c'est le corps physique, notre enveloppe actuelle. Il conserve ce que St. Paul a appelé son corps spirituel; il conserve donc encore, pour nous servir des mêmes expressions, un esprit et un corps d'une autre espèce, et, par suite, il vit, dans ce nouveau corps, tout comme il vivait antérieurement dans son corps physique.
Il ne faut pas, non plus, voir là un corps nouveau qu'il revêt pour la première fois au moment de la mort. Ce corps, au contraire, faisant partie intégrante de lui-même, pendant toute sa vie terrestre. Seulement, sa composition étant d'une matière beaucoup plus subtile que tout ce que nos sens physiques peuvent percevoir, l'homme n'est généralement pas conscient.
Beaucoup d'expériences ont été faites, quelques-unes des plus remarquables dans cette ville même, qui montrent distinctement l'existence d'une partie, au moins de ce corps subtil à l'intérieur de l'homme vivant; beaucoup de vos expérimentateurs, au cours de leurs expériences, ont réussi à isoler, à extraire une partie de ce corps subtil du corps physique. Si ce fait ne prouve pas que ce soit là le corps qui survit après la mort, il prouve tout au moins son existence, et il me semble que la preuve de la persistance de l'âme dans ce corps subtil peut être déduite des expériences faites par les spirites.
Ce que je m'efforce de vous donner, en ce moment, c'est l'enseignement théosophique sur ce sujet; et cet enseignement dit que l'âme possède un plus grand nombre de véhicules que le corps physique que vous voyez, et qu'après avoir abandonné ce corps physique, au moment de la mort, elle continue à vivre dans un corps plus subtil.
Et de même que ce corps subtil peut être extrait du corps physique pendant la vie même [ Vos expérimenteurs l'ont démontré ], de même il est possible à l'homme incarné de devenir conscient de ce corps subtil et d'obtenir des notions sur l'état dans lequel il se trouvera après sa mort.
Vous concevrez que cette idée seule suffit à dissiper une grande partie de nos préventions à l'égard de la mort, entre autres le sentiment d'horreur qu'elle nous inspire. La base principale de cette horreur, est l'idée que l'on va entrer dans l'inconnu; mais si nous nous rendons compte que ce soi-disant inconnu peut être connu pendant cette vie même, toute cette incertitude se dissipe immédiatement, nous savons à quoi nous devons faire face, et que le résultat soit bon ou mauvais, agréable ou terrible, la plus grande partie de la terreur disparaît avec cette ignorance de l'inconnu.
Voilà donc une des bonnes nouvelles que la théosophie vous apporte, c'est que les états d'après la mort sont parfaitement connaissables et susceptibles d'exploration par un assez grand nombre d'êtres humains; et, bien plus, que ces états ont été explorés par beaucoup d'êtres humains à diverses périodes de l'histoire.
Quelle est donc, dirons-nous alors, la vie où l'homme se trouve transporté lorsqu'il quitte ce corps physique?
L'Église a eu infiniment raison de nous apprendre constamment que cette vie-là dépend très largement de cette vie-ci; elle a eu raison de nous dire que l'état dans lequel l'homme se trouve après la mort dépend très largement de ses pensées, de ses paroles, de ses actions dans la vie physique; et, si vous y réfléchissez, vous trouverez cette assertion très raisonnable, parce que l'homme reste lui-même ainsi que je le disais. Il est donc tout naturel que des hommes ayant différé complètement pendant la vie se trouvent dans des conditions très différentes après leur mort
Il y a beaucoup de cas exceptionnels cependant et j'en mentionnerai tout à l'heure quelques-uns; mais prenons, pour commencer, le cas d'un homme très ordinaire, celui qui n'est ni saint, ni spécialement pervers, simplement un homme comme n'importe lequel d'entre nous, un homme en qui le bien et le mal se trouvent mélangés, et dont les intentions sont assez bonnes, sauf peut-être, au moment où une circonstance tend à l'affecter personnellement; dans ce cas, toujours un peu égoïste, par nature, il regarde à ses propres affaires et ne s'occupe pas beaucoup de celles des autres.
Supposons,par exemple, qu'un tel homme meurt dans la vieillesse - je dira tout à l'heure pourquoi je prends l'exemple d'un vieillard, étant donnée la différence entre celui qui meurt vieux et celui qui meurt jeune.
Cet homme, lorsqu'il meurt, se retrouvera très probablement, dans la plupart des cas, exactement là où il était auparavant, c'est-à-dire qu'il se trouvera dans sa propre demeure , là où il a vécu, là où il est mort, parmi ses proches, et conscient de leur présence. Remarquez qu'il ne s'évanouit pas du tout, ni ne se trouve tout de suite dans une condition différente; il ne disparaît ni dans le ciel, ni dans l'enfer.
Assurément, la condition dans laquelle il se trouvera pourra, dans certains cas, ressembler à une sorte de purgatoire - et, pour ma part, je n'ai pas le moindre doute que la doctrine du purgatoire ne soit une tentative de représenter les choses tells qu'elles sont en réalité,
Ce qui arrive donc, c'est que l'homme se trouve exactement tel qu'auparavant, mais avec cette différence qu'il n'est plus capable de se faire entendre, ni de se faire voir par ceux qui l'entourent, inconscient de sa présence. Mais il peut les voir, lui, et il restera en cet état pendant un certain temps, durant une période qui dépend essentiellement du genre d'existence qu'il a menée.
Afin que vous en compreniez la raison, il faut que je vous dise quelques mots du corps subtil.
Ce corps subtil est, pendant la vie, la véhicule d'expression des émotions, des passions et des désirs de l'homme. Voici ce que j'entends par là; l'homme qui a développé en lui-même la vision de ce que nous appelons le plan astral, l'homme, capable de percevoir ce corps subtil chez ses semblables, verra, en observant une personne quelconque, tous les sentiments, tous les mouvements d'émotion ou de passion éprouvés par cette personne, provoquer des vibrations intenses dans la matière de corps subtil. Or, la persistance de ce corps subtil après la mort, dépend uniquement du genre d'émotions, de sentiments, auquel cet homme s'est livré pendant sa vie. S'il s'était laissé dominer par ce que j'appellerai des émotions basses, brutales,il possédera dans ce corps subtil de la matière d'un genre très grossier, matière précisément susceptible de répondre à ces émotions grossières.
Dans la vie qui succède à sa mort, cet homme se trouvera donc retenu, pendant un temps considérable, par les émotions de sa brutale nature, et par la nécessité dans laquelle il se trouvera de se défaire d'abord de ce corps très résistant et très grossier.
Une idée, peut-être facile à comprendre, est que le corps subtil, après la mort du corps physique, commence aussi à se désintégrer graduellement.
Ce corps, et toutes les émotions inférieures dont il est le véhicule, doivent être entièrement désintégrés avant que l'homme puisse passer dans des conditions plus élevées; et il est compréhensible que le temps nécessaire pour dissiper ce corps dépendra de sa nature même. Si ses passions sont encore très fortes dans la nature de l'homme, elles conserveront cette matière subtile et vivante en état de vibration intense pendant un temps très considérable, et vous verrez ainsi la raison de ce que j'ai dit tout à l'heure, à savoir que l'âge auquel l'homme meurt est un facteur très important.
Un homme qui meurt dans la fleur de l'âge aura, très probablement, toutes ses passions, toutes ses émotions, dans un état de vitalité beaucoup plus intense, et, par suite, sa vie, sur ce plan, dans ce monde subtil, sera plus longue que celle d'un homme âgé, simplement parce que l'homme âgé aura déjà accompli une grande partie de la tâche qui consiste à se défaire de ses passions inférieures.
Lorsque l'homme s'est débarrassée de ce corps subtil dont j'ai parlé, il peut entrer alors dans un état plus élevé, et c'est l'état qui correspond d'une façon générale à ce que les Églises entendent par le Ciel. Toutes les idées que vous trouverez exprimées dans les religions ordinaires sont des reliques de la vérité ou des tentatives faites pour l'exprimer; dans beaucoup de cas, les idées sont très déformées, mais néanmoins il leur reste encore un certain sens, en général.
Prenez par exemple, le cas de cette idée du purgatoire: c'est un état que l'homme traverse après sa mort, en y séjournant plus ou moins longtemps, afin que les partie basses et vulgaires de sa nature disparaissent et qu'il puisse se débarrasser de ses désirs, de manière à être purifié, et prêt à passer dans un état plus élevé. Cette idée correspond très étroitement à l'idée de ce plan subtil dont nous parlons, avec cette seule différence que, pour nous, il ne s'y attache aucune idée châtiment de la part d'un Etre supérieur. Nous disons simplement que tout homme détermine absolument, et pour lui-même, ses conditions futures; il est inutile d'introduire là l'idée d'un juge qui récompense ou qui punit. Les états qui suivent la mort son uniquement, et d'une façon absolue, le résultat de la vie de l'homme. Si cet homme a cédé à tous ses désirs , et s'il meurt , ayant autour de lui un corps de désirs non satisfait, il souffrira certainement, mais la souffrance ne lui est pas donnée comme punition, elle est out simplement le résultat de ses actions.
Je vais donner seulement une exemple pour montrer ce que j'entends par là; je voudrais passer rapidement à l'état plus élevé qui suit la mort, et je ne tiens pas à insister davantage sur cette partie sombre de la question. Je veux donner cet exemple unique pour démonter comment l'homme peut se créer à lui-même un purgatoire très réel, presque un enfer.
Prenez le cas d'un ivrogne: Vous savez combien terrible est ce vice de la boisson, comment le désir de le satisfaire est assez puissant pour pousser un home à fouler aux pieds tous ses sentiments naturels, pour lui faire mettre de côté toute affection, tout amour envers les siens et pour lui faire priver sa famille des choses les plus nécessaires à la vie. Vous savez, sans doute, les efforts terribles qu'il faut à un ivrogne pour se réformer, pour se corriger, et combien une force presque surhumaine lui est nécessaire pour résister à la tendance impérieuse qui le hante.
Supposez, maintenant, qu'un tel homme demeure, rappelez-vous que le corps subtil dans lequel il se trouve, est la base d'expression même des désirs et des passions: il a donc le même désir et plus violent, plus terrible, qu'il ne l'avait sur terre, mais il ne peut plus le satisfaire, ne possédant plus de corps physique susceptible de boire. Vous concevez alors que cet homme a, devant lui, un enfer terrible de désirs avant que sa passion se soit épuisée. Certes l'homme n'est point brûlé par des flammes réelles, mais il est brûlé par les feux de son propre désir; et ce supplice doit être enduré jusqu'à ce que, lentement, graduellement, ce corps du désir se soit usé. Rappelez-vous, d'autre part, que l'homme s'est fabriqué, lui-même, ce corps du désir, par son vice. Personne ne le punit, mais il est obligé de se débarrasser de ce vêtement qu'il s'est tissé à lui-même, avant de pouvoir passer outre dans son évolution, et cette purification signifie pour lui de terribles souffrances, sans aucun doute.
Le temps nécessaire pour liquider, après la mort, ce résultat de la vie terrestre, dépend précisément de l'empire que le vice a eu sur l'homme.
Vous pouvez appliquer de vous-mêmes ce raisonnement aux autres passion inférieures de l'homme; car le même raisonnement peut servir à toutes. Inutile d'introduire une action extérieure, il est plus simple d'admettre que l'homme est obligé d'épuiser les obstacles qu'ils s'est créés à lui-même.
Prenez maintenant le cas d'un homme qui s'est donné quelque mal pendant la vie pour dominer cette partie inférieure de son être. Cet homme a déjà accompli une grande partie de la tâche qui consiste à se défaire de ses désirs et des particules de matière subtile qui vibrent en réponse à ces désirs.
Lorsque cet homme se trouve dans son corps subtil, après la mort, il a très peu d'éléments susceptibles de le retenir dans cet état. Les désirs ne le tourmentent pas, car ces désirs sont déjà éliminés. Cet homme est donc prêt, après un temps très bref, à passer dans des conditions plus élevées.
Il y a beaucoup de choses que j'aimerais à dire au sujet de cette vie astrale, qui suit immédiatement la mort, mais, de peur que le temps me manque,je passerai rapidement à la description de l'état plus élevé qui succède pour ainsi dire à la seconde mort, c'est-à-dire à la sortie de cette condition purgatorielle.
J'ai dit que ce deuxième état, qui suit la mort, correspondait d'une façon générale à ce que les Églises appellent le Ciel, mais je dois ici faire plusieurs réserves.
D'abord, cet état n'est pas plus une récompense des bonnes actions que l'état précédent n'était pas une punition des mauvaises. Exactement comme auparavant, ce nouvel état est le résultat d'une certaine partie des actes de l'homme pendant sa vie physique.
Observez qu'il vient déjà de se débarrasser sur ce plan inférieur des résultats. De ses passions inférieures, de ses désirs, de ses émotions; toute cette partie inférieure de son être a été , pour ainsi dire, brûlée, purifiée, pour employer bien entendu l'expression qui se rapporte au purgatoire. Débarrassé de ces éléments, l'homme est prêt à passer dans cet état plus élevé qui correspond donc, peut-être, au Ciel; mais il ne fut pas s'imaginer qu'il passe alors dans un certain lieu déterminé de l'espace où il trouve un certain ensemble de conditions; il n'entre pas directement dans une ville d'or, avec des portes de pierres précieuses, ni dans quoi que ce soit correspondant aux descriptions très belles que donnent les Écritures, lesquelles sont d'ailleurs simplement symboliques.
Ce qui lui arrive, c'est se trouve dans certaines conditions d'existence, dans un certain état conscient particulier; cet état est, en réalité, le plan de ses pensées; c'est le Monde de la pensée.
Ceux d'entre vous qui ont prêté attention à ces phénomènes ont dû se rendre compte que la pensée est une force parfaitement déterminée, une force qui peut produire des résultats définis, déterminés, en dehors même de la direction qu'elle donne aux actions.
Quelque étrange que paraisse la chose, il n'est pas du tout impossible de produire des résultats jusque sur le plan physique par l'action directe de la pensée. Des tentatives ont même été faites, ici, comme en Angleterre, de représenter des formes-pensées, au moyen de la photographie, et elles ont été plus ou moins fructueuses.
Je sais très bien que la science, en général, n'a pas encore accepté la possibilité d'une pareille action, mais pour moi, ce n'est simplement qu'une question de temps et de recherches et je crois que la science sera, un jour, obligée d'accepter la vérité en ce qui concerne ces formes-pensées, comme en ce qui concerne le corps astral, et bien d'autres choses encore; et ce temps peut même n'être éloigné que de quelques années.
Par conséquent, la pensée est une chose très réelle et les pensées de l'homme ne disparaissent pas au moment même où elles sont émises. On peut dire que l'homme s'environne d'une sorte de coque, d'une atmosphère de ses propres pensées; et, si vous y réfléchissez, vous verrez jusqu'à quel point il voit toutes choses, ici-bas, à travers cette atmosphère mentale qui lui est propre, vous observerez comment il ne peut ni en sortir, ni s'en éloigner, ni regarder quoi que ce soit d'un autre point de vue que le sien.
Cette masse de pensées dont il s'est entouré persiste évidemment avec lui, après sa mort. Beaucoup de pensées, chez la plupart d'entre nous, sont distinctement en rapport avec nos émotions, nos passions et nos sentiments inférieurs. Toutes ces pensées se dispersent, achèvent de produire leurs résultats pendant cette première période qui suit la mort, et dont j'ai déjà parlé. Mais l'homme a, aussi, des pensées infiniment plus élevées que celles qui se rattachent aux désirs. ces pensées heureusement plus fortes, dans un grand nombre de cas, que les mauvaises pensées, survivent également, et forment, dans une enveloppe qui doit être à son tour dispersée, un ensemble de forces qui achèvera de produire son résultat après la mort.
Il est très difficile, même impossible, de donner en quelques mots une idée de ce que nous entendons par le monde mental. Imaginez-vous que c'est le monde où les pensées sont des choses, des réalités objectives; et, rappelez-vous aussi que, quand l'homme est parvenu à ce point, il conserve uniquement ce qu'il a élevé dans ses tendances et dans ses pensées: tout le reste ayant été usé dans le stade purgatoriel précédent.
L'homme se trouvera donc maintenant vivre au milieu de tout ce qu'il a de plus élevé, parmi les pensées et les aspirations qu'il a nourries pendant sa vie physique, et ces tendances, rappelez-vous ceci, seront maintenant toute sa vie actuelle, c'est-à-dire qu'il aura considérablement intensifié tout ce qu'il a jamais eu de bien en lui, le mal ayant été enlevé préalablement. Vous avez certainement là une vie céleste, en comparaison de tout ce que nous avons ici-bas.
Il me faut encore vous donner quelques exemples afin que vous puissiez mieux me comprendre.
Les idées concernant ces plans supérieurs sont tellement éloignées des idées de notre vie journalière d'ici-bas qu'il est très difficile de les formuler clairement. Elles sont absolument claires pour ceux qui ont vu ces états ou seulement étudié tout ce qui a été écrit à leur sujet. Mais exposer cette question subitement à des personnes qui n'ont fait aucune étude, signifie que l'on doit fatalement être mal compris.
Si vous voulez une idée générale, considérez que l'homme se trouve maintenant avoir, comme milieu ambiant, tout ce qu'il a de plus élevé et de meilleur dans la vie qu'il à vécue; c'est, en réalité, le plain accomplissement, dans sa sphère mentale, de toutes les aspirations qu'il a eues dans son existence physique, sans avoir pu les réaliser.
Prenez, par exemple, le cas de l'homme religieux: il a aspiré toute sa vie à se rapprocher de l'Idéal divin qu'il se propose; il a désiré voir de près les choses les plus hautes auxquelles il croyait. Beaucoup de conceptions religieuses, ici, en Occident, comme dans d'autres pays, sont matérielles et rabaissées au-dessous de la réalité, à un point qu'il est impossible d'exprimer. Mais, toujours, derrière tout conception religieuse sincère, il y une réalité infiniment plus belle et plus vraie que cette conception pourrait jamais l'être. Beaucoup d'entre nous sont arrivés à trouver absurdes les conceptions religieuses et à les repousser; cela tient, en grande partie, à ce que beaucoup de ces conceptions ont été tellement matérialisées qu'elles ne correspondent plus du tout à ce que nous pouvons savoir ou comprendre. Or, jamais une parcelle de vérité ne peut être contredite par une autre parcelle de vérité. Si la science est vraie, si la religion est vraie,il est impossible que toutes deux se contredisent, et, en réalité, elles ne se contredisent pas.
Au contraire, lorsque vous percevez la vérité qui existe derrière ces conceptions dégradées de la religion, vous comprenez aussi qu'il n'y a réellement rien d'anti-scientifique en elles, que la vérité souvent se trouve dans des régions encore inconnues à la science. Le savant, il est vrai, ne songera pas un seul instant à prétendre que la science ait dit son dernier mot: l'homme de la science sait bien que de nouvelles découvertes sont faites chaque jour, et jamais il ne songera à limiter les découvertes de l'avenir. Mais vous pouvez tenir pour certain que la religion fait erreur si elle professe sur un point quelconque, des idées contraire é votre sens commun scientifique.
Je sais bien que ceci paraît contraire à l'idée de la Révélation, mais je soutiens que les Lois qui régissent nos existences, les Lois scientifiques de la nature,sont les Lois mêmes de Dieu et les expressions de sa Volonté; que, par conséquent, rien de ce qui provient de Dieu ne peut contredire ces Lois.
Il est très vrai que nous ne savons encore que peu de choses de ces Lois, surtout sur les plans supérieurs, mais nous possédons, au moins, certains principes généraux qui se maintiennent après la mort comme auparavant. Nous savons, par exemple, que l'énergie se conserve et que, jamais, aucune force n'est perdue. Ce principe s'applique d'ailleurs aux choses supérieures, spirituelles, tout comme aux choses physiques. Nous savons qu'une cause produit toujours son effet, et qu'il n'y a pas d'effets sans causes. Cela est vrai dans la vie supérieure comme dans la vie terrestre. Par conséquent nul ne doit craindre cette vie supérieure, parce qu'elle sera absolument la conséquence de ses propres actions d'ici-bas.
On a parfois voulu nous faire croire qu'il y avait un châtiment illimité et des souffrances infinies pour une certaine somme d'iniquités commises ici-bas, somme nécessairement finie, quelque grande qu'elle puisse être, étant donné que la vie de l'homme est essentiellement finie. Cette idée me paraît anti-scientifique.Il est impossible qu'une chose limitée ait un résultat illimité, infini. Lorsque nous examinons les conditions succédant à la mort, nous trouvons, comme notre bon sens nous y porte, que toutes choses sont précisément les effets des causes engendrées pendant cette vie, et, de plus, nous découvrons que ce qui détermine l'intensité et la durée du résultat, c'est l'intensité, la quantité de force et d'énergie mise dans les causes ici-bas.
Si vous admettez ce que je vous dis là comme une simple hypothèse, remarquez, au moins, que ces hypothèses ont 'avantage de ne pas introduire un état de choses ou un ensemble de Lois entièrement différents, qu'il faudrait prendre en considération. Ces hypothèses, au contraire, suggèrent que ces mêmes Lois persistent à travers toute la vie de l'homme, non seulement dans cette parcelle qui est son existence terrestre, mais aussi au delà de la mort et dans toute ses existences ultérieures.
Voyons maintenant le résultat de nos hypothèses.
Avant tout, nous nous sommes débarrassés de l'idée terrible de ce qu'on appelle « la damnation éternelle », cette idée devient immédiatement une impossibilité absolue, parce qu'aucun homme n'est assez puissant pour mettre en branle, dans cette vie,des forces qui continueront à agir éternellement.
Voilà au moins quelque chose de gagné. Ensuite,nous nous sommes totalement débarrassés de l'idée de châtiment ou de récompense qui doit nécessairement entraîner celle de la possibilité du caprice. J'entends, ici, qu'ont peut admettre l'idée d'un juge capable de juger tel ou tel coupable avec plus ou moins de sévérité. Si vous vous rendez compte que la vie d'outre-tombe est l'effet de lois aussi immuables que la loi de la gravitation, vous comprendrez qu'il n'y a là aucune espèce de jugement personnel, mais simplement une question de résultat. De plus, vous verrez encore cela: étant donné que chaque homme se à crée lui-même son propre entourage, chaque homme reçoit nécessairement ce qui lui convient à lui-même... Peut-être ne vous est-il jamais venu à l'idée de penser que la notion orthodoxe du Ciel ne conviendrait pas à tout le monde: sans doute ce genre de vie attirerait certaines personnes; mais telle qu'elle est définie dans les livres orthodoxes, vous vous rendrez compte, peut-être, qu'elle ne laisserait pas d'entraîner, au moins, pour d'autres, une certaine monotonie. Je ne veux pas entrer dans le détail de cette idée, cela nous conduirait trop loin, mais vous pourrez concevoir que, pour un homme , le seul moyen de trouver dans la vie céleste les conditions lui paraissant désirables, c'est de se créer à lui-même ces mêmes conditions.
Par rapport à cet état plus élevé,voici ce qu'il a de vrai dans l'enseignement des religions. L'état céleste, l'état supérieur, donne à chaque individu la plus haute joie qu'il soit susceptible de ressentir, mais les homes entendent le bonheur et la félicité de tant de manières différentes qu'il leur est nécessaire, afin d'être parfaitement heureux, de créer eux-mêmes leur propre entourage. En somme, ils l'ont déjà fait pendant la vie terrestre, mais, dans cet état plus élevé, les pensées qu'ils ont engendrées sont libérées du mélange de l'entourage qu'elles subissent ici-bas, et, par conséquent, peuvent produire librement leurs effets.
Donc, en définitive, il n'y a aucune nécessité de craindre la mort d'une façon quelconque, pas plus pour nous-mêmes que pour ceux qui nous ont quittés.
Je sais trop bien, par moi-même, ayant exercé les fonctions sacerdotales durant ma jeunesse, qu'un grand nombre de personnes passent leur vie dans la crainte à cause de leur incertitude sur les conditions postmortem, et comment ceux qui ont perdu un être cher demeurent dans cette incertitude douloureuse à son sujet.
La théosophie nous l'enseigne clairement: Il n'y a aucune raison de se faire de tels soucis et de telles craintes; l'homme, au delà de la tombe, est sain et sauf, grâce à la même Loi éternelle qui a gouverné sa vie ici-bas. L'éternelle Justice est le principe qui gouverne l'univers entier. Ceci ne semble pas toujours le cas ici-bas, je ne le sais que trop, mais l'étude et la connaissance des plans supérieurs nous confirment de jour en jour dans le sentiment ferme que la justice est la loi suprême de l'univers.
Qu'est-ce que la justice après tout? c'est simplement la mise en jeu de cette Loi des causes et des effets, sur les plans supérieurs, moraux et intellectuels. Il est possible à l'homme, pendant sa vie terrestre même, d'atteindre consciemment un grand nombre de ces état supérieurs, et, en y arrivant, il ne peut qu'obtenir une conception plus haute et plus réelle de la vie tout entière, dans son ensemble.
M'adressant à ceux qui ont fait de telles investigations, je leur dis donc: « Mieux vous concevrez ces mondes supérieurs, et plus vous serez fermes dans votre foi en la Justice éternelle. Vous pouvez vous remettre entre ses mains pour franchir les portes de la mort, avec le calme et la certitude les plus absolus. »
Il ne faut pas croire, naturellement, que par cette étude des plans supérieurs, nous puissions arriver à comprendre la Force et la Volonté suprêmes qui se trouvent derrière toutes choses.
En parlant de cette Force, je n'ai pas besoin d'employer les noms si divers sous lesquels l'expriment les religions différentes: tous ces noms doivent évidemment, rester bien loin de toute expression de la réalité.
L'hommage le plus sincère, le plus réel que vous puissiez rendre à CELA, quel que soit le nom qu'on lui donne, c'est de rester silencieux en Sa présence ... pour le moment, cela est en dehors de toute notre compréhension. N'allez pas supposer, comme tant de religions l'ont fait,que Ses lois et Ses décrets peuvent être interprétés immédiatement ici-bas. Tout ce que vous pouvez en appendre, c'est que Sa loi est absolue, et que vous pouvez vous remettre entre Ses mains, là-bas comme ici, et que, par conséquent, toutes les idées d'horreur et de deuil dont nous environnons la mort sont tout à fait inutiles.
La totalité de cette grande Loi, ici-bas, travaille d'une façon continuelle dans le sens de l'évolution, et, autant que nous pouvons observer les plans supérieurs, nous pouvons voir le même immense processus d'évolution se poursuivre. Toujours, et incessamment, la vie s'élève de plus en plus haut; jamais elle ne retombe, si ce n'est temporairement, afin d'entrer, peut-être, dans une nouvelle voie d'évolution. Toujours, et incessamment, la même grande Loi opère, là-bas comme ici, et, de même, et toujours aussi, cette loi doit être envisagée avec confiance, de l'autre côté de la mort, comme dans notre vie terrestre. Si vous pouvez vous faire à ces idées, les plus simples par lesquelles on puisse commencer, vous vous rendrez compte que la mort est entièrement différente d ce que vous aviez cru jusqu'ici. Étant donné que le monde tout entier obéit aux lois de l'évolution, la mort, qui est universelle, doit fatalement n'être qu'un stade ou un degré dans cette évolution. Elle n'est donc pas une chose à redouter, et il faut simplement l'accepter, comme une partie de la vie même.
On possède déjà un très grand nombre de notions sur les états qui suivent la mort, et ces notions se trouvent dans les ouvrages la Société Théosophique. Les personnes, qui jugent ces questions dignes d'investigations plus approfondies, tireront grand profit de l'étude e ces ouvrages. Quant à moi, je puis vous dire que j'ai passé bien des années à étudier ces questions supérieures, et que, chaque jour, je trouve le sujet plus intéressant et plus profitable. Il en sera de même pour ceux d'entre vous qui voudront s'y adonner. Je vous y engage vivement en vous redisant, pour terminer, que la crainte de la mort est une erreur, et, qu'au delà comme en deçà de la tombe,l'homme demeure constamment, en toute sécurité, dans les mains de l'éternelle et bienveillante Puissance qui a tout crée, qui conserve et qui gouverne tout!
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